La porte s’ouvrit brutalement mais sans surprendre cependant Rabbi Eliezer et son épouse dont la table était toujours ouverte à qui en avait besoin. L’homme qui entra avait une apparence passablement inquiétante : un visage frustre, des vêtements d’une repoussante saleté. Ses chaussures maculées de boue imprimèrent rapidement leur empreinte sur le sol qui avait été soigneusement nettoyé en l’honneur du Chabbat qui venait d’entrer.

Sans un mot, l’homme traversa la pièce et prit place à table auprès de Rabbi Eliezer. Après avoir récité un kiddouch, la prière de sanctification précédant le repas du Chabbat, inaudible tant il était hâtif, il se mit en devoir d’engloutir toutes les nourritures à sa portée. En quelques instants, tout était sale : la nappe, les couverts et jusqu’aux vêtements de Rabbi Eliezer. La panse pleine, il murmura quelques rapides borborygmes en guise d’actions de grâce et sans mot dire s’allongea, chaussures aux pieds sur l’un des lits de la maison.

Sombrant vite dans un épais sommeil, l’homme se mit à ronfler bruyamment. Ni rabbi Eliezer ni son épouse. Au contraire, cette dernière apporta une couverture que son mari étendit sur le dormeur.

L’homme dormit ainsi tout le Chabbat puis s’en alla sans un mot, la nuit tombée.
L’étrange invité n’était autre, en réalité que le prophète Elie venu éprouver Rabbi Eliezer et la Rabbanit Sarah.

Et c’est notamment en triomphant aussi naturellement de cette épreuve que ce couple âgé, qui n’avait pas connu le bonheur d’avoir des enfants, eu le mérite d’avoir un fils : Rabbi Israël Baal Chem Tov.