C’est un récit qui semble tout droit sorti des histoires ‘hassidiques d’antan mais ce sont des événements qui me sont arrivés ce dimanche 20 Sivan 5775 (7 Juin 2015). Le jeudi précédent, j’avais quitté ma maison à Buenos Aires pour me rendre à Seattle au mariage de ma nièce. Je devais profiter de ce long voyage pour faire une escale à New York et prier au Ohel, à Queens, l’endroit où repose le Rabbi de Loubavitch – que son mérite nous protège.

Un de mes amis – appelons-le Yehouda – proposa de m’emmener à l’aéroport de Buenos Aires. Yehouda est un rescapé d’une grave maladie. D.ieu merci, il est vivant et se porte bien. Mais il ne pourra pas avoir d’enfants.

Tandis qu’il manœuvrait dans les rues encombrées de la capitale, Yehouda me raconta que sa femme et lui-même considéraient sérieusement l’adoption : «Nous ne savons pas comment procéder : d’un côté, expliqua-t-il, nous préférerions adopter un enfant juif. Mais il n’est pas facile de trouver un bébé juif qui aurait besoin d’une famille. Nous envisageons donc éventuellement d’adopter un enfant non-juif, de le ou la convertir encore bébé puis de l’élever dans le judaïsme. Nous avons discuté avec nombre de rabbins et avons reçu différentes réponses : nous ne savons plus quoi en penser…». Je promis de prier pour lui au Ohel.

Quand nous sommes arrivés à l’aéroport, Yehouda me donna son prénom hébraïque et celui de sa mère ainsi que ceux de sa femme et de sa belle-mère. Ainsi je pourrais prier pour eux au Ohel où j’allais passer Chabbat.

Dimanche matin, j’étais assis dans la synagogue du Ohel pour étudier un Maamar, un discours ‘hassidique. Progressivement, l’endroit se remplit et je remarquai un homme d’âge mûr qui prononçait le Kaddich des endeuillés – rien d’inhabituel à cet âge. La prière s’achevait et j’étais toujours penché sur mon livre. Soudain, l’homme se tourna vers moi, fourra sa main dans la pochette en velours où se trouvaient ses Téfilines et en sortit un morceau de papier jauni et froissé.

- Tenez, me dit-il en me tendant le papier, je suis sûr que cela pourra vous intéresser…

Étonné, je levai les yeux vers lui, je pris le papier, le défroissai et me mis à le lire.

Le papier était une lettre tapée à la machine, en yiddish, du Rabbi… et évoquait le sujet de l’adoption ! Dans cette lettre, le Rabbi conseillait à un couple de rechercher à adopter un enfant juif d’une famille nombreuse et pauvre. Le Rabbi conseillait aussi aux futurs parents adoptifs d’augmenter le niveau de leur observance des Mitsvot en prévision de cette nouvelle addition dans leur famille.

J’étais médusé.

Je demandai à l’homme si je pouvais photocopier cette lettre ou la photographier avec mon téléphone portable mais il refusa. Quand je lui expliquai la situation de Yehouda, il accepta à condition que je ne photographie pas le nom de la personne à qui cette lettre était destinée. Puis il me donna le contexte :

«Le Rabbi avait envoyé cette lettre à mon père. Mes parents n’avaient pas eu d’enfants pendant de nombreuses années et souhaitaient adopter. Incertains quant à la procédure, mon père s’était tourné vers le regretté Rav Moché Feinstein, le grand décisionnaire de l’époque. Rav Moché Feinstein avait suggéré de demander l’avis du Rabbi de Loubavitch. Le Rabbi avait conseillé à mes parents de rechercher un enfant juif qui avait besoin d’une famille et je fus cet enfant. Mon père est décédé il y a tout juste un an et aujourd’hui était le dernier jour où je devais réciter le Kaddich à sa mémoire et pour son mérite.

«Je ne sais pas pourquoi, conclut-il, mais après ce dernier Kaddich, j’ai ressenti une envie irrésistible de vous montrer cette lettre. Pourquoi vous plutôt que quelqu’un d’autre dans cette synagogue ? Je l’ignore !».

Mais tout s’explique : le Rabbi avait trouvé le moyen de répondre à Yehouda et sa femme.

Rav Zalman Farkash – Buenos Aires – Chabad.org

Traduit par Feiga Lubecki