Lettre n° 9298

Par la grâce de D.ieu,


Pourim de Chouchan 5727,
Brooklyn, New York,


A monsieur David Rokéa’h,


Je vous salue et vous bénis,


J’ai bien reçu votre lettre du 5 Adar Chéni, avec ce qui y était joint(1). Vous me décrivez vos fonctions, en Afrique du sud, les conditions qui vous y sont assignées et votre situation actuelle. Vous concluez en me demandant si vous devez rester dans l’endroit où vous vous trouvez actuellement ou bien rentrer en Terre Sainte.


Il est, en général, bien connu, surtout à ceux qui réfléchissent à la situation de notre peuple, les enfants d’Israël, en tout endroit et en particulier dans la diaspora, que la question fondamentale, vitale qui se pose, pour sa pérennité, à la fois en notre Terre Sainte, puisse-t-elle être restaurée et rebâtie et à l’extérieur de celle-ci, est celle de l’éducation de la jeune génération. Celle-ci doit, en effet, recevoir une éducation juive traditionnelle, qui soit basée sur la Torah du peuple d’Israël et sur ses Mitsvot, des Mitsvot concrètement appliquées dans l’existence quotidienne. Il ne faut pas écouter ceux qui commettent l’erreur de penser que cela est plus important en diaspora, moins ou même pas du tout en Erets Israël. En réalité, elle est, là aussi, essentielle et elle insuffle l’espoir que s’accomplira la promesse(2) selon laquelle : “ la terre ne vomira pas ceux qui l’habitent ”, ce qu’à D.ieu ne plaise. L’idée est globalement la suivante : “ c’est du fait de nos fautes que nous avons été renvoyés de notre terre ”, la cause ayant entraîné l’effet. Le seul espoir de faire disparaître l’effet est donc uniquement de supprimer la cause, c’est une évidence. Vous-même vous trouviez récemment en notre Terre Sainte, puisse-t-elle être restaurée et rebâtie. Vous avez donc observé de près l’apparition des “ cananéens ”(3), de ceux qui quittent le pays, qui abandonnent la pratique. En conséquence, il est sûrement inutile de vous en dire plus. J’ajoute que l’éducation des enfants d’Israël en diaspora est fondamentale également pour la pérennité de ceux qui se trouvent en Erets Israël, non seulement dans l’optique de la Alya et de la collecte, car on peut constater tout cela dans la pratique et le voir de ses yeux de chair, mais aussi d’un point de vue plus profond et donc plus essentiel, parce que le peuple d’Israël ne constitue qu’un seul et même organisme. Le renforcement d’une partie du corps ou, au contraire, son affaiblissement, ce qu’à D.ieu ne plaise, ont donc une incidence directe sur l’ensemble de ce corps.


Ce qui est dit ci-dessus vous permettra de comprendre ma position, sur la question que vous m’avez posée. L’action éducative que vous menez dans l’endroit où vous vous trouvez actuellement peut être définie comme une Mitsva dont l’accomplissement ne peut être confié à personne d’autre. Vous avez donc l’obligation sacrée de la poursuivre. Le mérite de ce qui est public vous vient en aide afin que vous intensifiez votre activité destinée à transmettre aux élèves l’amour et la crainte de D.ieu, qui sont la source et l’origine de la pratique des Injonctions et des Interdits, au quotidien(4), y compris l’élan et l’ardeur en l’étude de la Torah, Torah de vie. Puisse D.ieu faire que vous connaissiez la réussite en tout cela, d’une manière sans cesse accrue, dans la joie et l’enthousiasme.


Ceci est d’actualité, en ces jours de Pourim, en particulier d’après le récit de nos Sages(5), soulignant que le décret de Haman fut supprimé grâce aux enfants se consacrant à l’étude de la Torah et recevant leur éducation auprès de Morde’haï, dans un esprit d’abnégation pour la Torah et les Mitsvot. Avec mes respects et ma bénédiction afin de me donner de bonnes décisions de tout cela,


M. Schneerson,


N. B. Bien entendu, vous pouvez faire état de ma lettre et de ma position, en la matière, si vous le jugez bon. J’ajoute que le docteur ‘Haïm ‘Hamyel, que vous mentionnez dans votre lettre est, me semble-t-il, quelqu’un qui m’a adressé ses livres et que nous correspondons. J’ai beaucoup entendu parler de son attitude chaleureuse envers la Torah et les Mitsvot.


Notes


(1) Voir le Likouteï Si’hot, tome 22, à la page 339.
(2) A’hareï 18, 28. Kedochim 20, 22.
(3) Ceux qui refusent même le titre de Juif.
(4) Selon le Tanya, au chapitre 4 et l’explication du Rambam, au début du second chapitre des lois des fondements de la Torah.
(5) Voir le Midrash Esther Rabba, chapitre 9, au paragraphe 4 et chapitre 10, au paragraphe 4.