C’était un vendredi matin ensoleillé de février à Monsey et un ami m’avait invité à assister à une «vente sur place». Je n’avais jamais fréquenté ce genre de vente auparavant mais, par curiosité, je décidai de l’accompagner.

C’était un petit pavillon, des gens entraient et sortaient, demandaient le prix de chaque objet : un dollar pour ceci, un dollar et demi pour cela… La propriétaire était une vieille dame qui déménageait pour se rapprocher de ses enfants ; ceux-ci surveillaient l’évolution de la vente. Plus de cinquante ans de souvenirs d’une brave dame mais nul ne se montrait trop sentimental et tout se passait dans la bonne humeur. Dans la salle à manger, trônait un plateau de Séder en céramique ainsi que deux chandeliers en airain. Je n’y prêtais pas vraiment attention et trouvais finalement de petites choses à acheter pour un prix ridicule. Quand je sortis, la vieille dame me souhaita Chabbat Chalom. Je répondis de la même manière.
Mais sur le chemin de retour, l’image des chandeliers ne me quitta pas. «Mais où avais-je la tête ? J’ai tout raté !» me dis-je.
Il était près de midi, l’heure de prendre les enfants à l’école. Je m’arrêtai à la boulangerie et achetai deux petites ‘Hallot toutes fraîches. Je pris les enfants à la sortie de l’école et leur expliquai le plan que j’avais en tête. A la maison, je pris deux bougies avec les godets en verre correspondants ainsi qu’un exemplaire de mon livre : «Mon compagnon de la table de Chabbat». Nous retournâmes vers le pavillon où se déroulait la vente, en espérant que les bougeoirs n’avaient pas été achetés entre-temps. Tout comme les enfants, j’étais curieux de voir si mon plan fonctionnerait.
Ouf ! Les bougeoirs étaient encore là ! Je demandai à la vieille dame leur prix : «Huit dollars les deux !» répondit son fils. «D’accord !» Et je sortis les billets de mon porte monnaie. Elle me tendit les bougeoirs, je la regardai droit dans les yeux tandis que les enfants observaient chacun de mes mouvements :
- Savez-vous pourquoi j’ai refait toute cette route ?
- Non !
- Je suis revenu avec mes enfants pour les acheter afin de vous les offrir en cadeau. Je veux que ces bougeoirs restent dans votre salon et continuent d’illuminer votre foyer tous les vendredis soirs ! (Elle en avait les larmes aux yeux… Ma fille Hindy lui tendit les bougies et les godets en verre. Moché lui offrit les ‘Hallot. ‘Hanna lui offrit mon livre de chants de Chabbat).
Son fils arriva pour voir ce qui se passait. Sa fille aussi. Elle leur raconta ce que j’avais fait. Tous trois s’embrassèrent en pleurant. Même les étrangers qui cherchaient encore la bonne occasion s’arrêtèrent avec stupéfaction comme s’ils avaient été touchés par ce déversement de lumière divine provenant d’âmes juives ramenées à leur identité.
Finalement, la vieille dame nous apprit que son prénom juif était Tsipora, qu’elle avait fréquenté un Talmud Torah dans sa jeunesse mais rien de plus, qu’elle se souvenait un peu des bénédictions…
Puis son fils déclara : «Puisque vous avez offert un cadeau à Maman, nous aussi, nous voulons vous offrir un cadeau : je vous en prie, reprenez les huit dollars ! Ce que vous nous avez donné aujourd’hui vaut bien plus que huit dollars !»
Je déclinai poliment et demandai au contraire qu’ils partagent avec ma famille le mérite de l’allumage des bougies de Chabbat et Yom Tov.
- D’accord ! répliqua-t-il, tandis que sa mère et sa sœur hochaient la tête en signe d’acceptation.
Nous sommes repartis comme nous étions venus mais cette fois, nous flottions sur des nuages spirituels. Notre plan avait réussi, des âmes juives avaient été réunifiées avec leur source et ce sentiment nous accompagna tout au long de nos préparatifs de Chabbat. Mais surtout, j’étais heureux que mes enfants aient pu prendre part à cette unique transaction. J’espère que cette expérience leur a enseigné comment utiliser chaque opportunité, même quand rien n’est évident à première vue.

Zalman Goldstein – www.chabad.org
Traduit par Feiga Lubecki