Rambam 1 Chapitre

Notons que bon nombre de ces lois ne sont pas la halakha, c'est-à-dire la pratique observée dans les communautés juives. Elles ne sauraient donc en aucun cas être prises comme référence. Veuillez noter également que cette version est un premier essai qui fera l'objet de corrections ultérieures.

2 Tichri 5786 / 09.24.2025

Lois du créancier et du débiteur : Chapitre Quatre

1. [Les termes] usure [lit. : morsure] et profit [mentionnés dans la Thora] désigne la même chose, ainsi qu’il est dit : « ton argent, tu ne lui donneras pas avec usure et contre profit tu ne donneras pas ta nourriture ». Plus loin, il est dit : « ni usure d’argent, ni usure par la nourriture, ni usure de toute chose par laquelle il fera usure ». Pourquoi [l’intérêt] est-il désigné comme usure [lit. une morsure] ? Parce qu’il [le créancier] mord, fait souffrir son ami et consume sa chair. Pourquoi le verset a-t-il distingué [les deux termes « usure » et « profit », qui désignent le même commandement négatif] ? Pour [rendre coupable le contrevenant à ce commandement d’]une double transgression.

2. De même qu’il est défendu de prêter [à intérêt], ainsi, il est défendu d’emprunter à intérêt, comme il est dit : « tu n’amèneras pas ton frère à faire de l’usure [lit. une morsure] » ; par tradition orale, ils [les sages] ont appris que ceci est une mise en garde pour l’emprunteur, en d’autres termes, « tu ne te feras pas mordre par ton frère ». Et de même, il est défendu d’être impliqué dans un prêt à intérêt entre l’emprunteur et le prêteur ; celui qui est garant, scribe, ou témoin entre eux transgresse un commandement négatif, ainsi qu’il est dit : « ne lui imposez pas d’usure » ; ce [verset, au pluriel] est une mise en garde même pour les témoins, le garant et le scribe. Tu apprends donc que celui qui prête à intérêt transgresse six interdictions : « ne sois pas comme un créancier à son égard », « ton argent, tu ne lui donneras pas avec usure », « contre profit tu ne donneras pas ta nourriture », « ne prends pas de lui d’usure et de profit », « ne lui imposez pas d’usure », « tu ne placeras point d’embûche devant l’aveugle », et l’emprunteur transgresse deux [interdictions] : « tu n’amèneras pas ton frère à faire de l’usure » et « tu ne placeras pas d’embûche devant l’aveugle ». Le garant, les témoins et les personnes [ayant des fonctions] semblables ne transgressent que [l’interdiction] « ne lui imposez pas d’usure ». Et celui qui est un intermédiaire entre eux, prête concours à l’un d’eux, ou lui donne des instructions transgresse [l’interdiction] : « tu ne placeras pas d’embûche devant l’aveugle ».

3. Bien que le prêteur et l’emprunteur transgressent toutes ces interdictions [susmentionnées], ils ne sont pas flagellés, parce qu’il [l’intérêt] doit être restitué ; en effet, quand quelqu’un prête à intérêt, si l’intérêt est fixé [à l’avance], ce qui est défendu par la Thora, [les intérêts] sont récupérés par les juges [le tribunal], qui obligent le prêteur à rembourser [les intérêts], et restituent [l’argent] à l’emprunteur. Et si le prêteur décède, on n’exige pas des enfants [héritiers] de restituer [cette somme].

4. Si un père [défunt] a laissé [aux héritiers] une somme d’argent provenant d’intérêt [perçu indûment], même s’ils savent qu’elle [cette somme] provient d’intérêt, ils ne sont pas tenus de la rendre. S’il leur a laissé une vache, un vêtement, ou tout objet reconnaissable provenant d’intérêt [ayant des signes distinctifs et reconnu comme ayant été indûment pris par leur père à telle personne], ils sont tenus de les rendre pour l’honneur de leur père. Dans quel cas cela s’applique-t-il ? S’il [le père] s’est repenti [de sa faute] mais est décédé avant d’avoir eu le temps de rendre [l’objet]. Mais s’il ne s’est pas repenti, ils n’ont pas à tenir compte de son honneur, et ne sont pas tenus de rendre même un objet reconnaissable.

5. Quand des brigands ou prêteurs à intérêt viennent rendre [ce qu’ils ont indûment pris], on n’accepte pas [on leur pardonne], afin de leur donner accès au chemin du repentir [c’est-à-dire leur faciliter le repentir]. Les sages voient d’un mauvais œil celui qui accepte [la restitution d’un objet pris indûment] de leur part. [Toutefois] si l’objet volé est intact, ou [l’objet pris indûment par] intérêt est un objet reconnaissable, et est tel [qu’auparavant], on peut l’accepter.

6. Quand un contrat fait mention d’un intérêt, fixé à l’avance [et donc interdit par la Thora] ou [interdit] par ordre rabbinique, il [le créancier] peut percevoir le [paiement du] capital [de sa créance] mais non [le paiement de] l’intérêt. S’il [le créancier] perçoit toute [la somme, y compris les intérêts], il [le tribunal] l’oblige à rembourser l’intérêt fixé par avance. Toutefois, la « poussière d’intérêt » qui est [un intérêt interdit] par ordre rabbinique, il [le tribunal] n’exige pas de l’emprunteur [de payer cet intérêt] au prêteur, mais ne restitue pas [celle-ci] du prêteur à l’emprunteur [si le prêteur a perçu cette somme de l’emprunteur].

7. Quiconque rédige un acte [faisant mention] d’un intérêt est considéré comme écrivant et faisant attester des témoins qu’il nie l’Eterne-l, D.ieu d’Israël. Et de même, tous ceux qui empruntent et prêtent à intérêt en privé sont considérés comme s’ils niaient l’Eterne-l, D.ieu d’Israël, ainsi que la sortie d’Egypte [la Providence Divine qui s’est manifestée lors de la sortie d’Egypte], comme il est dit : « ton argent, tu ne donneras pas à usure, etc. Je suis l’Eterne-l votre D.ieu Qui vous a fait sortir de la terre d’Egypte ».

8. Un homme n’a pas le droit d’emprunter à intérêt [de l’argent] de ses enfants et des membres de sa maisonnée, bien qu’il ne soit [généralement] pas mesquin [dans sa conduite avec eux] et que cela soit [considéré pour lui comme] un don qu’il leur fait, cela est défendu, de crainte qu’il les habitue à cela.

9. [Dans le cas] des érudits qui se prêtent [de l’argent] mutuellement, s’il [l’emprunteur] rend [au prêteur] plus que ce qu’il lui a emprunté [sans qu’ils aient stipulé une telle condition au préalable], cela est permis, car il est évident qu’il ne donne [cet argent] qu’en don [et non en intérêt pour le prêt], car ils [les érudits] connaissent la gravité de l’interdiction du prêt à intérêt.

10. Quand quelqu’un prête [de l’argent] à un autre, et que le prêteur s’aperçoit qu’il y a plus [d’argent que convenu], (ou quand il [l’emprunteur] rembourse sa dette] et que le prêteur s’aperçoit qu’il y a plus [d’argent que prévu]), s’il s’agit manifestement d’une erreur [de compte], il est tenu de rendre [l’argent en trop]. Et sinon, [on présume que] c’est un don qu’il lui a fait, ou qu’il lui avait volé [une somme équivalente] et a inclus [discrètement celle-ci] dans le compte, ou qu’une tierce personne lui a demandé d’inclure [la somme d’argent qu’elle lui a volé]. Que peut-on considérer comme « une erreur manifeste » ? [Dans les cas suivants : il s’aperçoit qu’il y a] une [pièce en plus en comptant les pièces une par une], [ou s’aperçoit qu’il y a] deux [pièces en plus en comptant les pièces deux par deux], [ou s’aperçoit qu’il y a] cinq [pièces en plus en comptant les pièces cinq par cinq], [ou s’aperçoit qu’il y a] dix [pièces en plus en comptant les pièces dix par dix], de crainte qu’il [le prêteur ou emprunteur] ait compté [les pièces] cinq par cinq ou dix par dix. Et de même, s’il s’aperçoit qu’il y a une [pièce en plus] par groupe de cinq ou par groupe de dix [par exemple, il reçoit, à la place de 40 pièces, 44 pièces (4*10+4) ou 48 pièces (8*5+8)], il est tenu de restituer [l’excédant], de crainte que les pièces uniques avec lesquelles il comptait [les pièces] cinq [par cinq] ou dix [par dix] se sont mélangées avec celles-ci.

11. [Dans les deux suivants : a)] quelqu’un fait un prêt à un autre suivant une monnaie [c’est-à-dire fait un prêt d’argent ou de produits en fixant une somme d’argent pour le remboursement] , et de même, [b)] quelqu’un fait mention dans le contrat de mariage [que la somme d’argent sera payée] à sa femme en une monnaie connue, et précise le poids [de cette monnaie], s’ils [les autorités] augmentent le poids [de cette monnaie], et que le prix de la marchandise diminue du fait de cette réévaluation [de la monnaie], il diminue [dans le paiement] la proportion de l’ajout [décidé par les autorités], même si cet ajout est minime. Et si le prix [de la marchandise] ne diminue pas du fait de cette réévaluation, il ne déduit rien [dans le paiement] et lui paye en la monnaie qui a cours à ce moment. Dans quel cas cela s’applique-t-il ? S’ils [les autorités] augmentent jusqu’à un cinquième [de la valeur initiale de la monnaie], par exemple, si le poids [de la pièce de monnaie] était de quatre [unités] et qu’ils [les autorités] ont décidé [que son poids serait de] cinq [unités]. Par contre, s’ils ont augmenté [le poids de la monnaie] de plus d’un cinquième [de son poids initial], il déduit tout l’ajout, même si le prix de la marchandise n’a pas diminué. Et identique est la loi pour quelqu’un qui prête [une somme d’argent en mentionnant] une monnaie [de remboursement] et [son poids] est diminué.

12. Quand quelqu’un fait un prêt à un autre suivant une monnaie [cf. note] et que celle-ci est invalidée [par les autorités et n’est donc plus en vigueur au moment du remboursement], si elle a cours dans un autre pays et qu’il lui est possible de se rendre dans ce pays, il [le débiteur] paye [son créancier] dans cette monnaie et lui dit : « va, dépense-la à tel endroit ». Et s’il n’y a pas de moyen de se rendre à cet endroit, il lui paie dans la monnaie qui a cours en ce moment. Et de même pour [le paiement du] contrat de mariage.

13. Certains guéonim ont donné comme directive que lorsque l’emprunteur fait grâce au prêteur de l’intérêt qu’il lui a [indûment] pris ou qu’il lui prendra, même si un kiniane par lequel [l’emprunteur] entérine qu’il renonce [à l’intérêt] ou lui en fait don [au prêteur] est effectué, cela est sans effet. En effet, tout intérêt [donné au prêteur] est un renoncement [de la part de l’emprunteur à ses droits], mais la Thora, elle, n’a pas accepté ce renoncement et l’a interdit. C’est pourquoi, le renoncement à l’intérêt est sans effet, même dans un cas d’intérêt par ordre rabbinique. Il me semble que cette directive est incorrecte ; plutôt, dès lors que l’on demande au prêteur de restituer [à l’emprunteur l’intérêt] et que le prêteur est conscient que ce qu’il a fait est interdit et qu’il [l’emprunteur] est en droit de lui reprendre [cet intérêt], il [l’emprunteur] peut y renoncer s’il désire, de même qu’il peut renoncer [à la restitution d’]un objet volé. Les sages ont dit explicitement que l’on ne doit pas accepter le remboursement des brigands et des prêteurs à intérêt [cf. § 5 supra], ce qui montre donc que le renoncement est effectif.

14. Les biens des orphelins, il est permis de les donner à un homme digne de confiance qui possède de bons biens [terres de très bonne qualité] avec plus de chances de profit que de risques de perte. Comment cela s’applique-t-il ? Il [le tuteur] lui dit [au gérant :] « fais des affaires avec [ces biens], s’il y a un bénéfice, donne-leur leur part du bénéfice. Et s’il y a une perte, tu y contribueras tout seul », ceci étant de la « poussière d’intérêt ». Or, la « poussière d’intérêt » n’est interdite que par ordre rabbinique, et pour les biens des orphelins, ils [les sages] n’ont pas appliqué de décret.