Samedi, 2 juillet 2022

  • Kora’h
Editorial

 Quand revient le 3 Tamouz

Il existe des dates qui résonnent avec une profondeur toute particulière, et chacun les ressent comme la vibration essentielle d’un appel de conscience. Ce Chabbat revient, pour la 28ème année, le 3 Tamouz, le jour où le Rabbi de Loubavitch quitta ce monde. Certes, parler de vingt-huit ans fait presque penser qu’il s’agit d’un autre temps, d’un autre monde. Et pourtant, la présence du Rabbi est aujourd’hui plus sensible que jamais et son enseignement est d’une telle actualité qu’il semble avoir été dit hier.

C’est pourtant à une autre dimension qu’il faut ici réfléchir. Car la journée du 3 Tamouz porte en elle une puissance qu’il importe de circonscrire pour mieux la saisir et l’intégrer comme notre ressource sans cesse renouvelée. Il faut en effet se garder de penser que nous commémorons une sorte de date-anniversaire, quelle qu’en soit par ailleurs l’importance. Il s’agit, bien au contraire, d’une sorte de clé spirituelle, capable d’ouvrir toutes les portes, celle individuelle de notre cœur comme celle collective de l’exil. Bien sûr, l’homme est fondamentalement libre et rien ne vient jamais contraindre ses décisions ou ses actes. Il nous revient donc personnellement de savoir utiliser l’opportunité que cette date nous donne.

Les idées sont simples et connues. Faire de ce jour un temps de retour, à soi et à D.ieu. En faire un moment où la prière dépasse la dimension du rite pour prendre celle du voyage, où l’étude cesse d’être une activité noble, limitée à l’intellect, pour devenir l’expérience ultime qui change le sens de la vie de celui qui s’y livre. Préparer l’occurrence du jour par les dons à la charité car c’est dans le souci de l’autre que tiennent la réalité et le bonheur de l’existence. C’est qu’il faut redire avec force des idées même anciennes en une époque oublieuse. Un Juste ne s’éloigne jamais de ce monde, un berger n’abandonne jamais son troupeau. Dans ce sens, le Rabbi est parmi nous, au sens le plus palpable du terme. Et, le 3 Tamouz, alors que, spirituellement, il connaît de nouvelles élévations, sa présence acquiert une réalité sans doute plus profonde, à laquelle nous devons nous attacher.

L’objectif est clair au-devant de nous : c’est de la venue de Machia’h et de la Délivrance ultime qu’il s’agit. A nous, ainsi, de nous y associer et de le réaliser en notre temps.

Etincelles de Machiah

 Il est temps d’être joyeux !

Dans l’un des psaumes qui traitent du retour final des exilés en Israël, il est écrit (126: 2-3) : « Alors ils diront parmi les nations : ‘D.ieu a fait de grandes choses pour ceux-ci’. D.ieu a fait de grandes choses pour nous ; nous étions joyeux ».

Un des Maîtres polonais a commenté ces mots de la façon suivante :

« Alors ils diront parmi les nations » : quand Machia’h viendra, les nations du monde diront,

« D. ieu a fait de grandes choses pour ceux-ci » : D.ieu a fait des merveilles pour le Peuple juif.

Nous répondrons à ces propos :

« D.ieu a certes fait de grandes choses pour nous ».

Quelle en est la raison ? « Nous étions joyeux ! »

(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch)

Vivre avec la Paracha

 Kora’h

Kora’h, briguant pour lui-même la Prêtrise et le poste de dirigeant, confiés par D.ieu respectivement à Aharon et à Moché, est l’instigateur d’une révolte. D.ieu donne la preuve visible aux yeux de tous de la justesse de Son choix en faveur de Moché et d’Aharon.

D.ieu ordonne qu’une Terouma (« prélèvement ») de chaque récolte de blé, de vin et d’huile ainsi que chaque premier-né ovin ou bovin et d’autres présents spécifiques (24), soient remis aux Cohanim (les Prêtres).

Moché est la Vérité et sa Torah est la vérité

La Paracha Kora’h décrit la rébellion d’une troupe de deux cent cinquante hommes contre Moché et Aharon. Nos Sages relatent qu’à l’issue du conflit, les rebelles reconnurent leur erreur en déclarant : « Moché est la Vérité et sa Torah est la Vérité ».

Bien que Kora’h et ses hommes se soient également révoltés contre Moché, il semblerait, d’après le contexte littéral du texte, que leur principale cible fût Aharon. Aussi, lorsque Kora’h demanda : « pourquoi vous placez-vous au-dessus de la congrégation de D.ieu ? », Moché répondit-il que les rebelles offriraient avec Aharon un encens et que « celui choisi par D.ieu sera celui qui est saint. », et cela désignerait donc qui doit réellement être le Grand Prêtre.

Puisque l’objet principal de leur récrimination était le statut d’Aharon, la reconnaissance de leur erreur aurait dû consister en une simple déclaration : « la Torah de Moché [qui établit qu’Aharon doit être le Grand Prêtre] est la Vérité ». Pourquoi notifièrent-ils de surcroît : « Moché est la Vérité » ?

Un autre élément nous laisse encore plus perplexes, à propos de la révolte de Kora’h. Le Talmud statue que « celui qui fait durer une querelle se rend coupable de la transgression d’un commandement positif, comme l’affirme le verset : « Ils ne doivent pas être comme Kora’h et sa troupe ».

Comment déclarer que celui qui prolonge une querelle, même insignifiante, est comparé à Kora’h et à ses hommes, alors que la mutinerie des rebelles consistait à remettre en question l’authenticité de la Torah de Moché elle-même ?

Il nous faut donc conclure que la racine de leur péché résidait dans le concept de querelle lui-même. Dans la même perspective que la déclaration des Sages, Moché redoutait davantage la rébellion en elle-même que les divisions qu’elle allait susciter. « Moché entendit cela et se jeta sur la face », « à cause de la querelle ».

De fait, le nom de Kora’h lui-même partage la même étymologie que le mot « Kar’ha » qui signifie « déracinement », « séparation » et « division ».

En ce qui concerne la Torah, le verset statue : « ses voies sont des voies plaisantes et ses chemins sont de paix ». Plus encore, la Torah nous fut donnée pour « apporter la paix dans le monde. » Ainsi, la querelle et le conflit constituent-ils l’antithèse de la Torah et de Moché, dans la mesure où la Torah est associée à son nom.

Bien que l’expression « celui qui aime la paix et poursuit la paix » soit utilisée pour qualifier Aharon (cela constituant la raison plus profonde de la querelle entre Kora’h et Aharon), la cible principale de l’attaque de Kora’h était Moché. En effet, le fait qu’Aharon fût le Grand Prêtre avait pour origine l’injonction de la Torah donnée par le biais de Moché.

En outre, l’aspect principal de la Torah, la paix, constitue l’attribut de Moché. Mais ce dernier se tenait à l’écart des préoccupations matérielles. Aussi, quand le Peuple juif réclama de la viande, s’exclama-t-il : « Comment puis-je avoir un lien avec la viande ? » et lui furent alors adjoints soixante-dix Anciens pour l’aider dans ses tâches concrètes. C’est pour cette raison que, matériellement, la paix dans le monde était la prérogative d’Aharon, qui, lui, pouvait se mettre au niveau de toutes les créatures et les élever à la Torah.

L’on comprend ainsi que la querelle et le conflit, Kora’h, de la racine « Kar’ha », sont en opposition absolue avec Moché, bien qu’ils s’expriment concrètement contre Aharon, l’individu qui apporte la paix.

Il devient désormais clair que, bien que Kora’h et ses hommes visent Aharon, le cœur du conflit était bel et bien leur opposition au concept de paix lui-même, la caractéristique de Moché et de la Torah.

Voilà pourquoi quand vint le moment pour eux de reconnaître leur erreur, ils affirmèrent : « Moché est la Vérité et la Torah est la Vérité. »

Pour garantir que la pénitence est correcte et que la même erreur ne sera jamais reproduite, il est nécessaire d’éradiquer la racine elle-même et la cause du péché.

Puisque la querelle avec Aharon résultait de la dissension plus profonde avec Moché et sa Torah, la reconnaissance de l’erreur devait absolument mentionner : « Moché est la Vérité » tout comme « et sa Torah est la Vérité ».

Le Coin de la Halacha

 Coutumes liées au jour de la Hilloula du Rabbi 3 Tamouz

(cette année samedi 2 juillet 2022)

Le Rabbi avait fixé un certain nombre de coutumes à respecter à l’occasion de la Hilloula du Rabbi précédent. Ce sont ces mêmes coutumes qui ont été reprises pour le 3 Tamouz. En voici quelques-unes :

  • Vendredi 1er juillet, on rédigera un « Pane », « Pidyone Néfech », une lettre de demande de bénédictions (en y précisant les prénoms et les prénoms des mamans de chacun) qui sera lue sur le Ohel du Rabbi.

N° de fax du Ohel : 00 1718 723 44 44

N° de fax du Beth Loubavitch : 01 45 26 24 37

Adresse du Ohel : 226-20 Francis Lewis Blvd – Cambria Heights, New York 11411

E-Mail : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Avant l’allumage des bougies de Chabbat, on allumera une bougie de vingt-quatre heures et on donnera de la Tsedaka (charité), au nom de chacun des membres de sa famille, pour une institution du Rabbi.

  • Pendant chacune des trois prières de Chabbat, cinq bougies de 24 heures resteront allumées devant l’officiant.
  • Durant le Chabbat, on consacrera un moment pour parler du Rabbi et de sa grande Ahavat Israël (amour du prochain) à sa famille et son entourage.
  • On étudiera les chapitres de Michnayot correspondant aux lettres qui constituent le nom du Rabbi.
  • On étudiera les enseignements du Rabbi.
Le Recit de la Semaine

 Une lettre arrivée au bon moment…

Il y a trois mois, un Juif est entré dans le Beth ‘Habad à Zaporojie en Ukraine. Il s’est assis en face du Chalia’h, Rav Nachum Ehrentroï et s’est mis à pleurer.

- Ne le racontez à personne dans la communauté. Mais je me suis mal conduit et mon couple s’effondre. Nous allons divorcer !

Rav Ehrentroï tenta de le raisonner, de lui faire penser aux enfants, à la famille mais il expliqua :

- Cela ne dépend pas de moi. Je n’ai plus de forces…

A court d’arguments, Rav Ehrentroï cessa de discuter de ce sujet douloureux puis annonça à son interlocuteur qu’il se rendrait bientôt à New York et qu’il prierait pour lui auprès du Ohel du Rabbi. Il proposa de lui rapporter un souvenir et l’homme demanda qu’il lui rapporte un nouveau sac de Talit et Téfilines.

Lors de son bref séjour à New York, Rav Ehrentroï pria au Ohel pour toute sa communauté puis se rendit dans le quartier de Crown Heights. Il y connaissait une dame qui brodait et vendait justement des sacs pour Talit et Téfilines. Tout en passant sa commande, il réfléchit : après tout, pourquoi ne pas acheter encore d’autres sacs que des chefs de famille à Zaporojie seraient contents d’acquérir ? Il acheta donc dix sacs et la dame proposa alors de lui donner en plus un sac d’occasion, un peu usé mais encore en bon état. Il accepta : pourquoi pas ?

Quand il retourna à Zaporojie, le Juif en question inspecta les sacs et déclara qu’il préférait justement ce sac un peu usé.

Le lendemain, il revint, bouleversé : il avait trouvé dans ce vieux sac une lettre en hébreu et se demandait s’il s’agissait peut-être d’un document important oublié par l’ancien propriétaire du sac. Quand Rav Ehrentroï vit le papier, il reconnut immédiatement qu’il s’agissait d’une lettre du Rabbi ! Le cœur battant, il la déplia : il s’agissait d’une lettre que le Rabbi adressait à un jeune couple qui s’apprêtait à se marier. Le Rabbi souhaitait à ces jeunes gens de construire un foyer solide, sur les bases de la Torah et des Mitsvot et terminait avec la formule traditionnelle de Mazal Tov !

Le message était clair, la lettre était exactement adaptée à la situation de ce Juif !

L’homme comprit que la lettre lui était comme adressée personnellement et annula toute velléité de dissoudre son foyer…

De fait, l’homme comprit ce que le Rabbi lui signifiait :

Tu n’es pas seul ! Ne te bats pas qu’avec tes propres forces. Si tu restes plongé dans tes problèmes, tu es un homme brisé. Ressaisis-toi, attache-toi à moi, viens avec moi. Ensemble nous surmonterons les difficultés. Tu possèdes des forces infinies, celles de D.ieu et rien ne Lui est impossible !

D’où viendra mon aide ? demanda le roi David (Tehilim - Psaume 121). Ce n’est pas une question, c’est la réponse ! Lève les yeux vers le Ciel, cesse de t’apitoyer sur toi-même, soulève-toi au-delà des petitesses de l’instant et considère le véritable « Ayine » : c’est quand tout est vide et néant que tu peux rebondir vers le véritable « Néant », celui qui est infini. Représente-toi le visage du Rabbi, accroche-toi à ses enseignements, pense à lui et sache qu’il t’accompagne toujours.

Rav Shneur Ashkenazi - Kfar Chabad N° 1955

Traduit par Feiga Lubecki

 

Le Rabbi est toujours avec nous

Il y a 25 ans que nous sommes arrivés à Jitomir, en Ukraine, afin d’aider la communauté juive locale. De temps en temps, nous aidons aussi de nombreux touristes qui viennent visiter les sites juifs du pays. Certains Israéliens viennent aussi visiter la maison où naquit le célèbre poète ‘Haïm Na’hman Bialik. Nous les assistons de notre mieux, surtout pour la nourriture cachère et le Chabbat sur place.

En juillet 2004, un de ces visiteurs s’approcha et me raconta en privé qu’il était une fois entré en Ye’hidout (entrevue) auprès du Rabbi. Bien sûr, cela m’interpela et j’aurais bien voulu qu’il m’en raconte les détails. Mais il refusa pour toutes sortes de raisons et cela me déçut un peu.

Deux mois plus tard, la veille de Roch Hachana, j’écrivis - comme le veut la tradition - une lettre au Rabbi en établissant un bilan de notre action communautaire de l’année et en demandant des bénédictions dans différents domaines. Je suis sortie du bureau de notre Beth ‘Habad pour envoyer la lettre par fax. Puis je suis retourné au bureau et le téléphone sonna (rappelez-vous qu’on était en 2004, à Jitomir, avec des moyens de communication qu’on qualifierait de préhistoriques par rapport à maintenant).

C’était justement ce Juif qui, pour ma plus grande satisfaction, était maintenant disposé à me raconter son entrevue avec le Rabbi. Voici son récit : « Il y a très longtemps, encore avant la Guerre des Six Jours (en 1967), je travaillais comme diplomate pour le Consulat israélien en Union Soviétique. J’y ai fait la connaissance du ‘Hassid Rav ‘Haïm Ozer Marinovsky. Il me mit en relation avec un ‘hassid de la ville de Tachkent que j’ai pu aider de nombreuses façons - grâce à mon statut diplomatique. A cette époque, certaines populations en Union Soviétique recevaient chaque jour des tickets de rationnement leur donnant droit à une portion de pain. Cependant, les Juifs étaient privés de cette ration le jour de Chabbat car ils ne pouvaient porter dans la rue ni les précieux documents ni le pain correspondant. J’ai fait usage de mes relations avec les autorités et j’ai pu obtenir un arrangement pour eux, leur permettant de recevoir une double ration le vendredi et leur éviter ainsi d’avoir faim. Pour eux, cette mesure représentait vraiment la différence entre la survie et la mort. Quelques années plus tard, j’ai été nommé au Consulat israélien de New York. Un soir, le secrétaire du Rabbi me téléphona : le Rabbi souhaitait me parler. C’est ainsi que j’ai eu droit à une entrevue privée. Dès que j’entrai, le Rabbi me salua ainsi : « Un grand merci pour votre aide aux ‘Hassidim en Russie ! ».

Vous vous rendez compte ? A peine avais-je envoyé une lettre au Ohel du Rabbi que le téléphone avait sonné et que j’avais reçu - par l’intermédiaire de cet ancien diplomate - un message clair et réconfortant du Rabbi : « Un grand merci pour votre aide aux ‘Hassidim en Russie ! ».

Revigoré par cet épisode, je me suis remis au travail pour aider les Juifs autour de nous, sachant que le Rabbi est toujours avec nous !

Rav Wilheleim – N’she Kfar Chabad N° 1954