Lettre n° 48

24 Tévet 5703,
Hilloula de l'Admour Hazaken,

A nos remarquables amis, grands érudits de la Torah,
les élèves de la Yechiva, se trouvant à Montréal, Canada,

Je vous salue et vous bénis,

Vous connaissez sans doute par le détail les réalisations du Merkaz Leïnyaneï 'Hinou'h, fondé il y a plus d'un an par mon beau-père, le Rabbi Chlita. Un bref compte rendu en a été donné dans la parution de Tichri-Tévet 5703 du périodique Hakrya Vehakedoucha.

L'un des points centraux de cette oeuvre concerne les petites filles, auxquelles, pour différentes raisons, on a prêté bien peu d'attention. Des écoles sont donc créées pour elles, qui s'appellent Beth Rivka ou Beth Sarah. De même, des Messibot Chabbat sont organisées à leur intention.

Faisant référence au discours du Rav H. M. A. Hadakov, directeur du Merkaz Leïnyaneï 'Hinou'h, lors de sa visite à Montréal, le centre a décidé de créer tout cela dans votre ville, puis, dans la mesure du possible, dans d'autres villes de votre pays.

Je m'adresse donc à vous afin que vous vous engagiez tous, ou, tout au moins, quelques uns d'entre vous, parmi les plus capables, selon votre choix et votre avis, dans cette oeuvre considérable. Et, selon l'expression de mon beau-père, le Rabbi Chlita, "il est une certitude que l'effort et le labeur ne sont jamais inutiles".

Les moyens d'action, dans ce domaine, varient en fonction des conditions de l'endroit. Mais, de façon générale, on peut les énoncer en trois points, qui sont les suivants:

1) La création d'une école pour les jeunes filles et les petites filles.

2) L'institution de Messibot Chabbat pour les petites filles.

3) L'organisation de cours, formels ou bien sous forme de discussions amicales, permettant de former rapidement des monitrices pour ces Messibot Chabbat, de même que des oratrices et des personnes qui dirigeront l'action auprès des petites filles et des jeunes filles, qui prendront part à toutes les formes d'activité qui viennent d'être décrites.

L'expérience a montré ici que l'on pouvait espérer mener une action auprès du public le plus large et affronter une plus faible opposition si l'on adopte un comportement désintéressé, sans chercher à obtenir quoi que ce soit en échange, même si cela est lié à la sainteté, ou encore sous un nom d'emprunt. De fait, le Merkaz Leïnyaneï 'Hinou'h est ici une institution totalement indépendante.

Il est bien sûr inutile de vous expliquer l'importance d'une telle activité. Je formulerai donc uniquement les quelques remarques suivantes:

Le Midrach Me'hilta souligne que la Torah fut donnée d'abord aux femmes et ensuite seulement aux hommes. Le Midrach Chemot Rabba explique qu'elles accomplissent les Mitsvot avec plus d'empressement que les hommes. Elles doivent, en outre, guider leurs enfants vers la Torah. Vous consulterez, à ce propos, les explications données par mon beau-père, le Rabbi Chlita, à Riga, en 5694(1).

De même, nos Sages disent que la récompense promise aux femmes dépasse celle qui revient aux hommes.

De plus, en la présente époque du talon du Machia'h, l'aspect essentiel du service de D.ieu est la Tsédaka, par le mérite de laquelle Israël sera libéré. Or, dans ce domaine également, les femmes sont supérieures, comme le soulignent nos Sages, car elles donnent du pain(2), alors que les hommes donnent de l'argent(3).

On peut peut-être trouver une application au service de D.ieu à cette affirmation de nos Sages. En effet, la relation avec une autre personne ou même avec sa propre âme animale peut être conçue de deux façons:

1) Tout d'abord, on peut faire tout ce qui est en son pouvoir pour que son prochain accomplisse pleinement la mission qui lui fut confiée par le Roi du monde, lorsqu'il descendit ici-bas. Bien plus, on lui inspirera la soumission à D.ieu, même s'il ne comprend pas pourquoi il doit en être ainsi, même s'il n'éprouve pas l'amour et la crainte de D.ieu. Et le Rambam enseigne que l'on doit éduquer les enfants à servir D.ieu , jusqu'à ce qu'ils aient la maturité nécessaire pour Le servir par amour.

Il est évident que celui qui est de nature soumise adoptera spontanément un tel comportement. Il saura trouver les mots justes, les paroles et les actions qui influenceront son prochain. Mais, il est aussi une seconde façon:

2) On peut, en effet, s'efforcer d'expliquer à son prochain la grandeur du Créateur, comment L'aimer et Le craindre. Ainsi, l'interlocuteur parviendra de lui-même à la conclusion qui s'impose et mettra en pratique la Torah et les Mitsvot. Cette démarche est, bien sûr, celle que préfèrent les intellectuels, les érudits, basant leur comportement sur leur analyse logique et marquant fermement leurs positions.

C'est en ce sens que nos Sages demandent de donner de son pain aux pauvres, car "il n'est de pauvre que par l'esprit". Mon beau-père, le Rabbi Chlita, expliqua, à Pourim 5691(4): "Lorsque l'on voit qu'un Juif est nu, c'est-à-dire qu'il ne porte pas de Tsitsit ou de Tefilin, on doit le couvrir".

Le Tana Dveï Elyahou Rabba dit, en effet: "Lorsque tu verras quelqu'un qui est nu, tu le couvriras. Comment cela? Si tu vois quelqu'un qui est dépourvu de paroles de la Torah, fais-le entrer chez toi, puis enseigne lui le Chema Israël et la prière. Apprends lui un verset ou une Hala'ha, chaque jour".

Car, un Juif est nu seulement dans la mesure où il est dépourvu de Torah et de Mitsvot. Il est alors véritablement dépouillé. Puis, lorsqu'il rencontre un homme, qui a l'habitude de se trouver à l'extérieur de chez lui, y menant une activité commerciale avec son or et son argent, comme l'explique la 'Hassidout, celui-ci lui donnera une pièce, c'est-à-dire qu'il lui insufflera l'amour et la crainte de D.ieu. Ces sentiments sont, selon l'expression du Tanya, les ailes qui lui permettront de prendre son envol.

La finalité ultime est de servir D.ieu par amour et le pauvre a donc encore un effort à faire, celui d'acheter son repas avec l'argent qu'il a reçu.

Il n'en est pas de même s'il rencontre une femme. Ce qu'elle possède lui vient de son "Mari", en l'occurrence de D.ieu, Qui lui offre l'amour et la crainte. De même, un serviteur ne fait une acquisition que pour le compte de son maître. Le service de D.ieu de la femme consiste donc à se soumettre au Mari. En conséquence, son amour et sa crainte sont pétris de soumission.

Cette femme donnera donc au pauvre du pain, prêt à être consommé. Etant soumise, elle peut l'offrir également à un pauvre qui n'a rien de commun avec elle.

Le don de soi, la soumission et l'accomplissement effectif de la Torah et des Mitsvot font, en effet, partie des qualités de cette génération du pied et du talon du Machia'h, comme l'expliqua le Rabbi, le 20 Kislev 5694(5).

Puissions-nous tous avoir très prochainement le mérite d'assister à la réalisation de la promesse selon laquelle "voici que Je prendrai les enfants d'Israël d'entre les nations... David, Mon serviteur, régnera sur eux". Alors, sera établie l'importance de l'action concrète et "la femme vertueuse sera la couronne de son mari".

Avec ma bénédiction de Techouva immédiate, délivrance immédiate.

Notes

(1) 1934. Likouteï Dibourim, fin du tome 3.
(2) Immédiatement consommable.
(3) Avec lequel il faut encore acheter des aliments avant de pouvoir les consommer.
(4) 1931. Likouteï Dibourim, tome 4, page 729a.
(5) Rabbi Yossef Its'hak, en 1934. Likouteï Dibourim, tome 1, page 110a.