Je suis né à Westchester (New York), dans un environnement très assimilé. Enfants, nous n’avons reçu que très peu d’éducation juive.

En 1987, ma famille a traversé des moments difficiles et, un dimanche, Rav Reouven Flamer vint nous rendre visite – comme il le faisait systématiquement dans la ville dont il avait été nommé Chalia’h (émissaire attitré du Rabbi). En entendant mon père raconter un à un tous ses problèmes, il ne fit ni une ni deux et l’emmena directement au 770 Eastern Parkway, la synagogue quartier général du mouvement Loubavitch. Ce dimanche matin, comme il le faisait depuis quelques temps déjà, le Rabbi distribuait aux nombreux visiteurs qui sollicitaient sa bénédiction des billets d’un dollar à remettre à la Tsedaka (charité). Mon père fut très impressionné par l’ambiance générale régnant dans cette synagogue mais surtout par la personnalité du Rabbi. Cette première visite marqua pour lui le début d’un lent retour à un judaïsme plus engagé. Bien entendu, il nous encouragea à agir de même.

J’avais été comédien à Broadway ; après mes études universitaires, je m’installai à Los Angeles dans l’espoir de poursuivre une brillante carrière à Hollywood. Je me suis marié peu après. Mais ma carrière d’acteur ne décolla pas comme celle d’autres stars. Mon père m’encouragea à fréquenter le Beth ‘Habad à San Monica : effectivement, c’est autour de la table de Chabbat du regretté Rav Levitansky que nous avons, nous aussi, lentement amorcé un retour à une vie de Torah.

Après l’université, je m’inscrivis à l’école de journalisme de Columbia et j’obtins mon premier poste de présentateur des informations à Naples en Floride en 1997. A cette époque, il n’y avait là-bas qu’une synagogue du mouvement réformé et je décidai d’y suivre les offices des grandes fêtes. Ma femme et moi, nous y sommes allés le matin de Roch Hachana mais, à l’entrée, nous avons été « accueillis » par un gardien qui portait une machine dans laquelle nous étions supposés introduire nos cartes de paiement !

Il nous demanda si nous avions réservé nos places pour les offices : non, nous ne l’avions pas fait.

- Dans ce cas-là, pas de problème conclut-il avec un sourire. Vous pouvez acheter vos places maintenant pour 350 dollars chacun : cela inclut d’ailleurs vos places pour Yom Kippour ! Une très bonne affaire, je vous assure !

Mon salaire était vraiment très minime et je ne pouvais pas me permettre de débourser 700 dollars.

- Je ne possède pas cette somme ! répondis-je.

- Alors dans ce cas, je suis désolé mais vous ne pourrez pas prier ici aujourd’hui.

Nous avons rebroussé chemin, terriblement déçus et scandalisés. Mais, de fait, il s’avéra que ce fut la plus grande bénédiction ! Je me suis senti davantage attiré par le judaïsme et je décidai de déménager pour adhérer à une plus grande communauté dans laquelle je pourrais vraiment m’investir et étudier.

Il y avait cependant un problème : je travaillais pour une station de radio locale à Naples tandis que les grandes communautés juives évoluaient autour d’autres stations de radio beaucoup plus importantes, nationales même. Il était pratiquement impossible d’obtenir une place dans ces médias en très peu de temps : j’avais besoin… d’un miracle.

Mon père se rendit au Ohel, au cimetière juif Montefiore de Queens, là où est enterré le Rabbi et pria pour que j’obtienne cette place. Voici ce qu’il écrivit dans la lettre qu’il déposa sur le tombeau (et dont il m’envoya une copie) :

« Cher Rabbi. De grâce, bénissez mon fils Roshi pour qu’il trouve une place à la station de radio WSVN de Miami. En échange, Roshi s’engagera à ne pas travailler le Chabbat ».

WSVN est une des dix plus grandes stations de radio d’information des Etats-Unis et elle est située à dix minutes de la grande synagogue de Bal Harbour. Mon père tenait à ce que je m’installe à proximité d’une communauté adaptée à mon désir d’étudier sérieusement le judaïsme tout en pratiquant le métier que j’aimais passionnément. Il était si sûr que la bénédiction se réaliserait !

Quand je lus la lettre, je fus… scandalisé : comment accepter de ne pas travailler le Chabbat dans ma profession où il fallait être disponible à toute heure du jour, tous les jours ? Comment avait-il pu s’engager à ma place ? Je me calmais en estimant qu’il y avait autant de chances que je sois engagé que de gagner au gros lot : j’acceptai donc son défi.

Six semaines plus tard, on me contacta pour me proposer une place à WSVN ! C’était absolument incroyable : j’évoluai dans une petite station locale et, sans même que je l’ai sollicité, on m’invitait à rejoindre une équipe aussi prestigieuse ? J’ai tout de suite compris que la bénédiction du Rabbi se réalisait et que je devais accomplir ma part du « contrat ». Il y eut des moments difficiles mais je tins bon. De fait, après analyse de ma situation, je réalise que mon succès dans cette carrière depuis est dû à ma détermination à respecter le Chabbat, quelles que soient les circonstances. Il est évident que mon engagement religieux sans faille forçait la considération de mes collègues et de mes supérieurs.

Durant des années, mon épouse et moi-même avions désiré mettre au monde des enfants. Finalement nous avons, nous aussi, envoyé une lettre au Ohel pour demander une bénédiction d’avoir enfin des enfants, en bonne santé. Notre fils Yechaya est né, en bonne santé et adorable, neuf mois plus tard !

Le Rabbi continue de nous guider. Je crois fermement que, quand on s’attache à une personne méritante, des miracles peuvent arriver. Je l’ai constaté dans ma propre vie.

Rosh Lowe - A Chassidisher Derher – Tichri 5778

Traduit par Feiga Lubecki