“Il est temps pour moi de quitter ce monde ”, murmura le père de Matslia’h. “ Mais auparavant, je voudrais te faire part de ce que mon propre père m’avait dit avant de mourir: choisis une Mitsva que tu t’engageras à accomplir quelles que soient les difficultés, même si cela signifie perdre tout ton argent. Par le mérite de cette Mitsva, D.ieu te protégera de tout mal”.
Les larmes aux yeux, Matslia’h promit à son père d’honorer sa dernière volonté et décida d’être particulièrement scrupuleux à se laver les mains rituellement chaque matin à son réveil. Effectivement, il fit toujours très attention à s’acquitter de ce commandement.
Par la suite, Matslia’h devint un riche homme d’affaires. Il voyageait souvent à l’étranger. Il emportait toujours avec lui son Talit, ses Téfilines, une provision de nourriture cachère et une énorme gourde d’eau pour qu’il puisse se laver les mains où qu’il se trouve.
Un jour, avec d’autres commerçants, il se joignit à une caravane pour traverser le désert, comme cela se faisait à l’époque. Au milieu du chemin, une terrible tempête se leva: le vent faisait tourbillonner le sable dans tous les sens et nul ne pouvait plus distinguer la route. Après quelques jours d’errance, les voyageurs réalisèrent qu’ils avaient pris la mauvaise direction. Tout ce temps perdu signifiait aussi un gros problème d’approvisionnement, surtout en eau. Le chef de la caravane décida de mettre en commun toutes les ressources et de ne distribuer à chacun qu’une petite ration chaque jour. Matslia’h fut donc contraint de remettre sa gourde. La maigre portion d’eau qu’on lui remettait chaque jour, même s’il était résolu à ne boire que très peu, ne lui permettait pas de se laver les mains rituellement.
Matslia’h expliqua son problème au chef de la caravane: “J’ai besoin de beaucoup plus d’eau que ma ration quotidienne!”. Le chef des chameliers éclata de rire: “Ceci est hors de question: nous sommes perdus dans le désert; se laver n’est pas nécessaire, c’est un luxe que nous ne pouvons nous permettre!”
Mais Matslia’h entendait comme en écho les paroles de son père et il dit: “Je vous donnerai tout mon argent pour une double ration d’eau!”
En entendant cela, le chef de la caravane accepta immédiatement. Matslia’h lui tendit sa bourse et l’argent fut divisé entre tous les voyageurs qui n’en croyaient pas leurs yeux: un homme prêt à donner toute sa fortune pour pouvoir se laver les mains en plein désert!
Une fois que la caravane fut arrivée à bon port, Matslia’h décida de quitter le groupe. Sans un sou en poche, il se dirigea vers la forêt et chercha un endroit où passer la nuit.
Il aperçut les restes d’un feu de camp. Les braises étaient encore fumantes, donc des gens étaient passés par là peu de temps auparavant. En avançant encore, il trouva une rivière. Il but autant qu’il le désirait, se baigna et remplit sa gourde.
Soudain il entendit des pas. Il se hâta de grimper au sommet d’un arbre pour se cacher. C’est alors qu’il aperçut, en bas de l’arbre, une bande de brigands, les mains chargées de marchandises volées et tirant un homme enchaîné. Matslia’h pouvait à peine en croire ses yeux: c’était le chef de la caravane! Il observa les bandits tandis qu’ils poussaient un rocher pour pénétrer dans une grotte où ils disparurent. Matslia’h fit le guet toute la nuit. Au matin, les voleurs quittèrent la grotte. Après avoir attendu quelques instants, Matslia’h descendit de l’arbre, poussa le rocher comme il les avait vu faire et se glissa dans la caverne.
Ses yeux furent presque aveuglés par les trésors qu’il découvrit: des chambres et des galeries remplies de pierres précieuses, de bijoux et de pièces d’or. Continuant son expédition, Matslia’h découvrit deux prisonniers enchaînés: l’un était le chef de la caravane qui lui raconta que, juste après le départ de Matslia’h, les brigands les avait attaqués et dépouillés. L’autre prisonnier était le fils unique du Cheikh local qui avait été envoyé pour combattre ces voleurs mais avait échoué: tous les autres soldats avaient été tués et les brigands avaient demandé à son père une énorme rançon pour la libération du fils.
Matslia’h délivra immédiatement les captifs et tous trois s’enfuirent de la grotte. Le Cheikh fut fou de joie en revoyant son fils. Sur le conseil de Matslia’h, il envoya un nouveau régiment de soldats pour tendre une embuscade aux brigands qui, cette fois, furent capturés, ce qui permit aux habitants de la région de vivre en sécurité.
Bien entendu, Matslia’h fut amplement remercié pour les services rendus.
Mais il savait que tout ceci n’était arrivé que par le mérite de son observance scrupuleuse d’un commandement, même au prix de toute sa fortune, comme son père le lui avait dit.

Traduit par Feiga Lubecki