Un vendredi après-midi, je rentrai de Tel-Aviv vers Kfar ‘Habad : il était tard et, pour gagner quelques minutes, je pris un raccourci : cela n’impliquait aucun risque pour les autres mais cela me fit mordre une ligne blanche.
C’est alors qu’un policier me repéra et m’ordonna de me garer. J’arrêtai le moteur, ouvris ma fenêtre, admis ma faute et demandai à l’officier de police de me rendre un service : qu’il rédige le procès-verbal aussi vite que possible car Chabbat approchait.
Il m’intima l’ordre de sortir de la voiture car il voulait vérifier sur son ordinateur si je n’étais pas un récidiviste. Il se mit à écrire et me demanda mon nom : «Vous êtes Touvia Bolton ? Ce nom me dit quelque chose ! D’où est-ce que je connais ce nom ?»
«Peut-être de prison ?» hasardai-je, tout en regrettant mon audace : il était capable de ne pas apprécier la provocation…
«Prison ?» Il était visiblement choqué.
«Oui ! Je vais souvent en prison : pour lire la Méguila à Pourim pour les détenus, pour leur distribuer des bougies à ‘Hanouccah ou des Matsot avant Pessa’h… Mais moi-même, je n’ai jamais été emprisonné, rassurez-vous !»
Il continuait d’écrire. Puis il leva la tête : «Vous êtes Loubavitch, n’est-ce pas ?»
«Oui», répondis-je, ne sachant pas si ce serait positif ou non…
Il me tendit le papier et déclara, pensif : «J’ai eu un grand miracle, grâce au Rabbi, vraiment un grand miracle !»
«Racontez-moi votre histoire, dis-je, cela me remboursera au moins l’amende que je devrai payer !»
«C’était il y a vingt ans, en 1986. J’étais un policier en moto. Je m’apprêtai à aller dégager un passager encastré dans une voiture accidentée. Soudain un véhicule suspect, en me dépassant, me poussa avec mon cycle dans un ravin où je dégringolai d’une hauteur de plusieurs mètres. Quand on me dégagea, mon cou et ma colonne vertébrale étaient brisés et je pensai rester paralysé à vie. Les chirurgiens parvinrent à me faire retrouver l’usage de la moitié gauche de mon corps mais estimaient qu’ils ne pouvaient m’aider davantage. J’essayai plusieurs praticiens, des médecines alternatives, sans succès.
Quatre ans plus tard, mon médecin m’informa qu’une opération en Allemagne était susceptible de m’aider. C’était encore au stade expérimental, mais cela valait la peine d’essayer, disait-il. On fixa l’opération pour dans deux semaines. Je n’étais pas vraiment convaincu, mais me disais que tout était préférable à ma situation actuelle.
Ce vendredi après-midi, un de mes amis amena un jeune Loubavitch à la maison. Je n’ai aucune relation avec la religion et je n’aime pas les gens religieux. Mais ce Loubavitch me conseilla de demander une bénédiction au Rabbi : «Laissez-moi tranquille et sortez d’ici !» lui dis-je.
Il m’expliqua qu’il ne prenait pas d’argent pour cela et je me radoucis. Tout ce que j’écrivis dans la lettre fut : «Je veux la santé et de l’argent !». Je signai de mon nom et faxai la lettre depuis mon domicile.
Neuf heures après la fin de ce Chabbat, mon fax sonna. C’était une lettre en provenance du secrétariat du Rabbi : «Ne procédez pas à l’opération, elle n’est pas nécessaire. Avec l’aide de D.ieu, vous recommencerez à travailler comme auparavant».
Je lus et relus la lettre. «Elle vient de ce grand rabbin ? Mais je ne lui ai rien écrit à propos de l’opération ! C’est ce jeune Loubavitch qui a dû lui en parler ! Voilà comment ce rabbin à New York est au courant ! Et il me dit de retourner travailler ! C’est ridicule !» De rage, je déchirai la lettre en petits morceaux que je jetai à la poubelle.
Deux jours plus tard, à six heures du matin, le téléphone sonna. A moitié endormi, je décrochai le combiné : «Qui est-ce ?» demandai-je.
«C’est Eddy, de la police municipale. Nous réorganisons le service et nous désirons que vous en fassiez partie !»
«Quelle bonne blague tôt le matin !» me dis-je. Je raccrochai avec fracas et refermai les yeux. C’est alors que je me réveillais complètement : je venais de réaliser que j’avais décroché le combiné avec la main droite, celle qui avait été paralysée ! Je pensai que je rêvai mais je levai ma main vers mon visage : elle fonctionnait ! Le téléphone sonna à nouveau, je décrochai encore avec la main droite.
«Pourquoi avez-vous raccroché ?» Avant que j’ai pu répondre, il continua : si vous ête intéressé, vous devez vous rendre au bureau le mercredi.
Je me rendis en voiture au bureau : c’était la première fois depuis quatre ans que je conduisais ! Tous les fonctionnaires de police étaient nouveaux, ce qui explique sans doute pourquoi ils m’avaient appelé : ils ignoraient mon état de santé !
Je passai des examens médicaux. Quand je retournai le dimanche pour les résultats, j’en profitai pour montrer au médecin mes précédentes radios : «Oh, le pauvre ! dit-il. De qui s’agit-il ?» Quand je pointais le doigt vers moi-même, il faillit tomber à la renverse : «Sur l’ancienne radio, vous n’étiez qu’os fracturés et cicatrices tandis que sur les radios prises cette semaine, tout est parti ! On dirait que le Rabbi vous a donné un corps nouveau !»
«Si on me demande mon avis, conclut le policier, je dirai que le Tsaddik prie pour chacun de nous de là où il se trouve.»
Nous nous sommes embrassés puis je remarquai : «J’ignore quel est le montant de l’amende que je mérite mais elle en vaut chaque chékel, rien que pour l’histoire que j’ai entendue !»
Il sourit : «Une amende ? Non ! Juste un avertissement !»

Rav Touvia Bolton
ohrtmimim.org
traduit par Feiga Lubecki