La dimension féminine

Nos Sages enseignent que Chir Hachirim, «le Cantique des Cantiques», ne doit pas être compris dans son sens littéral mais comme une allégorie décrivant la relation qui se développe entre D.ieu et Sa promise, le Peuple Juif. Les différentes phases de rapprochements et de séparations, relatées dans ce texte, servent d’analogie pour les états d’exil subis par notre peuple et les rédemptions qu’il a vécues et vivra.

Le concept même de la rédemption est intrinsèquement lié aux femmes. L’exprimant en termes d’émanations divines, les Sefirot, la Cabbale explique que la Sefira de Mal’hout (littéralement «la souveraineté») reflète la dimension féminine. Durant les périodes d’exil, Mal’hout est dans un état d'abaissement et ne reçoit pas le déversement direct d’énergie spirituelle dont elle bénéficie ordinairement de la part des autres Sefirot avec lesquelles elle est liée. Métaphoriquement, cet état décrit l’obligation pour la femme d’être séparée de son mari. Inversement, à l’Ere de la Rédemption, «une femme de valeur (sera) la couronne de son mari» (Michlé 12 :4 ; Yirmiyahou 31 :21) ; la source supérieure de Mal’hout se révélera alors, le lien direct entre Mal’hout et les autres Sefirot sera rétabli et Mal’hout deviendra une source d’une importance vitale, ranimant la totalité de l’existence.

Ces concepts se sont reflétés tout au long de l’histoire juive. Nos Sages enseignent que «par le mérite des femmes vertueuses, les Juifs furent délivrés d’Egypte» (Sotah 11b) et il en va de même pour les générations postérieures. Quant au futur, il nous a été promis : «comme aux jours de votre sortie d’Egypte, Je vous (au peuple) montrerai des merveilles». Le AriZal écrit que la génération de la Rédemption ultime sera une réincarnation de la génération de l’Exode d’Egypte. Puisque la Rédemption future suivra le même modèle que la rédemption archétypale, elle surviendra également par le mérite des femmes justes de cette génération.

Un foyer pour la famille : un Sanctuaire pour D.ieu

Le rôle du Peuple juif, la fiancée de D.ieu, et tout particulièrement des femmes juives, dans la préparation du monde pour la Rédemption, est analogue à celui de la femme dans son propre foyer. Nos Sages nous enseignent que D.ieu créa le monde pour qu’Il puisse avoir une résidence parmi les mortels. Cet idéal sera complètement réalisé à l’Ere de Machia’h.

Développons cette analogie : une personne ne désire pas seulement posséder une résidence mais elle souhaite qu’elle soit accueillante et décorée avec goût. Il revient conventionnellement à la femme d’enjoliver l’environnement du foyer. Par le même biais, dans la mission de faire de ce monde une Résidence pour D.ieu, c’est la femme juive qui le rend attrayant et lumineux.

Ce rôle éminent, que jouent les femmes dans le monde, doit se retrouver dans leurs activités à l’intérieur de leur propre maison. C’est très largement grâce aux efforts de la maîtresse de maison que chaque foyer est transformé en «un sanctuaire en microcosme», un lieu où se révèle la Divinité, d’une manière qui est parallèle et conduit à la révélation qui se répandra dans le monde entier à l’Ere de Machia’h.

Ces efforts se retrouvent, non seulement dans l’influence spirituelle qu’instille une femme dans le foyer, mais également dans la manière dont elle dessine son intérieur. En effet, c’est elle qui s’assure que chaque membre de la maisonnée possède un Sidour, un ’Houmach, un Tanya, une boîte de Tsedaka bien mise en évidence. C’est elle qui décore la chambre de ses enfants de symboles juifs comme un Chir HaMaalot. Tous ces efforts concrets témoignent de la manière dont le Judaïsme imprègne même l’environnement matériel dans lequel nous vivons.

Eclairer la maison : illuminer le Sanctuaire

L’on se réfère à Chabbat comme à un «microcosme du Monde Futur» et réciproquement, l’Ere de la Rédemption est évoquée comme «le Jour qui sera entièrement Chabbat et un repos éternel pour la vie». Au niveau de notre monde, c’est la maîtresse de maison, qui fait pénétrer l’atmosphère du Chabbat en allumant les bougies. Dans cet esprit, pour rappeler l’analogie avec le monde comme Résidence de D.ieu, c’est donc à la femme qu’il revient de faire entrer la lumière de la Rédemption dans le monde.

En fait, cette mitsva elle-même, l’allumage des bougies de Chabbat, est un moyen puissant pour parvenir à cette fin. Car la lumière visible, générée par les bougies, reflète la manière dont chaque mitsva, et dans un sens plus large chaque acte positif entrepris par un Juif, comme une parole amicale ou un acte bienveillant, augmente la lumière Divine dans le monde.

Les femmes comme ferment de la Libération

Les efforts des femmes juives pour servir d’éléments catalyseurs de la Rédemption ont des précédents historiques. Au cours de l’exil égyptien, c’est Myriam qui relaya la prophétie qu’un sauveur se lèverait. Et même lorsque les dirigeants de cette génération n’entrevoyaient pas l’issue de la servitude et de l’oppression, elle propagea l’espoir et la confiance dans son peuple.

Quand sa mère fut obligée de placer Moché, le futur sauveur des Juifs, sur le Nil, son père, Amram, s’approcha d’elle et lui demanda : «Quel sera le résultat de ta prophétie ? Comment pourra-t-elle s’accomplir ?».

Miryam resta sur les rives du Nil et se tint à distance pour voir ce qui lui arriverait. Nos Sages expliquent qu’outre son appréhension pour le futur de son frère, elle se souciait du sort de sa prophétie. Comment réellement la Rédemption pourrait-elle se produire ?

Dans son sens métaphorique, le récit s’adresse à toutes les femmes juives, celles qui vivent aujourd’hui et celles dont les âmes sont dans le royaume spirituel. Concernées par l’avenir du Peuple Juif, elles attendent la Rédemption avec impatience et anxiété : ad mataï ! Combien de temps encore le Peuple peut-il rester en exil ?

Célébrer en avance

L’impatience empreinte d’anxiété pour la Rédemption, que ressentirent Miryam et toutes les femmes juives en Egypte, trouva son équivalent dans les célébrations pleines d’exultation qui furent les leurs quand s’amorça la Rédemption, après les miracles de la Mer Rouge. Après que les hommes se furent joints à Moché Rabbénou dans le chant, les femmes se mirent à chanter et à danser, remerciant D.ieu dans un esprit de réjouissance qui dépassa celui des hommes (Chemot 15 :20).

(Cette description de leur joie atteste également de la foi profonde inhérente aux femmes juives. Les commentaires de ce verset relatent que lorsque les femmes de l’époque se préparèrent à quitter l’Egypte, elles étaient si sûres que D.ieu accomplirait des miracles pour leur peuple dans le désert, qu’elles prirent des tambourins pour pouvoir se réjouir, le moment venu.)

Dans un avenir très proche, notre peuple célébrera la venue de la Rédemption ultime et «le Saint béni soit-Il fera une danse pour les justes. Nous pouvons dores et déjà avoir un avant-goût de cette célébration imminente. Bien que nous soyons toujours en exil, la confiance en une Rédemption imminente doit nous inspirer de la joie. Car le Peuple Juif a achevé tout le service divin nécessaire pour faire venir le Machia’h. Pour emprunter une analogie à nos Sages, «la table est déjà dressée pour le festin célébrant la Rédemption, tout a déjà été servi et nous sommes assis avec Machia’h. Il ne nous reste qu’à ouvrir les yeux».

Exprimer cette joie démontre la force de notre confiance dans la promesse de la Rédemption et l’expression de cette foi hâtera, à son tour, sa réalisation. Et alors, «couronnés d’un bonheur éternel», nous nous dirigerons ensemble «avec nos jeunes et nos anciens… avec nos fils et nos filles», chantant, «un chant nouveau pour notre Rédemption et la délivrance de nos âmes».