Lettre n° 5005

Par la grâce de D.ieu,
5 Tévet 5717,
Brooklyn,

Je vous salue et vous bénis,

J’ai enfin reçu votre lettre du second jour de ‘Hanouka, même si je n’y trouve pas d’explication sur le silence que vous avez gardé, pendant toute cette période. Puisse D.ieu faire que ce soit un bon début pour que vous m’annonciez de bonnes nouvelles de vos accomplissements communautaires et de vos réalisations personnelles.

Conformément à votre demande, je mentionnerai tous ceux que vous citez près du saint tombeau de mon beau-père, le Rabbi, dont le mérite nous protégera.

Le manque d’information me parvenant semble indiquer que les ‘Hassidim n’ont nullement profité des jours propices qui viennent de s’écouler. Cette année, en particulier, les événements(1) ont suscité une émotion particulière. Plusieurs Juifs étaient en éveil pour le Saint béni soit-Il et même pour Sa Torah et Ses Mitsvot.

Comme je l’ai déjà écrit plusieurs fois, je ne sais pas ce que je peux faire d’autre, en la matière. Il semble que l’on fasse preuve du plus grand entêtement pour tout ce qui concerne la diffusion des sources(2). On se limite soi-même et l’on devient comme un végétal, ce qu’à D.ieu ne plaise, incapable de dépasser le périmètre réduit de ses racines.

L’obscurité est si grande que l’on n’a pas même conscience de se trouver dans une telle situation. Pendant l’étude, on se souvient qu’il y a quatre règnes dans le monde(3), que le végétal est plus haut que le minéral et qu’il doit lui-même s’élever vers l’animal. Ce dernier, en effet, possède la qualité de pouvoir se déplacer, d’un endroit vers un autre, où il assumera également sa tâche. Mais, cela ne lui suffit pas et il souhaite s’élever vers l’humain, bien plus, connaître l’avancement, non pas d’une façon mesurée, mais bien au-delà de toute limite.

Or, eux ne ressentent même pas la situation dans laquelle ils se trouvent. Non seulement la majeure partie, mais même la totalité de leur personnalité est investie dans les besoins les plus étriqués du corps et de l’âme animale. De fait, l’Admour Hazaken souligne que les corps sont séparés, que l’un n’est pas identique à l’autre(4).

Quand on leur demande d’oublier leurs besoins physiques, au moins pour quelques instants, afin d’éclairer leur entourage et la part du monde qui leur est confiée, même si la récompense n’est pas matérielle et immédiate, ils ne l’acceptent en aucune façon.

Et, quand il n’y a pas moyen de faire autrement, ils parviennent à se convaincre, ce qui, pour eux, doit être un grand sacrifice, que quelques personnes doivent participer à une réunion. Chacune propose son analyse, en s’efforçant qu’elle contredise toutes celles qui ont été émises au préalable. Puis, chacun proclame qu’il ne peut endosser la responsabilité de tout cela, que l’on ne peut s’en remettre à personne, que chacun a de multiples défauts et qu’il est donc impossible d’agir.

Ils diront alors : “ En quoi tout cela me concerne-t-il ? J’ai fait mon devoir. Je suis venu participer à cette réunion. J’ai écouté les paroles d’une seconde, d’une troisième personne, bien que celles-ci n’atteignent pas mes épaules. Que puis-je faire de plus ? ”. Nos Sages disent, au traité Sotta 22b, qu’il y a là une forme de piété ostentatoire.

Bien entendu, tout ceci ne s’adresse pas à un ‘Hassid en particulier. Certains font exception. Pour ma grande peine, un enfant pourrait les dénombrer(5). Est-ce pour cela que nos saints maîtres ont fait des efforts, qu’ils ont investi leur âme, leurs forces profondes et essentielles, pour que le moment venu, alors que “ il(6) se tient derrière notre mur ”, la situation soit aussi terriblement aride ?

Avec ma bénédiction,

M. Schneerson,

Notes

(1) La guerre du Sinaï. Voir, à ce propos, la lettre n°4890.
(2) De la ‘Hassidout.
(3) Minéral, végétal, animal, humain. Voir, à ce sujet, la lettre n°5008.
(4) L’unité entre les Juifs doit donc nécessairement être réalisée par les âmes.
(5) Tant ils sont rares.
(6) Le Machia’h. Sa venue est imminente.