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Samedi, 19 septembre 2020

  • Roch Hachana
Editorial

 Les fêtes : cette année plus que jamais !

Roch Hachana est évidemment notre horizon. Comment pourrait-il en être autrement alors que le rendez-vous est déjà là et que sa grandeur spirituelle nous domine de toute son élévation ? Et la question retentit dans toutes les têtes : comment cela va-t-il se passer ? Nous sortons à peine de longues semaines de ce que nous avons pris l’habitude d’appeler le confinement. Nous avons souvent traversé cette période comme on traverse un désert aride. Et voici qu’il nous faut être prêts pour des fêtes essentielles. Comment vivre un temps d’exigences sanitaires tout en ressentant le lien avec D.ieu avec cette force qui va bien au-delà de la simple conviction ? Tout se passe comme s’il nous était demandé de conserver la tête dans les étoiles tout en enfonçant nos pieds dans la lourde glaise. Alors, ces fêtes, de quoi auront-elles l’air ?

C’est peut-être justement à cela qu’on reconnaît le véritable prix des choses. Si les événements peuvent nous contraindre à oublier notre chemin d’éternité, c’est aussi parce que ce dernier n’a pas été tracé avec l’enthousiasme suffisant. Car, s’il est probablement plus simple d’être fidèle à soi-même en un temps d’où tout souci est absent, il est sans aucun doute plus grand de le rester au cœur du tumulte du monde, quand les nuages s’amoncellent et que se font entendre des peurs souvent irraisonnées et excessives. Il faut savoir vivre les moments qui en valent la peine. Il faut ressentir, de la manière la plus forte, la soumission à D.ieu de Roch Hachana, la crainte de D.ieu de Yom Kippour, la confiance en Lui de Souccot et l’allégresse sans limites de Sim’hat Torah. Il faut entrer dans ce grand voyage de l’âme qu’est le mois de Tichri en sachant que c’est le Créateur Qui nous y conduit.

Certes, les précautions nécessaires doivent être prises. Nul ne saurait mépriser les règles adaptées. Cela fait aussi partie de la vie. Toutefois, rien ne peut mettre en cause l’essentiel. Nous passerons donc ces fêtes dans un équilibre difficile, nous gardant de renoncer à l’un ou l’autre impératif. Mais, avec confiance, nous vivrons ces fêtes avec toute l’ampleur impliquée par ce terme. Vivons-les et nous serons véritablement vivants ! Bonne année à tous.

Etincelles de Machiah

 Un maître et un roi

Deux titres sont donnés à Machia’h : celui de maître et celui de roi.

Maître – du fait de son immense sagesse, il enseignera à tout Israël les secrets de la Torah.

Roi – Machia’h aura également une dimension qui dépassera l’intellect. Aussi, les Juifs ne pourront pas recevoir ce degré de façon profonde car il les dépassera. Ils le recevront comme un « décret du roi ».

(D’après les Maamarei Admour Hazakène – Néviim p.4)

Vivre avec la Paracha

 Roch Hachana : La naissance miraculeuse d’une nation

Le premier jour de Roch Hachana, nous lisons la naissance miraculeuse d’Its’hak chez Sarah et Avraham, alors âgés respectivement de 90 et 100 ans. Comme nous allons le voir, d’autres miracles se produisirent également en ce jour.

Quand Sarah apprit qu’elle allait donner naissance à un enfant, elle s’exclama : « D.ieu a fait le rire pour moi. Quiconque entendra rira pour moi » (Beréchit 21 :6).

Et plus tard, elle déclara : « Qui eût dit à Avraham que Sarah allaiterait des enfants ? » (Ibid. 21 :7).

Rachi explique : le rire de Sarah signifie que le jour de la naissance d’Its’hak,

1) de nombreuses femmes stériles conçurent,

2) de nombreuses personnes malades furent guéries,

4) de nombreuses prières furent exaucées

5) le monde entier ressentit beaucoup de joie et beaucoup de rires.

En d’autres termes, le miracle de la naissance d’Its’hak ne se limita pas à sa seule famille mais apporta la délivrance au monde entier et ce, en divers aspects.

De plus, Rachi dit que les mots « allaiterait des enfants » signifie que Sarah ne se contenta pas d’allaiter Its’hak mais que diverses princesses (de par le monde) lui apportèrent leur enfant pour qu’elle le nourrisse et elle les allaita tous.

Cela apporta un démenti à la situation qui prévalait et où « les gens murmuraient, à l’encontre d’Avraham et de Sarah, disant qu’ils avaient adopté un enfant abandonné dans la rue et prétendaient qu’il était leur fils biologique. »

En effet, à l’époque, pour savoir si une femme était bien une nouvelle mère, il suffisait d’observer si elle allaitait son bébé ou non.

« Nourrir des enfants »

Certaines questions nous viennent à l’esprit. Si les gens voulaient savoir la vérité à propos de Sarah, le fait qu’elle allaite Its’hak aurait constitué une preuve suffisante. Pour ceux qui étaient vraiment sceptiques, le fait qu’elle nourrisse deux ou trois bébés aurait pu prouver qu’elle avait donné naissance à Its’hak. Quel besoin avait-elle de nourrir tous les enfants des princesses ?

Une autre question se pose : dans cette Paracha, en ce qui concerne le mot hébreu utilisé pour allaiter « Heinika », il comporte deux fois la lettre youd alors que dans les autres endroits de la Torah, ce mot n’en comporte qu’un seul. Quel est donc le sens de ce youd supplémentaire ?

Du personnel à l’universel

Pour répondre à ces questions, examinons les événements qui se produisirent juste avant la conception d’Its’hak. La Torah relate que D.ieu dit à Avram : « Ton nom ne sera plus Avram mais Avraham. » (Beréchit 17 :5). Autrement dit, « tu n’es plus av ram : « père (de la nation de) Aram », mais tu es Avraham, signifiant : « Av Hamon Goyim », « un père pour une multitude de nations. » Et Rachi de commenter : « Il est Av Le’hol Haolam, un père pour le monde entier ».

De la même façon, D.ieu change le nom de Saraï en disant : « son nom sera Sarah » (Ibid. 17 :15) », « jusqu’à présent tu étais Saraï, Ma princesse, maintenant tu deviens Sarah, une princesse pour le monde entier. »

Pourquoi Avraham et Sarah furent-ils ainsi nommés, juste avant la conception d’Its’hak ? La conception tout comme la naissance sont des sujets familiaux intimes. Pourquoi la Torah suggère-t-elle que la naissance d’Its’hak n’est pas simplement une affaire privée mais qu’elle prend une dimension universelle ?

Its’hak est le premier à être né de parents juifs. C’est une bénédiction pour le Peuple juif, dès lors, pourquoi ajouter « le monde entier » à l’équation ?

Une lumière pour les nations

Les miracles à l’échelle mondiale qui entourent la naissance du premier enfant juif nous livrent un important message. Depuis le tout début, le projet et la mission des Juifs ne sont pas de nature privée. Les Juifs ne sont pas simplement les soutiens de leurs propres familles ou de leur propre peuple. Les événements qui entourent le jour de la naissance d’Its’hak démontrent que la nation juive se doit d’être « une lumière pour (toutes) les nations » (Yechayahou 42 : 6). C’est la raison pour laquelle D.ieu change le nom d’Avram pour qu’il signifie « Père du monde entier » et celui de Saraï en « Princesse du monde entier ». Cela souligne, depuis la Genèse, qu’avec la naissance de chaque Juif vient la responsabilité de changer le monde entier et la force de le faire.

En tant que « lumière pour les nations », chacun de nous porte une responsabilité universelle et interconfessionnelle. Il nous revient d’être la boussole morale du monde, d’enseigner à l’humanité qu’il y a « un œil qui voit et une oreille qui entend ». Nous devons dire au monde que sur le Mont Sinaï, D.ieu a ordonné à Moché de convaincre et d’encourager tous les peuples à observer les Sept Lois Noa’hides dont la Mitsva de la charité.

Dans le passé, les Juifs vivaient dans des ghettos et avaient peu d’interactions avec les autres nations, a fortiori ne pouvaient-ils les convaincre d’accepter les Lois Noa’hides. Aujourd’hui, les conditions ont changé. Les Juifs et les non Juifs ont davantage d’échanges, sont plus proches et plus liés. Les Juifs peuvent désormais avoir un rôle public et il nous est maintenant possible d’atteindre et d’illuminer les nations. Nous pouvons ainsi préparer le monde à la Délivrance ultime qui transformera l’univers entier.

Les deux youd

Cela explique pourquoi le mot « Heinika » possède deux youd. Youd est la première lettre du Nom de D.ieu. Il représente donc la Divinité que Sarah transmet aux enfants qu’elle allaite. Non seulement elle la transmet à son propre fils Its’hak (symbolisé par le premier youd) mais elle l’infuse également à tous les enfants des autres nations qu’elle nourrit (ce qui est représenté par le second youd). Sarah nourrit chaque personne qu’elle rencontre car son devoir, en tant que Juive, est d’influencer toutes les nations du monde, en leur enseignant de reconnaître D.ieu et d’observer les Lois Noa’hides.

Pour que Sarah puisse réussir sa mission spirituelle, D.ieu accomplit un miracle lui permettant d’allaiter tous les enfants qu’on lui apportait. C’est grâce à ce miracle que les princesses des nations prirent conscience que la nourriture et la bénédiction de D.ieu viennent par l’intermédiaire du Peuple d’Israël.

Nous aussi devons, tout d’abord, offrir de la nourriture matérielle à ceux qui en ont besoin : des aliments, des vêtements et des abris. Cela permettra de créer le réceptacle nécessaire pour que soit accepté notre message spirituel.

A Roch Hachana, le Jour du Jugement pour le monde entier, pour les Juifs, les non Juifs et les descendants de Noa’h, nous devons décider d’être des guides et des modèles, non seulement pour notre famille mais pour toutes les nations du monde.

Et par le mérite d’être « une lumière pour les nations », nous pourrons voir la réalisation de la prophétie de Yechayahou : « le Temple de Jérusalem sera solidement reconstruit… et toutes les nations du monde y afflueront… et elles diront : montons sur la montagne de D.ieu… Il nous enseignera Ses voies et nous marcherons dans Ses chemins… »

Et en ce jour-là, « nos bouches seront réellement emplies de rire… »

Le Coin de la Halacha

 Que fait-on la veille de Roch Hachana

(cette année vendredi 18 septembre 2020) ?

On ne récite ni le Ta’hanoun ni les Psaumes 20 et 86 durant la prière du matin. On ne sonne pas le Choffar, afin de marquer la différence entre la coutume (du mois d’Elloul) et l’obligation (de Roch Hachana).

En présence de dix hommes (ou tout au moins 3 hommes), chacun récite le texte de « Hatarat Nédarim », l’annulation des vœux, afin de ne pas commencer la nouvelle année tant qu’on n’aurait pas accompli tout ce qu’on a promis l’année précédente : en effet, à Roch Hachana, chacun promet de mieux faire. Mais quelle serait la valeur d’une telle promesse si on n’a pas tenu les promesses de l’année précédente ?

Les hommes se coupent les cheveux, s’immergent dans le Mikvé. On revêt les vêtements de fête.

On augmente les dons à la Tsedaka (charité) en s’assurant que chacun a de quoi faire face aux dépenses de la fête.

Nombreux sont ceux qui se rendent au cimetière sur les tombes des êtres chers disparus et des Tsadikim (Justes) afin qu’ils intercèdent en leur faveur et celle de leurs descendants.

De nos jours, on évite de jeûner et on préfère donner à la Tsedaka (charité) l’argent équivalent aux repas consommés (en général une somme multiple de 18).

Que fait-on à Roch Hachana ?

Vendredi 18 septembre 2020, après avoir mis des pièces à la Tsedaka (charité), les femmes, les jeunes filles et les petites filles allument les bougies de Roch Hachana ainsi qu’une bougie qui dure au moins 48 heures (avant 19h38, en Ile-de-France) en récitant les bénédictions suivantes :

1) : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner Chel Chabbat Vechel Yom Hazikarone » ;

2) : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé ».

(« Béni sois-Tu Eternel notre D.ieu Roi du monde qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer les lumières du Chabbat et du jour du souvenir. Béni sois-Tu Eternel notre D.ieu Roi du monde qui nous a fait vivre, exister et arriver à cet instant »).

Après la prière du soir, on se souhaite mutuellement : « Lechana Tova Tikatev Veté’hatème » - « Sois inscrit(e) et scellé(e) pour une bonne année ». Après le Kiddouch, on se lave les mains rituellement et on trempe la ‘Halla dans le miel (et ce, jusqu’à Hochaana Rabba, vendredi 9 octobre inclus).

Ensuite on trempe un morceau de pomme douce dans le miel, on dit la bénédiction : « …Boré Péri Haèts » et on ajoute : « Yehi Ratsone Milfané’ha Chete’hadèche Alénou Chana Tova Oumetouka » (« Que ce soit Ta volonté de renouveler pour nous une année bonne et douce »). Durant le repas, on s’efforce de manger de la tête d’un poisson, des carottes sucrées ou du gâteau au miel, une grenade et, en général, des aliments doux, pas trop épicés, comme signes d’une bonne et douce année.

Samedi soir 19 septembre, les femmes, les jeunes filles et les petites filles allument les bougies de la fête (après 20h42, en Ile-de-France) à partir de la flamme allumée avant la fête, en récitant les bénédictions :

1) : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner Chel Yom Hazikarone ».

2) : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé ».

(« Béni sois-Tu Eternel notre D.ieu Roi du monde qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer les lumières du jour du souvenir. Béni sois-Tu Eternel notre D.ieu Roi du monde qui nous a fait vivre, exister et arriver à cet instant »).

On aura auparavant placé sur la table un fruit nouveau, qu’on mangera après le Kiddouch, avant le repas.

Dimanche 20 septembre, on écoute les sonneries du Choffar. Si on n’a pas pu l’entendre à la synagogue, on peut encore l’écouter toute la journée.

Dimanche 20 septembre après-midi, après la prière de Min’ha, on se rend près d’un cours d’eau et on récite la prière de Tachli’h.

Durant les deux jours de Roch Hachana, on évite les paroles inutiles et on s’efforce de lire de nombreux Tehilim (Psaumes).

Il est permis de porter des objets dans la rue le dimanche de Roch Hachana.

Dimanche 20 septembre, la fête se termine à 20h41 (horaire de Paris).

Jusqu’à Yom Kippour inclus, on ajoute dans la prière du matin le Psaume 130 et on récite matin et après-midi (sauf Chabbat) la prière « Avinou Malkénou » (« Notre Père, notre Roi »). On ajoute certains passages de supplication dans la prière de la « Amida ». On multiplie les actes de charité et, en général, on s’efforce d’être davantage scrupuleux dans l’accomplissement des Mitsvot.

Lundi 21 septembre, c’est le jeûne de Guedalia (qui commence, en Ile-de-France, à 5h58 et s’achève à 20h23).

Le Recit de la Semaine

 Qui par le feu, qui par l’eau…

Elle ne mesure que 54 km² mais l’île St Martin dans les Caraïbes est un territoire franco-hollandais qui fait partie de l’Union Européenne – même si son climat tropical lui vaut bien des ennuis. Elle peut convenir à des vacances de rêve comme le prouvent les nombreux hôtels sur place mais peut aussi en quelques heures devenir la proie d’ouragans dévastateurs. Rav Federman est l’émissaire du mouvement Loubavitch sur place et a assisté en 2017 à la tempête Irma.

Le vent s’était mis à souffler à une vitesse extrême de 200 km à l’heure et Rav Federman se souvenait des mots de la prière de Roch Hachana. En effet, une des prières les plus émouvantes est celle attribuée à Rabbi Amnon, au Moyen-âge, qui rappelle qu’en ce jour de Roch Hachana, D.ieu décide « qui vivra et qui… ». Au lieu de prononcer « Mi Yanoua’h, qui vivra dans le calme et qui devra errer », Rav Federman se surprit à chantonner : « Mi Baroua’h, qui sera affligé par le vent et qui devra errer ». Les dégâts furent considérables et il fallut plus d’un an avant de pouvoir reprendre une vie à peu près normale sur l’île. « Chaque fois que je voyais par la suite quelqu’un planter ne fut-ce qu’un clou, je me souvenais que c’est D.ieu qui gère le monde, qui donne à la nature la possibilité de tout détruire et à l’homme celle de construire. D.ieu merci, cet ouragan n’a pas causé de pertes humaines comme aux Bahamas mais il n’empêche : « Qui par l’eau… ». Il est vrai que l’eau est synonyme de vie, que les gens sont prêts à voyager des heures pour venir profiter de nos plages paradisiaques. Mais, de temps en temps, D.ieu vient nous rappeler qu’en un instant l’eau peut provoquer des désastres.

Nous savions que, dans le passé, le toit de notre maison avait été emporté par un ouragan de ce type et, par prudence, nous avons cherché, dès l’annonce de l’imminence de l’ouragan, où déménager. J’ai téléphoné à un ami qui dirige un centre médical dans la ville et lui ai demandé si nous pouvions nous inviter « chez lui ». C’est ainsi que la salle d’attente de ce centre s’est transformée en une « suite » de fortune pour la famille Federman.

Après l’ouragan, quand nous avons réalisé l’étendue du désastre, nous avons compris que nous avions eu une bonne intuition car nous étions restés vivants tandis que notre maison était en ruines ! Mes enfants n’avaient aucune envie de rester sur place car, de toute manière, ils étudiaient « en ligne » avec d’autres enfants de Chlou’him à travers le monde : or plus rien ne fonctionnait, ni internet, ni électricité.

Les gens qui possédaient des navires ou des yachts se rendaient à l’île voisine de Porto-Rico et proposaient leurs services. J’accompagnais donc ma femme et mes enfants jusqu’au port et demandai à mes enfants si je devais voyager avec eux mais l’un d’entre eux s’écria : « Pas question ! Si tu quittes notre île, qui sonnera du Choffar à Roch Hachana pour les Juifs qui restent ? ». Qui peut décrire l’émotion et la fierté d’un père dans ces moments critiques ?

Ce fut un Roch Hachana très spécial, sans ma famille, sans ma maison. Très vite, l’aide gouvernementale arriva et, comme j’étais resté sur place, la population comme les autorités me considérèrent comme une personnalité officielle sur laquelle on peut compter. Je me suis ainsi retrouvé, en tant que rabbin, propulsé responsable de la distribution de l’aide internationale pendant plusieurs mois !

Un de mes amis qui disposait d’un avion privé me rapporta de Floride la nourriture cachère pour les fêtes. Je demandai aussi qu’il me rapporte 50 pommes et 50 grenades pour le repas de Roch Hachana ainsi que 50 portions de miel. Comme il n’y avait pas d’électricité et qu’il était impossible de faire des photocopies, j’ai recopié à la main le Kiddouch et quelques prières pour les distribuer aux familles juives restées sur place. Nous n’avons pas eu de Minyan ce Roch Hachana mais au moins, nous avions à manger.

Après la prière, je me suis rendu dans un camp de soldats américains venus sur place pour veiller à l’ordre et j’ai demandé s’il y avait des Juifs parmi eux : on me répondit qu’on avait entendu des soldats parler de la nouvelle année et on m’accorda la permission d’entrer. Quand un de ces deux soldats m’a aperçu, il n’en crut pas ses yeux et s’est écrié : « D.ieu ne nous a pas oubliés ! ». Bien sûr, j’ai sonné le Choffar pour eux deux et je suis incapable encore maintenant de déterminer lequel de nous trois était le plus ému.

Ma famille était si loin, à près de 2000 km de là, près du Ohel du Rabbi qui nous a envoyés ici et moi, j’étais fidèle à mon poste, fidèle à la mission qu’il m’avait confiée…

Ce n’est qu’un mois plus tard que je pus retrouver ma famille puis rapporter dans l’île un générateur, des vêtements et toutes sortes de produits qui nous manquaient. Oui, qui vivra et qui… Mais surtout qui vivra une vie de Torah, une vie pleine de sens et d’amour du prochain !

Mena’hem Cohen - Kfar Chabad N° 1826

Traduit par Feiga Lubecki