Lettre n° 95

Par la grâce de D.ieu,
Lundi 29 Mena'hem Av 5703,

Aux distingués jeunes gens, se passionnant pour l'étude de lapartie législative de la Torah et de la 'Hassidout, recherchantl'élévation, les élèves de la Yechiva, que D.ieu leur accordelongue vie, Farendale, New York,

Je vous salue et vous bénis,

J'ai bien reçu votre lettre dans laquelle vous m'interrogez sur la fin du premier chapitre du Tanya, qui explique que les âmes des autres nations émanent des trois forces du mal, totalement impures, dans lesquelles il n'y a pas du tout de bien. Vous vous demandez, néanmoins, si ces nations ne possèdent pas au moins un peu de bien. En effet, comment pourrait-il en être autrement, dès lors qu'il leur est demandé de mettre en pratique les sept Commandements des descendants de Noa'h.

De plus, il existe des Justes des nations, qui ont part au monde futur, selon l'avis de Rabbi Yochoua et le Rambam en retient le principe pour la Hala'ha. Ou bien peut-être faut-il maintenir, comme le dit le Tanya, que les autres nations n'ont pas du tout de bien.

Si l'analyse est basée sur la logique, on peut bâtir différents raisonnements. Ainsi:

A) Si l'on avance que les non-Juifs possèdent effectivement un peu de bien, qui agit dans leur personnalité, quelle différence doit-on faire entre les forces du mal totalement impures et celle qui possède un peu de bien? Et pourquoi dire qu'une bonne action faite par un non-Juif n'a d'autre motivation que de s'en enorgueillir? Bien plus, le traité Sanhédrin considère qu'un non-Juif doit aussi donner de la Tsédaka. Dès lors, comment dire qu'il ne possède pas du tout de bien?

B) Si les non Juifs n'ont pas du tout de bien, comment peuvent-ils exister? Et, même s'ils agissent pour s'enorgueillir, ils n'en ont pas moins accompli une bonne action, en donnant de la Tsédaka, quoique avec une mauvaise intention. Or, comment sont-ils capables d'une bonne action s'ils ne possèdent pas du tout de bien?

En fait, la 'Hassidout apporte l'explication de tout cela. Le Tséma'h Tsédek écrit: "Les trois forces du mal sont, par elles-mêmes, totalement impures et ne possèdent pas de bien, mais elles peuvent renfermer des parcelles de sainteté, se trouvant exilées en elles".

Un discours de 5670(1) précise: "Le Tanya dit que les trois forces du mal totalement impures n'ont pas du tout de bien. Cela ne veut pas dire qu'elles ne renferment pas une parcelle de sainteté. Si c'était le cas, elles ne pourraient pas exister. Certes, elles tirent leur vitalité d'une force qui ne fait que les entourer. Pour autant, elles doivent bien posséder la lumière de la sainteté. Toutefois, la parcelle qu'elles en possèdent s'est éloignée de sa source et s'est obscurcie, au point de prendre l'apparence du mal. C'est pour cela qu'elles ne ressentent nullement la Divinité".

Un texte de 5665(2) ajoute: "Le bien devient du mal, comme un morceau de viande permise qui, s'intégrant à celle qui est interdite, s'identifie à elle"(3).

(...) On peut, en effet, être entouré par la vitalité divine, sans en avoir conscience. A l'opposé, cette vitalité peut être engloutie dans la personnalité de l'homme.

Tout cela pourrait être développé, mais je souhaite vous répondre au plus vite et ne pas retarder ma lettre.

Je vous souhaite une grande réussite dans l'étude et dans l'action.

Avec ma bénédiction de Techouva immédiate, délivrance immédiate,

Le directeur du comité exécutif(4)

Notes

(1) 1910, du Rabbi Rachab.
(2) 1905, du même auteur.
(3) Le Rabbi ajoute, en bas de page, la note suivante: "Selon le Yoré Déa, ce principe s'applique uniquement lorsqu'il y a un mélange de viande et de lait. Le Zohar explique, en effet, qu'un tel mélange permet au domaine du mal d'exercer son emprise sur celui de la sainteté. Le Guide des égarés établit un lien entre ce mélange et l'idolâtrie."
(4) Après la signature, le Rabbi indique encore une série de références.