Au début de la Paracha A’haré nous lisons : « D.ieu dit à Moché après la mort des deux fils d’Aharon… parle à ton frère Aharon. (Dis-lui qu’) il ne doit pas pénétrer constamment dans le Saint des Saints… »

Quel enseignement pouvons-nous tirer d’une loi qui ne semble s’appliquer qu’au Grand Prêtre ?

Dans son explication de la raison pour laquelle l’exhortation adressée à Aharon suit immédiatement la mort de ses deux fils, Rachi explique : « Cela est similaire à une personne malade qui reçoit la visite d’un médecin. Ce dernier lui ordonne : ‘Ne mange pas d’aliments froids et ne dors pas dans un endroit humide’. Vient alors un autre (médecin) qui lui enjoint : ‘Ne mange pas d’aliments froids et ne dors pas dans un endroit humide, pour ne pas que tu meures, comme l’a fait cet autre individu’ ». Le second l’a rendu plus attentif que le premier. C’est pourquoi le verset précise « après la mort des deux fils d’Aharon ».

Il s’agit donc d’intimer à Aharon de se conformer au commandement de D.ieu, pour éviter de subir le même sort que ses deux fils lorsqu’ils pénétrèrent dans le Saint des Saints, sans y avoir été autorisés.

Mais cela demande une explication. Quelqu’un de la stature d’Aharon aurait compris, sans qu’il ne soit nécessaire de le menacer de conséquences aussi terribles. Par ailleurs, pourquoi ce commandement devrait-il être différent de tous ceux qui lui ont été adressés ainsi qu’au Peuple juif, où n’était évoqué aucun effet dramatique, en cas de désobéissance ?

La mort de ses deux fils survint en conséquence du fait qu’ils « se rapprochèrent tant de D.ieu qu’ils en moururent ». Bien qu’ils aient réalisé qu’en se comportant           ainsi, ils risquaient de périr, cela ne les empêcha pas d’aspirer à atteindre un attachement si grand et une extase si puissante que leur âme quitta littéralement leur corps.

En d’autres termes, la disparition des deux fils d’Aharon n’était pas (seulement) une punition. C’est également le sens du terme « malade », dans un sens positif, comme l’indique le verset : « Je suis malade d’amour pour Toi » (D.ieu) (Chir Hachirim 2 :5). Aharon et ses fils étaient « malades d’amour » tant ils aspiraient à s’approcher de D.ieu. Il s’agissait d’un amour qui ne pouvait être étanché.

Il fut donc nécessaire que non seulement D.ieu empêche Aharon de pénétrer dans le Saint des Saints, chaque fois qu’il le désirait mais aussi qu’il soit averti des conséquences.

D.ieu savait que l’amour que lui portait Aharon était si grand qu’il voulait sans cesse pénétrer dans le Saint des Saints. Cependant, le laisser faire aurait eu pour résultat que son âme quitte son corps, comme cela s’était produit pour ses fils. D.ieu l’informa donc de la nécessité de garder son âme dans son corps, pour qu’il puisse accomplir sa mission dans le monde : celle de le transformer en résidence pour D.ieu.

La leçon que nous pouvons tirer de ce commandement adressé à Aharon est que chaque Juif possède la capacité d’aimer D.ieu, et, en fait, est enjoint de le faire, comme l’indique le verset : « Tu aimeras D.ieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force » (Devarim 6 :5).

Plus encore, chacun a l’aptitude de faire grandir son amour au point qu’il devienne positivement « malade d’amour ». Mais chacun doit aussi être mis en garde pour que son âme ne quitte pas son corps et qu’il accomplisse sa mission dans ce monde.

Ce point est à nouveau mis en lumière dans Kedochim, la seconde section de la Torah qu’on lit ce Chabbat et qui commence par les mots que D.ieu adresse au Peuple juif, leur disant qu’ils doivent être saints car « Moi, l’Eternel leur D.ieu, Je suis saint ». Ce verset nous informe que la sainteté de chaque Juif doit être d’une telle ampleur qu’elle en vient à ressembler à celle de D.ieu.

C’est aussi pourquoi, avant de donner la Torah, D.ieu dit au Peuple juif : « Vous serez pour Moi un royaume de prêtres et une nation sainte ». En d’autres termes, chacun a la capacité d’atteindre le niveau de sainteté d’un « Grand Prêtre », ressentant le même amour que celui d’Aharon et de ses fils. Plus encore, le potentiel que possède l’être humain pour la sanctification est tel qu’il peut même être comparé, à un certain niveau, à celui de D.ieu.