Lettre n° 8066
[5715(1)]
Notes sur le livre, dans son ensemble(2)
Les idées sont présentées, dans ce livre, comme si le lecteur était déjà dans le vif du sujet dont il traite et devait uniquement prendre connaissance des éléments conduisant à la conclusion et résolvant les contradictions. Or, il est clair que seule une élite possède d’ores et déjà une telle connaissance et même ceux qui en font partie, passé un certain temps, ne se souviendront plus des différentes notions intervenant dans la compréhension de ce sujet. Il serait donc particulièrement judicieux de prévoir un avant-propos, qui présentera la question posée. De fait, pour la plupart des érudits de la Torah, celle-ci sera totalement nouvelle et surprenante. Vous énoncerez également les aspects essentiels des différentes conceptions qui ont été formulées de la réponse. De la sorte, vous élargirez considérablement le cercle de ceux qui comprennent de quoi il s’agit.
Dans cet avant-propos ou cette introduction, il sera nécessaire, en outre, d’expliquer ou, tout au moins, de suggérer que l’analyse de la question proprement dite pourra être trouvée dans le dernier quart du livre. De fait, dans la mesure où cela n’est pas trop difficile, il serait bon de changer cette présentation afin de faciliter, dans toute la mesure du possible, la perception et la compréhension de l’étendue du sujet traité. En revanche, je vous félicite de citer in extenso les propos des auteurs que vous mentionnez, ce qui dispense de consulter leurs ouvrages. Et, sans doute corrigerez-vous les épreuves encore une fois, car on y trouve des fautes d’orthographes(3).
* * *
Vous écrivez(4) qu’en traversant le méridien du changement de date, à plusieurs reprises, pendant l’instant qui réunit le vendredi au Chabbat, on supprime le signe que constitue le Chabbat. Or, une telle éventualité est inconcevable. En effet, on peut se demander ce qu’il en serait si sept jours s’écoulaient sans qu’il y ait un Chabbat ou même sept cents jours sans Chabbat et pourquoi cela ne serait pas possible, surtout d’après le commentaire que fait le Ramban du verset Chemot 20, 8, selon lequel on met en pratique, quotidiennement, l’Injonction : “ Souviens-toi du jour du Chabbat ”. Pour autant, y compris d’après son avis, ce souvenir ne constitue pas, à proprement parler, un signe, puisque l’on est tenu, malgré tout, de porter les Tefillin(5).
Il est donc bien clair que l’on ne peut pas interdire une telle traversée, ni la comparer à une circoncision qui serait repoussée dans le but de ne pas transgresser le Chabbat, par la suite, avec les instruments, selon l’avis du Razah et du Rachba, cités par le Ran dans son commentaire du traité Chabbat 134b ou encore à l’interdiction de se joindre à une caravane qui pourrait être conduite à transgresser le Chabbat. Vous verrez aussi le commentaire de Rachi sur le traité Soukka 25b, qui dit : “ Celui qui accomplit une Mitsva est dispensé…(6) ”. En effet, on est tenu de toutes les mettre en pratique, mais une certaine raison peut en repousser une ou bien la permettre, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence.
En revanche, une comparaison, jusqu’à un certain point, est envisageable avec le cas figurant dans le traité Mena’hot 41a, qui dit : “ Justifieras-tu que tu en sois dispensé ? ”. Et, l’on consultera, à ce sujet, les Tossafot et les Hagahot Maïmonyot, à la fin des lois des Tsitsit. Vous verrez aussi les responsa Tséma’h Tsédek, partie Yoré Déa, au chapitre 92 et le Tsafnat Paanéa’h, seconde édition, à la page 87d. Pour autant, cette comparaison n’est pas parfaite non plus, car, en la matière, la Mitsva existe effectivement(7), alors qu’il n’y a pas de Chabbat, le vendredi ou le dimanche. J’ai vu aussi le passage du Michna Beroura que vous citez, dans votre livre.
* * *
Vous envisagez également, à ce propos, que tous les enfants d’Israël puissent traverser ensemble le méridien du changement de date, ce qui aurait pour effet de supprimer complètement le Chabbat(8). Vous consulterez le Me’hilta, au début de la Parchat Tissa, qui précise : “ Les nations ont encerclé la Terre Sainte et profané Israël ”. A ce propos, le Tsafnat Paanéa’h, du Gaon de Ragatchov, ouvrage dont je ne dispose pas, précise qu’un verset est nécessaire pour le cas où le Chabbat est complètement supprimé. Et, c’est pour cela que le Me’hilta fait allusion à une situation aussi peu fréquente. De même, on peut se demander, dans ce cas, si les Juifs ont mis les Tefillin le jour de Kippour, en l’année où fut achevée l’édification du Temple, puisqu’en ce jour, ils mangèrent et ils burent(9), comme le rapporte le traité Moéd Katan 9a. Vous consulterez le commentaire du Tséma’h Tsédek sur ce traité Moéd Katan, chapitre 3, à la Michna 4, selon lequel la présence d’un signe implique l’interdiction de travailler. Mais, peut-être les Juifs ne travaillèrent-ils pas, ce Yom Kippour(10), à l’exception des Cohanim qui offrirent les sacrifices et peut-être de ceux qui devaient cuire les aliments. En tout état de cause, ce ne fut pas le cas de tous les Juifs, mais ce point ne sera pas approfondi ici.
En revanche, un traversée par tous les Juifs à la fois du méridien du changement de date est impossible, selon l’explication donnée par le Séfer Ha Mitsvot, du Rambam, à l’Injonction n°153, affirmant que D.ieu ne pourrait faire pareille chose, en fonction d’une assurance qu’Il a Lui-même donnée. Et, le Tsafnat Paanéa’h, dans ses lois de la sanctification du nouveau mois, à la fin du chapitre 5, cite, à ce propos, la référence des traités Baba Batra 115b et Horayot 6b. Mais, de fait, on peut se demander ce qu’il veut dire, car même s’il y avait à l’autre extrémité du monde, des descendants d’Ephraïm et de Menaché, leur héritage leur resterait acquis, en tout état de cause. Cette tribu n’a donc pas disparu.
* * *
Vous analysez(11) le commentaire que fait le ‘Hazon Ich de l’avis du Razah et la conclusion qu’il en tire pour le méridien du changement de date. Vous le faites au prix d’énormes difficultés et vous n’apportez cependant pas la solution, comme vous l’indiquez vous-même, à plusieurs reprises, dans votre livre. S’agissant de la capacité d’englober(12), on en retrouve effectivement l’équivalent, quoique d’une manière très différente, dans le cas de celui qui consacre au Temple un membre vital. Un exemple plus proche figure, en outre, dans les lois du Erouv, pour l’homme qui pénètre dans sa limite, à l’intérieur de la ville. En pareil cas, c’est bien l’ensemble de la ville qui est considéré comme quatre coudées. De même, pour ce qui concerne le début du jour, il est évident, d’après tous les avis, que cela dépend du coucher et du lever du soleil, ce qui veut bien dire que chaque point reste strictement indépendant. En conséquence, il est inacceptable d’avancer que, dans le compte de ces jours, des milliers de Mils soient englobés en un point unique.
* * *
En apparence, l’aspect le plus surprenant de la conception du Razah est le suivant. Selon lui, le méridien du changement de date se trouve entre Jérusalem et un endroit localisé à l’extrême-orient. L’explication de nos Sages, au traité Roch Hachana 20b, “ pour nous et pour eux ”, précise ce que sont ces deux points. Or, cela veut dire qu’à l’époque où les Sages se sont exprimés, il y avait effectivement une communauté juive en cet endroit de l’extrême-orient. Dès lors, comment est-il possible que le Talmud ne tranche pas un seul aspect des multiples questions qui sont liées au méridien du changement de date ? Il faut en déduire que l’explication est uniquement donnée “ pour nous ”, pour Babylone. En revanche, là-bas, il n’y avait pas de Juifs.
Vous évoquez la sanctification du Chabbat et des fêtes, là-haut et vous citez différents livres, à ce propos. En effet, la différence entre les endroits n’existe qu’ici-bas(13). Vous consulterez également le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, Ora’h ‘Haïm, chapitre 1, au paragraphe 8 et le Séfer Torat ‘Haïm, à la fin de la Parchat Bechala’h, à partir de la page 708.
Notes
(1) L’année de cette lettre n’est pas certaine.
(2) Il s’agit du Agan Ha Sahar, du Rav Aharon ‘Haïm Zimmermann, qui est une étude sur la localisation du méridien du changement de date. Voir, au sujet de l’auteur, les lettres n°976 et 2502.
(3) Textuellement : “ des lettres en moins et des lettres en plus ”.
(4) A la page 436.
(5) Tous les jours de semaine, ce qui ne serait pas le cas s’ils portaient le signe du Chabbat. Ils seraient alors dispensés du signe des Tefillin.
(6) D’en accomplir une autre.
(7) Et, seule une raison extérieure ne permet pas de la mettre en pratique.
(8) Voir, à ce sujet, la lettre n°183.
(9) Du fait de l’inauguration du Temple.
(10) Bien qu’ils aient mangé et bu.
(11) A la page 415.
(12) Une certaine distance en un point unique.
(13) Alors que tous les endroits se réunissent, en un Chabbat unique, là-haut.
Notes sur le livre, dans son ensemble(2)
Les idées sont présentées, dans ce livre, comme si le lecteur était déjà dans le vif du sujet dont il traite et devait uniquement prendre connaissance des éléments conduisant à la conclusion et résolvant les contradictions. Or, il est clair que seule une élite possède d’ores et déjà une telle connaissance et même ceux qui en font partie, passé un certain temps, ne se souviendront plus des différentes notions intervenant dans la compréhension de ce sujet. Il serait donc particulièrement judicieux de prévoir un avant-propos, qui présentera la question posée. De fait, pour la plupart des érudits de la Torah, celle-ci sera totalement nouvelle et surprenante. Vous énoncerez également les aspects essentiels des différentes conceptions qui ont été formulées de la réponse. De la sorte, vous élargirez considérablement le cercle de ceux qui comprennent de quoi il s’agit.
Dans cet avant-propos ou cette introduction, il sera nécessaire, en outre, d’expliquer ou, tout au moins, de suggérer que l’analyse de la question proprement dite pourra être trouvée dans le dernier quart du livre. De fait, dans la mesure où cela n’est pas trop difficile, il serait bon de changer cette présentation afin de faciliter, dans toute la mesure du possible, la perception et la compréhension de l’étendue du sujet traité. En revanche, je vous félicite de citer in extenso les propos des auteurs que vous mentionnez, ce qui dispense de consulter leurs ouvrages. Et, sans doute corrigerez-vous les épreuves encore une fois, car on y trouve des fautes d’orthographes(3).
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Vous écrivez(4) qu’en traversant le méridien du changement de date, à plusieurs reprises, pendant l’instant qui réunit le vendredi au Chabbat, on supprime le signe que constitue le Chabbat. Or, une telle éventualité est inconcevable. En effet, on peut se demander ce qu’il en serait si sept jours s’écoulaient sans qu’il y ait un Chabbat ou même sept cents jours sans Chabbat et pourquoi cela ne serait pas possible, surtout d’après le commentaire que fait le Ramban du verset Chemot 20, 8, selon lequel on met en pratique, quotidiennement, l’Injonction : “ Souviens-toi du jour du Chabbat ”. Pour autant, y compris d’après son avis, ce souvenir ne constitue pas, à proprement parler, un signe, puisque l’on est tenu, malgré tout, de porter les Tefillin(5).
Il est donc bien clair que l’on ne peut pas interdire une telle traversée, ni la comparer à une circoncision qui serait repoussée dans le but de ne pas transgresser le Chabbat, par la suite, avec les instruments, selon l’avis du Razah et du Rachba, cités par le Ran dans son commentaire du traité Chabbat 134b ou encore à l’interdiction de se joindre à une caravane qui pourrait être conduite à transgresser le Chabbat. Vous verrez aussi le commentaire de Rachi sur le traité Soukka 25b, qui dit : “ Celui qui accomplit une Mitsva est dispensé…(6) ”. En effet, on est tenu de toutes les mettre en pratique, mais une certaine raison peut en repousser une ou bien la permettre, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence.
En revanche, une comparaison, jusqu’à un certain point, est envisageable avec le cas figurant dans le traité Mena’hot 41a, qui dit : “ Justifieras-tu que tu en sois dispensé ? ”. Et, l’on consultera, à ce sujet, les Tossafot et les Hagahot Maïmonyot, à la fin des lois des Tsitsit. Vous verrez aussi les responsa Tséma’h Tsédek, partie Yoré Déa, au chapitre 92 et le Tsafnat Paanéa’h, seconde édition, à la page 87d. Pour autant, cette comparaison n’est pas parfaite non plus, car, en la matière, la Mitsva existe effectivement(7), alors qu’il n’y a pas de Chabbat, le vendredi ou le dimanche. J’ai vu aussi le passage du Michna Beroura que vous citez, dans votre livre.
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Vous envisagez également, à ce propos, que tous les enfants d’Israël puissent traverser ensemble le méridien du changement de date, ce qui aurait pour effet de supprimer complètement le Chabbat(8). Vous consulterez le Me’hilta, au début de la Parchat Tissa, qui précise : “ Les nations ont encerclé la Terre Sainte et profané Israël ”. A ce propos, le Tsafnat Paanéa’h, du Gaon de Ragatchov, ouvrage dont je ne dispose pas, précise qu’un verset est nécessaire pour le cas où le Chabbat est complètement supprimé. Et, c’est pour cela que le Me’hilta fait allusion à une situation aussi peu fréquente. De même, on peut se demander, dans ce cas, si les Juifs ont mis les Tefillin le jour de Kippour, en l’année où fut achevée l’édification du Temple, puisqu’en ce jour, ils mangèrent et ils burent(9), comme le rapporte le traité Moéd Katan 9a. Vous consulterez le commentaire du Tséma’h Tsédek sur ce traité Moéd Katan, chapitre 3, à la Michna 4, selon lequel la présence d’un signe implique l’interdiction de travailler. Mais, peut-être les Juifs ne travaillèrent-ils pas, ce Yom Kippour(10), à l’exception des Cohanim qui offrirent les sacrifices et peut-être de ceux qui devaient cuire les aliments. En tout état de cause, ce ne fut pas le cas de tous les Juifs, mais ce point ne sera pas approfondi ici.
En revanche, un traversée par tous les Juifs à la fois du méridien du changement de date est impossible, selon l’explication donnée par le Séfer Ha Mitsvot, du Rambam, à l’Injonction n°153, affirmant que D.ieu ne pourrait faire pareille chose, en fonction d’une assurance qu’Il a Lui-même donnée. Et, le Tsafnat Paanéa’h, dans ses lois de la sanctification du nouveau mois, à la fin du chapitre 5, cite, à ce propos, la référence des traités Baba Batra 115b et Horayot 6b. Mais, de fait, on peut se demander ce qu’il veut dire, car même s’il y avait à l’autre extrémité du monde, des descendants d’Ephraïm et de Menaché, leur héritage leur resterait acquis, en tout état de cause. Cette tribu n’a donc pas disparu.
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Vous analysez(11) le commentaire que fait le ‘Hazon Ich de l’avis du Razah et la conclusion qu’il en tire pour le méridien du changement de date. Vous le faites au prix d’énormes difficultés et vous n’apportez cependant pas la solution, comme vous l’indiquez vous-même, à plusieurs reprises, dans votre livre. S’agissant de la capacité d’englober(12), on en retrouve effectivement l’équivalent, quoique d’une manière très différente, dans le cas de celui qui consacre au Temple un membre vital. Un exemple plus proche figure, en outre, dans les lois du Erouv, pour l’homme qui pénètre dans sa limite, à l’intérieur de la ville. En pareil cas, c’est bien l’ensemble de la ville qui est considéré comme quatre coudées. De même, pour ce qui concerne le début du jour, il est évident, d’après tous les avis, que cela dépend du coucher et du lever du soleil, ce qui veut bien dire que chaque point reste strictement indépendant. En conséquence, il est inacceptable d’avancer que, dans le compte de ces jours, des milliers de Mils soient englobés en un point unique.
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En apparence, l’aspect le plus surprenant de la conception du Razah est le suivant. Selon lui, le méridien du changement de date se trouve entre Jérusalem et un endroit localisé à l’extrême-orient. L’explication de nos Sages, au traité Roch Hachana 20b, “ pour nous et pour eux ”, précise ce que sont ces deux points. Or, cela veut dire qu’à l’époque où les Sages se sont exprimés, il y avait effectivement une communauté juive en cet endroit de l’extrême-orient. Dès lors, comment est-il possible que le Talmud ne tranche pas un seul aspect des multiples questions qui sont liées au méridien du changement de date ? Il faut en déduire que l’explication est uniquement donnée “ pour nous ”, pour Babylone. En revanche, là-bas, il n’y avait pas de Juifs.
Vous évoquez la sanctification du Chabbat et des fêtes, là-haut et vous citez différents livres, à ce propos. En effet, la différence entre les endroits n’existe qu’ici-bas(13). Vous consulterez également le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, Ora’h ‘Haïm, chapitre 1, au paragraphe 8 et le Séfer Torat ‘Haïm, à la fin de la Parchat Bechala’h, à partir de la page 708.
Notes
(1) L’année de cette lettre n’est pas certaine.
(2) Il s’agit du Agan Ha Sahar, du Rav Aharon ‘Haïm Zimmermann, qui est une étude sur la localisation du méridien du changement de date. Voir, au sujet de l’auteur, les lettres n°976 et 2502.
(3) Textuellement : “ des lettres en moins et des lettres en plus ”.
(4) A la page 436.
(5) Tous les jours de semaine, ce qui ne serait pas le cas s’ils portaient le signe du Chabbat. Ils seraient alors dispensés du signe des Tefillin.
(6) D’en accomplir une autre.
(7) Et, seule une raison extérieure ne permet pas de la mettre en pratique.
(8) Voir, à ce sujet, la lettre n°183.
(9) Du fait de l’inauguration du Temple.
(10) Bien qu’ils aient mangé et bu.
(11) A la page 415.
(12) Une certaine distance en un point unique.
(13) Alors que tous les endroits se réunissent, en un Chabbat unique, là-haut.