Quand Oren Sar, professeur à l’université de Beer Cheva, raconte son histoire, c’est avec une émotion à chaque fois renouvelée. En 1985, l’université m’a accordé une année sabbatique. J’en ai profité pour me rendre, avec ma femme et mes enfants, à Manchester pour une année d’études plus poussées. Nous avons été accueillis par un de mes collègues, le professeur Witenerbon.
Un jour, je me suis mis à souffrir de violents maux de tête. Au début, je n’y prêtai pas trop attention mais le phénomène s’amplifia. Un soir, alors que mes amis de l’université avaient organisé une réception en mon honneur pour fêter l’aboutissement de mes recherches, les maux de tête revinrent avec tant d’intensité que j’eus l’impression de subir des coups de marteau. Autant l’avouer: cette soirée fut un vrai supplice. Je compris que le problème était sérieux. Le lendemain matin, je m’effondrai sans connaissance. On m’amena en urgence à l’hôpital où je subis des examens approfondis.
Le diagnostic tomba: trop de globules blancs. Je fus obligé de rester hospitalisé, sans bouger et d’attendre au moins une stabilisation de mon état: nul ne pouvait même envisager une guérison. Les médecins émirent toutes sortes d’hypothèses: si je n’avais pas tant souffert, j’aurais éclaté de rire! En effet, ils évoquèrent la polio ou même un empoisonnement par des rongeurs... 

La situation empirait. Ma famille s’inquiétait de plus en plus. Mon ami, le professeur, me rendait souvent visite, il se montra amical et plein de compassion, il apportait des cadeaux pour mes enfants... Ma femme s’entendit conseiller par les médecins qu’elle ferait mieux de retourner en Israël car moi, je n’y reviendrais sans doute que dans la soute d’un avion... Et le nombre de mes globules blancs continuait d’augmenter. Au moment de ‘Hanouccah, quelques garçons de la Yechiva Loubavitch de Manchester me rendirent visite pour me proposer d’allumer les bougies de la fête. Je leur expliquai que ceci était interdit par le règlement de l’hôpital. Mais ils obtinrent la permission – exceptionnelle – des infirmières. Leur détermination m’impressionna: ils déployaient tellement d’efforts que je ne pouvais pas refuser d’allumer les bougies qu’ils m’offrirent et préparèrent. J’ai donc récité les bénédictions, j’ai allumé et nous avons chanté quelques chants dont je me souvenais encore. Ils m’ont même offert un livre de prières, que je garde avec moi toujours et pour lequel je ressens un attachement particulier. Le lendemain, alors que je dînais, ils revinrent et demandèrent des nouvelles de ma santé. Quand ils ont vu que je mangeais de la viande, ils m’ont demandé – respectueusement – si c’était cachère. J’ai répondu que je prenais les repas que l’hôpital me fournissait. Atterrés, ils proposèrent de m’apporter des repas cachères. Effectivement, ils m’apportèrent un repas chaud, strictement cachère, servi dans des barquettes aluminium fermées hermétiquement. Je n’avais pas très confiance dans la qualité de ce repas, mais je décidai, par respect envers mes nouveaux amis, de ne pas consommer la viande de l’hôpital, pour leur faire plaisir... Lors des examens habituels, le lendemain matin, les médecins remarquèrent une légère amélioration de mon état: peut-être s’agissait-il d’une erreur? On verrait bien par la suite. 

Le même scénario se répéta le soir: les jeunes gens m’apportèrent un repas chaud mais une fois de plus, je décidai de ne pas y toucher. Par respect pour les garçons de la Yechiva, je ne mangeais pas, une fois encore, la viande de l’hôpital. Le lendemain, les analyses confirmèrent que le nombre de globules blancs baissait, de façon étonnante. Les médecins ne cachèrent pas leur stupéfaction: je pourrais sans doute rentrer bientôt chez moi! On décida d’envoyer un échantillon de mon sang dans un laboratoire spécialisé de Londres – pour trouver peut-être la cause de mes souffrances. Les résultats arriveraient dans dix jours. Entre temps, je rentrai à la maison: les douleurs reprirent de plus belle! Finalement, au bout de dix jours, les médecins me convoquèrent. "Voilà! Apparemment vous souffrez d’une affection rare: une allergie aux bactéries qui sévissent en général dans les aliments provenant d’animaux". Il fallait donc que je respecte un strict régime végétarien. C’est alors que les pièces du puzzle s’assemblèrent dans mon esprit. Les deux jours où j’avais commencé à me sentir mieux, c’était quand je m’étais abstenu de manger de la viande, grâce à l’obstination des jeunes garçons Loubavitch: grâce à cette amélioration de mon état, les médecins avaient enfin trouvé la cause de ma maladie! Dès que je me sentis mieux, j’écrivis au Rabbi pour le remercier d'avoir "formé" des jeunes gens aussi dévoués.
Depuis, je continue d’entretenir pour le Rabbi une affection particulière. Je me sens maintenant beaucoup plus proche de la tradition, du judaïsme, de la prière. Ma croyance et ma confiance en D.ieu ne font qu’augmenter chaque jour! 

Propos recueillis par Rav Moshe Ariel HaCohen Roth