Lettre n° 430

Par la grâce de D.ieu,
Cinquième lumière de
‘Hanouka 5709,

Au grand Rav, ‘Hassid qui craint D.ieu
le Rav I.(1),

Je vous salue et vous bénis,

J’ai reçu votre lettre en son temps et je vous joins le fascicule édité à l’occasion du 19 Kislev, qui vient de paraître.

Vous m’avez interrogé sur le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, Ora’h ‘Haïm, chapitre 308, paragraphe 83: "Il est interdit de jouer à la balle pendant le Chabbat et les fêtes. Certains permettent de la transporter et de jouer dans le domaine public". Vous êtes surpris de cette affirmation et vous considérez que, pour éviter les confusions, il aurait fallu dire que ceci concerne uniquement les fêtes, mais non le Chabbat.

De fait, d’autres difficultés sont soulevées ici:

1. Pourquoi ne pas dire "même dans le domaine public", selon la formulation la plus courante? Le Ramah dit bien: "Il est permis de jouer à la balle, même dans le domaine public" et, à la même référence: "Une femme peut allaiter son enfant, même dans le domaine public".

2. Il s’agit ici des lois du Chabbat et non de la fête. Pourquoi ne pas mentionner seulement le Chabbat, sans parler de la fête, considérant que l’on pourrait déduire l’un de l’autre, alors que le contraire n’est pas vrai.

A mon humble avis, il est clair qu’il y a ici une faute d’imprimerie. Je me suis dit qu’il y a peut-être un mot qui manque. Ainsi, on dirait: "de jouer, pendant la fête, dans le domaine public", reprenant, de la sorte, la formulation des Tossafot, référence qui est indiquée en marge.

Pour autant, on n’a pas encore répondu aux deux questions posées. Et une première édition du Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, emploie comme abréviation, pour désigner Rechout Harabim, le domaine public, non pas les lettres Reïch, Hé, Reïch, comme dans l’édition courante, mais seulement Reïch Hé.

Il me semble donc qu’il y avait, dans le manuscrit, les lettres Reïch, Hé, Youd, signifiant Rechout Haya’hid, domaine privé(2). Puis, le copiste, par erreur, indiqua seulement un Reïch et un Hé qui, par la suite, furent interprétés comme désignant Rechout Harabim, le domaine public. Alors, on ajouta un second Reïch. Puis, dans l’édition de Vilna et les suivantes, cette erreur fut "aggravée" lorsque le mot abrégé fut indiqué en toutes lettres, Rechout Harabim.

J’ai vu un avis(3) qui proposait la correction suivante du Choul’han Arou’h, chapitre 308, paragraphe 83: "de jouer, pendant Chabbat, dans le domaine privé et, durant la fête, dans le domaine public", mais je ne le partage pas. En effet, rien n’oblige à dire qu’à la différence de ce que l’on rencontre d’ordinaire, plusieurs mots ont été omis ici. Dans l’explication précédemment donnée, en revanche, seul un Youd l’a été, c'est-à-dire uniquement un point.

* * *

Puisque nous parlons d’erreurs d’imprimerie dans le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, j’évoquerai également une question qui m’a été posée sur la partie Yoré Déa, chapitre 33, paragraphe 2. L’Admour Hazaken dit que Hamraa est un gavage léger de l’animal, lui permettant de rendre la nourriture, alors que Halaata est un gavage profond, qui ne permet pas de rendre. Or, les commentateurs et le Chass Haarou’h, au traité Chabbat 155b adoptent la position inverse. Quelle est la source de cette position de l’Admour Hazaken?

En fait, je me suis dit qu’il n’y a nullement là une idée nouvelle de sa part, mais seulement une faute d’imprimerie de la part du copiste. Concrètement, l’Admour Hazaken pense également que Halaata est un gavage léger et Hamraa, un gavage profond. Il est trois moyens de le prouver:

Le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, lois du Chabbat, chapitre 324, paragraphe 6; le Tséma’h Tsédek, dans ses Pisskeï Dinim, à cette même référence, Yoré Déa, chapitre 33, seconde version, paragraphes 1 et 2; le Tséma’h Tsédek, à la même référence, second chapitre 33, première version, paragraphe 2.

Il est bien clair que, si le Tséma’h Tsédek avait adopté une position inverse de celle de l’Admour Hazaken, il ne l’aurait pas passé sous silence.

Je conclus en vous souhaitant tout le bien et en saluant tous vos proches,

M. Schneerson,

Notes

(1) Le Rav Its’hak Doubov. Voir la lettre n°196.
(2) Cette correction fut ultérieurement introduite dans le Choul’han Arou’h.
(3) Le Rav Avraham ‘Haïm Naé, dans son Kountrass Hachoul’han.