Lettre n° 331

Par la grâce de D.ieu,
Second jour de Roch ‘Hodech
Adar Richon 5708,

Au ‘Hassid qui craint D.ieu,
le Rav I. Altein(1),

Je vous salue et vous bénis,

Je fais réponse à votre lettre:

A) On a déjà écrit au Rav N. K.

B) Le second chapitre du Tanya dit que «la vitalité des ongles de l’enfant émane du cerveau». Il est bien clair qu’il s’agit du cerveau de l’enfant et non de celui du père, comme on peut le vérifier concrètement. Du reste, le Tanya poursuit: «La vitalité des différentes parties de l’âme des ignorants (qui sont les «ongles» du peuple juif) émane de celles des chefs de la génération (comparables au cerveau)».

Remarque: L’âme des ignorants, en s’attachant à celle des érudits, retrouve sa source première, la Présence divine. On pourrait en conclure que l’ongle du fils, en recevant la vitalité de son cerveau, est unifié à la goutte de semence issue du cerveau du père(2). De fait, on peut penser que c’est bien le cas, car la Guemara précise que le cerveau de l’enfant se forme bien à partir de cette goutte. Il ne subit donc aucune modification(3), de sorte que le cerveau du père se perpétue dans celui du fils. Puis, lorsque les ongles reçoivent leur vitalité du cerveau du fils, ils s’attachent, par son intermédiaire, à celui du père.

Mais, on peut également penser qu’il y a là une différence entre l’image donnée par le Tanya et le concept qu’elle doit illustrer. En effet, l’enfant acquiert une existence différente de celle de son père. Il n’est donc pas tenu de donner sa vie(4). En ce sens, il se distingue de l’âme(5), comme le souligne le Likouteï Torah.

C) A propos du troisième chapitre du Tanya, vous me demandez pourquoi l’on parle de force pour ‘Ho’hma, l’attribut de découverte intellectuelle, alors que l’on n’emploie pas ce terme pour Bina, l’attribut d’analyse raisonnée.


Le mot force a deux significations:

1. On parle, tout d’abord, des forces de l’âme qui en sont, en quelque sorte, les membres. Ainsi, le chapitre 51 du Tanya parle des 613 forces de l’âme. A ce stade, aucune différence ne peut être faite entre ‘Ho’hma, Bina et Daat et l’on peut parler de la force de chacun de ses attributs.

2. Une force est également un potentiel. Le potentiel se distingue de son application concrète par son caractère global et caché, ou encore par ce qu’il peut accomplir. On parle alors de force et, lorsque celle-ci n’est plus cachée, mais apparaît à l’évidence et s’introduit dans le détail, elle devient effective.

A ce dernier stade, il y a bien une différence entre ‘Ho’hma et Bina qui, de ce fait, sont appelés «le père et la mère», comme l’établissent divers textes, y compris dans le Tanya.

D) Vous me demandez quelle est la différence entre Tiféret, l’harmonie et Hod, la splendeur, ces deux Attributs étant liés à la beauté. De plus, quel lien établir entre la beauté de Hod et «les entrailles qui portent conseil»?

Dans la plupart des discours ‘hassidiques définissant Hod que j’ai pu voir, cet Attribut est lié à la soumission plus qu’à la splendeur, cette dernière notion n’étant introduite que quelques fois, en particulier dans le Tanya, qui cite les deux explications.

On peut en déduire ce qu’est la différence entre Tiféret d’une part, la beauté qui est perceptible intellectuellement et résulte de l’harmonie entre les couleurs et les sentiments, Hod, d’autre part, la beauté qui est perçue comme telle, sans pouvoir réellement être définie, car elle dépasse l’entendement.

Pour l’heure, je n’ai pas vu que l’on présente Hod comme l’harmonie et la beauté. En effet, il ne peut y avoir de beauté véritable qu’en présence de couleurs harmonieuses, comme l’expliquent le Tanya et le Bad Kodech.

De fait, il est beau qu’un concept particulièrement profond se révèle à celui qui le perçoit, car, même si ce dernier ne le comprend pas parfaitement, il peut cependant mesurer la profondeur de celui qui le transmet, dès lors que la compréhension du concept n’est pas déterminante, pour y parvenir.

Néanmoins, la profondeur du concept ne permet d’en révéler que la dimension la plus superficielle. La beauté consiste alors à le rendre accessible également à celui qui a la perception la plus limitée. C’est alors que «les entrailles portent conseil», même si la compréhension effective de Tiféret manque.

Parfois, l’homme qui reçoit un concept en est si éloigné que celui-ci n’éveille pas même la soumission en lui. Il a alors uniquement conscience qu’il devrait se soumettre. Ce niveau s’appelle «Hod de Hod». Une image permettra de le comprendre:

Un villageois ne sait pas qui est le roi. Lorsqu’il voit, néanmoins, que le chef de son village, dont il connaît la grandeur, se prosterne devant le prince, il décide de se soumettre à ce prince qui, par cet acte, devient pour lui un personnage merveilleux. Puis, lorsqu’il voit ce prince se prosterner, à son tour, devant le roi, le villageois prend conscience qu’il doit se soumettre à lui. C’est Hod de Hod.

Vous consulterez les discours ‘hassidiques de Lag Baomer, en particulier dans le Sidour, qui définissent également Hod de Hod et sur lesquels est basée l’explication qui vient d’être développée. Le commentaire des Tehilim du Tséma’h Tsédek dit aussi: «La quintessence de ‘Ho’hma permet de comprendre une notion intellectuelle, sans pour autant la révéler. Puis, Hod permet de la transmettre à son prochain. A l’opposé, Hod est occulté lorsque l’on n’enseigne pas, comme le soleil qui ne brillerait pas. En ce sens, Hod n’évoque pas uniquement la soumission, bien qu’il l’intègre également. Car, il désigne, avant tout, le reflet qui éclaire». Voici ce qu’il dit, concernant notre propos et tout ceci pourrait être développé.

En vous souhaitant tout le bien,

Rav Mena’hem Schneerson,

On peut donc introduire deux distinctions:
1. Perçoit-on ou non la beauté d’un concept intellectuel?
2. La beauté de Tiféret est intrinsèque et ce point me semble déterminant.

Hod implique une relation qui reste extérieure. Celui qui donne transmet une idée particulièrement profonde, dépassant celui qui la reçoit. Sa beauté est donc liée à sa valeur propre, mais elle n’est pas perçue comme telle par chacun.

Notes

(1) Le Rav Israël Meïr Altein, de New York.
(2) Qui est à l’origine de son existence.
(3) Etant, à l’origine, une cellule du cerveau du père, la goutte de semence devient, après la conception, une cellule du cerveau de l’enfant.
(4) Pour son père, leurs deux existences étant différentes.
(5) Qui est indissociable du corps.