Les voitures foncent, les gens se pressent, les sirènes de police hurlent… la folie d’une journée typique à Manhattan, du bruit et de l’agitation…

Et au milieu de cette capitale mondiale des affaires et de l’argent… un îlot de calme ! Les gens se rassemblent autour d’un homme jeune, maigre, barbu, enveloppé d’une nappe bordée de franges, assis dans la position du lotus et qui inspire la sérénité. C’est pour cela qu’on le recherche, qu’on l’admire. Le Gourou Souami se trouve ici dans la Grosse Pomme, au cœur de New York, la ville pourtant blasée.

Il est interviewé par les médias mais… répond dans la langue des signes afin de ne pas briser le silence méditatif qu’il s’est imposé : c’est une des techniques qu’il a rapportée de son séjour en Extrême-Orient.

Ce Souami n’a pas grandi dans les montagnes de l’Himalaya mais dans une maison juive américaine typique. Son vrai nom n’est pas exotique, il s’appelle tout simplement Gil Luks, c’est un brave garçon sympathique.

La première brèche dans son train-train occidental se produisit lors d’un séjour au Japon avec son commando de marines. Il fut subjugué par les techniques de combat et le détachement de la vie inspiré par le boudhisme : cependant, à son retour aux Etats-Unis après le service militaire, il s’inscrivit à l’université, en route vers la réussite dans les affaires !

Bien vite, Gil se trouva plongé dans le rêve américain : une maison aménagée exactement à son goût, une voiture de luxe et un salaire de PDG. Mais, à l’intérieur de lui, c’était le vide : «Quand j’aurai gagné davantage d’argent, devrais-je acheter une maison plus grande ? Est-ce pour cela que je vis ?»

Les Hippies aux pieds-nus attirèrent son regard. Il prit congé du monde des affaires et se joignit à ceux qui cherchaient un sens à leur vie dans les années soixante, ceux qui recherchaient une autre vérité. En stop, il visita le nord de la Californie, se mit à manger bio au Mexique et remit en cause toutes les normes de la société. Au cours de ses aventures, il rencontra une vieille dame adepte du yoga qui lui montra «un film stupéfiant de son gourou en Inde».

Sans plus tarder, Gil prit l’avion pour l’ashram du sud de l’Inde, en quête de la vérité absolue. Il s’imprégna de la pensée indienne et poursuivit ses efforts pour parvenir à la sérénité. De longues années de méditation profonde avec toutes sortes de rites plus ou moins fanatiques ne lui apportèrent aucune joie, seulement une aspiration toujours plus intense de recherche de la vérité.

Au fur et à mesure de son initiation, Gil observa les tromperies et les techniques d’envoûtement du gourou et comprit que ce n’était pas chez lui qu’il découvrirait la vérité. Il retourna aux Etats-Unis : «Là, je parle la langue du pays et je pourrai aider les gens».

Tout au long de ses pérégrinations, Gil s’aperçut que des gens le prenaient comme modèle ; des gens comme lui, des âmes errantes à la recherche du vrai : «Ils affirmaient ressentir auprès de moi des forces spéciales. Quelques chose émanait de moi, quelque chose qui les aidait à s’élever et à penser à D.ieu».

D’autres s’imprégnèrent de l’énergie noble qui se dégageait de lui et le New York Times consacra un reportage au «Gourou de Central Park».

Dix ans plus tard. Notre idéaliste a complètement changé de personnalité et est devenu un Juif enthousiaste. Il habite maintenant dans la vieille ville de Jérusalem, à quelques mètres du Kotel, le Mur Occidental. Comment le Gourou s’est-il acclimaté au gefilte-fish et à l’étude de la Torah ?

«Je pratiquai la méditation 23 heures sur 24. Les rares moments d’élévation m’apportaient une réelle extase mais les moments de dépression étaient douloureux et bien plus nombreux.

Pourquoi suis-je resté tant d’années sur ce banc ? Pour le peu de bien que j’ai cru apporter à d’autres ? J’ai essayé le christianisme mais en fis vite le tour. Alors j’ai décidé de tenter le tout pour le tout : le judaïsme.

Hum… Un des commandements écrits dans la Bible est de mettre de franges aux coins des vêtements. Les commentateurs traditionnels expliquent comment confectionner ces «franges» et où les placer. Mais Gil ne connaissait que la traduction de la Bible en anglais et se mit donc à placer des franges aux bords de ses vêtements. Il acheta de la laine épaisse et, le plus sérieusement du monde, accrocha des franges à tous les bords de ses vêtements, y compris le col de sa chemise, ses manches, sa ceinture : il ressemblait aux plaids qui recouvrent les vieux canapés défraîchis. Petit à petit, il adopta encore d’autres commandements et se rendit à Jérusalem. Les années suivantes furent remplies d’aventures de toutes sortes, d’investissement mental et concret sérieux, avec une sincérité frisant la naïveté. C’est ainsi que Gil devint, au fur et à mesure qu’il étudiait et discutait avec les personnes compétentes, une personnalité reconnue pour la profondeur de sa pensée et le sérieux de son engagement religieux.

Actuellement, le dévouement de Gil ainsi que son aspiration à trouver l’unité dans tout ont trouvé un terrain fertile. Ses racines sont si profondes qu’il est capable d’affronter n’importe quelle situation. De sa demeure située dans la vieille ville de Jérusalem, il se hâte le matin d’aller prier devant le Kotel dès le lever du soleil. Et son charisme, il en fait profiter ses élèves repartis dans le monde entier grâce à ses écrits diffusés sur Internet. Pour lui, l’excellence graphique de son site permet de refléter l’excellence divine qui aboutit à la création d’une nature aux teintes si nombreuses et si différentes. Il dirige également un cours de méditation juive dans un centre juif du Michigan.

Après avoir bataillé tant d’années pour trouver l’unité dans l’univers qui l’entoure, depuis l’extrême Orient en passant par le christianisme, Gil trouve dans les sources profondes de la ‘Hassidout de quoi étancher sa soif de connaissances.

Vous pouvez le rencontrer très souvent devant le stand des Téfilines sur l’esplanade du Kotel. Avec humour et amour, il aide les milliers de touristes, de soldats, d’hommes politiques, d’habitants de Kibboutzim à accomplir cette importante Mitsva, pour certains la première fois de leur vie. Avant d’enrouler les lanières au bras de celui qui accepte – et qui refuserait devant ce dernier vestige de la splendeur du Temple ? – il lui demande : pensez à tous les membres de votre famille ! Imaginez-les, chacun d’entre eux, quand ils sont heureux et sereins. Priez pour leur intégrité physique et mentale, ainsi que pour tous les gens que vous connaissez ! Priez pour nous tous ! N’oubliez pas nos soldats, nos prisonniers et nos malades !

 En partageant avec d’autres ses propres difficultés passées, Gil dispense de l’espoir mais guide aussi les âmes errantes. «Pourquoi ai-je dû passer par toutes ces épreuves avant d’arriver à la maison ? De fait, reconnaît-il, ce n’était pas très malin de rester assis sur un banc, revêtu d’une couverture à franges, avec des cheveux longs comme l’exil retenus par un élastique.

Et les périodes de dépression que j’ai traversées n’étaient certainement pas heureuses. Mais quand un jeune, tenté par la méditation, me téléphone car le message boudhiste résonne dans ses oreilles, je suis capable de le raisonner parce que je suis passé par là et je connais le terrain.

Au lieu de renier son passé, Gil s’en sert pour aider les autres. Pour cela, il aime répéter le message de Rabbi Chmouel de Loubavitch : «Il est bon de connaitre le chemin vers les hauteurs spirituelles. Mais ce n’est pas obligatoire. Par contre aider l’autre de tout ton cœur, c’est cela qui est fondamental !»

COL
Traduit par Feiga Lubecki