En 1982, l’armée israélienne, suite à des attentats meurtriers, pénétra au Liban afin d’en extirper les terroristes. Les soldats entrèrent dans la petite ville de Bamachmadon et, en patrouillant dans les rues, eurent la surprise d’entendre une mélodie juive jouée au piano. C’est ainsi qu’ils découvrirent une famille juive, les Luzia. Celui qui jouait du piano était le fils de 12 ans, Tsion. Bien entendu, les soldats sympathisèrent avec la famille et, en apprenant que Tsion aurait bientôt 13 ans, ils persuadèrent ses parents d’aller en Israël pour y célébrer sa Bar Mitzva.
Suivant la consigne du Rabbi, des ‘Hassidim de Loubavitch avaient suivi les soldats au Liban pour prendre contact éventuellement avec des familles juives. Quand ils rencontrèrent les Luzia, ils furent agréablement étonnés par la chaude ambiance religieuse qui régnait dans leur maison. Ils prirent une photo de M. Eli Luzia, faisant la prière du matin, enveloppé dans son Talit et couronné de ses Téfilines. Ils offrirent aussi spontanément de les aider, matériellement et spirituellement. La première chose que les Luzia demandèrent fut qu’ils réparent le Mikvé (bain rituel) local, ce qu’ils firent immédiatement. Puis, comme les ‘Hassidim imprimèrent un livre de Tanya, ils leur en offrirent un exemplaire.
La Bar Mitsva devait se dérouler en Tichri, le mois des fêtes. Toute la famille Luzia se prépara pour ce premier bref séjour en Israël : une jeep de l’armée israélienne leur fit traverser la frontière et toute la famille put célébrer la Bar Mitsva en compagnie des soldats et des ‘Hassidim qu’ils avaient connus au Liban. Les ‘Hassidim, comme d’habitude, écrivirent au Rabbi à New York pour l’informer de ce qui s’était passé et joignirent à leur lettre la photo d’Eli. Le Rabbi s’intéressa beaucoup à cette famille et envoya des billets d’avion pour que tous ses membres passent les fêtes de Souccot avec lui à New York.
Il ne fut pas facile pour les Luzia, citoyens libanais, d’obtenir des visas pour les Etats-Unis. Cependant les ‘Hassidim insistèrent tant et si bien auprès des autorités compétentes que, la veille de Souccot, les Luzia arrivèrent à New York, où l’atmosphère si spéciale, si joyeuse, les conquit.
A Hochaana Rabba, ils purent enfin passer devant le Rabbi qui distribuait du gâteau au miel aux milliers de fidèles.
Eli en profita pour offrir au Rabbi un cadeau : une coupe en argent dont une extrémité pouvait servir de verre de Kidouch et l’autre, plus étroite, de petit verre à liqueur pour boire “Le’haïm”, “A la vie”. Le Rabbi examina le verre de tous les côtés, remercia Eli et lui donna un morceau de gâteau pour toute la communauté juive du Liban. Puis le Rabbi souhaita de nombreuses bénédictions, en français, car c’était la langue que Mme Aliza Luzia connaissait le mieux.
Quand Eli demanda au Rabbi sa bénédiction pour retourner au Liban après Sim’hat Torah, il fut surpris que le Rabbi l’interrompe fermement et lui dise clairement de ne pas retourner. Ils n’avaient quitté le Liban que pour une courte période et n’avaient emporté avec eux que le strict minimum. Eli implora le Rabbi pour qu’il le laisse au moins retourner quelques jours, le temps de vendre sa maison, d’emporter quelques bagages. Mais encore une fois, le Rabbi répéta d’un ton sans équivoque qu’ils ne devaient pas retourner au Liban, même pour une courte période. Et le Rabbi continua à les bénir.
Ne pas retourner au Liban était pour les Luzia une pilule très dure à avaler. “ C’était notre premier test, dit Aliza. C’était comme si nous avions entendu qu’un incendie avait détruit toutes nos possessions. Nous étions subitement privés de maison, d’argent, de tout. C’était terrifiant, mais je savais dans mon cœur que nous obéirions au Rabbi ”.
A l’époque, Aliza avait de gros problèmes de santé et les médecins lui avaient recommandé de se faire opérer, de sorte qu’elle ne puisse plus avoir d’enfant. Elle demanda au Rabbi ce qu’elle devait décider. Avec un grand sourire, le Rabbi lui dit : “Vous aurez un autre enfant !”.
Aliza était stupéfaite. Elle avait déjà la quarantaine et son plus jeune enfant avait treize ans. Bien sûr, elle avait désiré avoir un autre enfant, une fille, mais cela ne semblait pas du tout réalisable. “La promesse du Rabbi, dit Aliza, sonnait comme un “prix de consolation”, pour compenser la difficulté à ne pas retourner au Liban. Il semble que le Rabbi, dans sa grande compassion, voulait nous redonner espoir, une direction pour l’avenir”.
Quelques jours plus tard, ils retournèrent en Israël où ils durent tout recommencer à zéro. Une semaine après, ils entendirent avec horreur que leur ville natale au Liban avait été investie par les terroristes qui, de sang-froid, avaient assassiné toute la population.
Toutes leurs difficultés d’intégration étaient maintenant oubliées quand ils réalisèrent que le Rabbi leur avait littéralement sauvé la vie.
Aliza se rendit chez le médecin quelques mois plus tard : elle eut un choc quand celui-ci lui annonça qu’elle était enceinte. Il tenta de la convaincre de ne pas mener à terme cette grossesse, vu son âge, car elle risquait, selon lui, de grosses complications. Aliza, se souvenant des paroles du Rabbi, décida de passer outre et, dix mois après son entrevue avec le Rabbi, mit au monde une robuste petite fille qui s’appelle Ruth.
Ruth a maintenant dix-neuf ans ; elle est une source inépuisable de satisfaction pour ses parents et un souvenir vivant de leur rencontre avec le Rabbi.

Traduit par Feiga Lubecki