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Samedi, 4 avril 2020

  • Tsav
Editorial

 Vivante liberté !

Grande période que celle qui s’ouvre devant nous ! De fait, voici que le long voyage de la liberté s’engage dès à présent. Nous avons vu naître et s’élancer le mois de Nissan et ses dates premières qui nous ont donné à vivre et à ressentir. Nous avons pris la force naturellement communiquée par la date du 11 Nissan, anniversaire de la naissance du Rabbi, et tout ce qu’elle porte en elle d’accomplissements et de décisions nouvelles, comme une source d’énergie jamais affaiblie. Et, dans ce voyage tant attendu, déjà le point d’où nous sommes partis s’efface à l’horizon. Il ne peut en être autrement : la liberté nous entraîne, rien ne peut nous retenir ou nous faire revenir sur nos pas. Nous parvenons donc peu à peu en haute mer, le grand navire de l’histoire nous porte et nous en sommes à la fois les passagers et les pilotes.

Car c’est bien ainsi que doivent nous apparaître la fête de Pessa’h et tous ses lendemains. La liberté, pour nous, n’est pas terre inconnue. Elle est ambition de chaque jour, conquête de chaque instant. Lorsque nos Sages enseignent « il n’est d’homme libre que celui qui se consacre à la Torah », c’est bien de cette forme ultime de liberté, à la fois individuelle et collective, profonde et extériorisée, qu’ils parlent. Le temps que nous traversons en est le moment majeur. Il est cette parenthèse dans le fil des jours, propice à toutes les prises de conscience et à tous les changements. Nous sortons historiquement, rituellement et spirituellement d’Egypte. C’est dire que le fardeau de la servitude ne limite plus notre conscience. Tout s’ouvre à nouveau devant nous et nous sommes capables de toutes les décisions.

Le mois de Nissan ne nous quittera jamais plus. « En Nissan », disent nos Sages, « ils furent libérés et en Nissan ils seront libérés », signifiant ainsi que la liberté ne fut pas celle d’une époque, elle est nôtre et trouvera sa concrétisation finale par la venue du Messie. Ici et maintenant, elle ne cessera plus de chanter dans notre cœur et notre esprit. Pour toujours vivre dans et par nos actes.

Etincelles de Machiah

 En voyage

Pendant l ‘exil, il est plus facile d’obtenir l’inspiration divine qu’à l’époque du Temple. Quand l’homme pense profondément à l’union avec D.ieu, immédiatement la Présence Divine réside sur lui.

Cette différence s’explique. La situation d’aujourd’hui est comparable à celle du villageois qui n’est pas autorisé à se présenter devant le roi dans son palais mais qui peut aller à lui quand il est en voyage, dans une auberge.

(D’après Kéter Chem Tov par. 312)

Vivre avec la Paracha

 Tsav

D.ieu instruit Moché de commander à Aharon et ses fils leurs devoirs et leurs droits en tant que Cohanim (« prêtres ») qui offrent les Korbanot (sacrifices animaux et alimentaires) dans le Sanctuaire.

Le feu sur l’autel doit brûler constamment. On y incinère entièrement les différents sacrifices animaux et alimentaires.

Les Cohanim consomment la viande de certains sacrifices animaux et ce qui reste de l’offrande alimentaire. L’offrande de paix est mangée par celui qui l’a apportée, à l’exception de parties spécifiques, données au Cohen. La viande sainte des offrandes doit être consommée par des personnes en état de pureté rituelle, dans l’endroit saint qui leur a été désigné et à un moment spécifique.

Aharon et ses fils restent dans l’antre du Sanctuaire pendant sept jours, au cours desquels Moché les initie à la prêtrise.

Chabbat Hagadol

Chabbat Hagadol, « le Grand Chabbat », est le Chabbat qui précède Pessa’h et qui célèbre le miracle qui tint au fait que les premiers-nés égyptiens combattirent leurs propres frères pour qu’ils libèrent les Juifs d’Égypte.

Chabbat en lui-même, constituant l’un des jours de la semaine, fait partie du cycle naturel. Le « Grand Chabbat » représente ainsi l’idée de grandeur introduite dans la nature, d’un miracle à l’intérieur de la nature et non d’un miracle qui la transcende. Et il faut savoir qu’un miracle dans la nature est supérieur à celui qui en dépasse les limites car, d’ordinaire, un miracle est par définition au-dessus des confins de la nature. Mais lorsqu’un miracle se produit au sein du monde naturel et reste un miracle, c’est un aspect innovant et très profond.

C’est le service des Juifs qui permet d’atteindre cette dimension.

Chabbat, contrairement aux fêtes, est « sanctifié par lui-même » et ne dépend pas de nos actions. Cependant, Chabbat Hagadol s’accomplit par les efforts des Juifs car la Rédemption d’Égypte se produisit grâce aux supplications qu’adressèrent les Juifs à D.ieu. De la même façon, le miracle des Égyptiens se battant entre eux n’arriva que lorsque les Juifs offrirent le sacrifice pascal, le 10 du mois.

Les leçons dans le service Divin

Un Juif pourrait penser que, pour accomplir son service à l’égard de D.ieu, il doit au préalable se retirer de toutes les considérations matérialistes et se mettre « au-dessus de la nature ». Chabbat Hagadol nous enseigne que certes, le Juif transcende la nature mais que le but ultime est de s’adonner à la pratique de la Torah et des Mitsvot, comme elles se réalisent : dans ce monde matériel et physique.

Nos Sages ont déclaré : « la Torah n’est pas au ciel » mais a été donnée sur terre. C’est pour cela que les Mitsvot s’accomplissent avec des objets matériels, pour faire descendre la Divinité dans le monde.

« Modé Ani Lefané’ha »

Ce qui précède est mis en lumière par cette prière que chaque Juif récite dès qu’il se réveille : « Modé Ani Lefané’ha… »*, « Je T’offre des remerciements, à Toi, Roi vivant et éternel… »

Rabbi Chnéor Zalman écrit : « immédiatement à son réveil… une personne doit être consciente de la présence devant laquelle elle se trouve. Elle doit faire attention au fait que le Suprême Roi des rois, le Saint béni soit-Il, plane au-dessus d’elle… L’un des principes importants de la Torah… est que « Je place l’Éternel devant moi, à tout moment ». Car le comportement et la conduite de l’individu, quand il est seul chez lui, ne sont pas les mêmes que ceux qu’il adopterait en présence d’un grand roi… Quand donc il considère que le Suprême Roi des rois, le Saint béni soit-Il se tient devant lui et observe ses actions, il sera rempli d’un sentiment de respect et d’humilité et ressentira toujours un sentiment de modestie devant D.ieu. »

Dès qu’il se réveille, avant même de se laver les mains, le Juif doit savoir que D.ieu est avec lui et il doit manifester le respect et l’humilité appropriés.

Telle est l’idée précédemment expliquée : un Juif ne doit pas attendre d’atteindre des moments d’élévation spirituelle pour s’engager dans la Torah et les Mitsvot, mais dès son réveil, il se doit de réfléchir au fait que le Présence Divine est présente et le contemple.

Cela va encore plus loin : la relation entre le Juif et D.ieu, à ce moment-là, se fait avec l’Essence-même de D.ieu, transcendant Ses noms (que l’on ne prononce pas avant de se laver les mains et qui ne figure pas dans le « Modé Ani »). Cela correspond à ce qui a été expliqué, c’est-à-dire que la grandeur de D.ieu est spécifiquement liée à la nature, car le statut du Juif, avant qu’il ne se lave les mains est semblable au monde comparé à un service transcendant le monde.

En outre, le sommeil lui-même reflète l’idée de la nature et donc, lorsque quelqu’un prononce « Modé Ani » dès qu’il se réveille, cela met l’accent sur le concept d’un service spécifiquement effectué dans le cadre du monde naturel. Le sommeil est d’une nécessité absolue. Personne ne peut se passer de dormir.

Le Talmud statue que celui qui fait le serment : « je ne dormirai pas pendant trois jours » reçoit des tapes et après, il doit aller immédiatement dormir. » Car, étant donné que, par nature, le sommeil est impératif, il est impossible qu’une personne s’en abstienne pendant trois jours. Aussi un tel serment est considéré comme un serment en vain.

Le sommeil représente donc, de façon très probante, l’idée de la nature.

Ainsi, quand une personne prononce le « Modé Ani » à son réveil et réfléchit au fait que D.ieu Se trouve devant elle, s’exprime l’idée de ce service, dans la nature (et non celui qui la transcende et implique qu’il faille atteindre un niveau supérieur).

Que par nos actions et notre service à l’image de ce qui précède nous permettent de mériter une rédemption véritable et complète par notre juste Machi’ah, rapidement, de nos jours.

*Modé ani lefané’ha mélè’h ‘haï vékayame chéhé’hézarta bi nichmati be’hèmla, raba émounaté’ha

Le Coin de la Halacha

 Quelles sont les Mitsvot essentielles du Séder ?

Le mercredi 8 et le jeudi 9 avril 2020, on organise le repas du Séder pour célébrer la sortie d’Egypte. On ne pourra commencer qu’après la nuit tombée (21h20 mercredi et jeudi soir - heure pour l’Ile-de-France). Tous les Juifs doivent participer au Séder, hommes, femmes et enfants. Il faut :

Raconter la sortie d’Egypte

On le fait en lisant la Haggadah.

Manger de la Matsa

On mange de la Matsa les deux soirs du Séder après avoir dit la bénédiction : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Al A’hilat Matsa », en plus de la bénédiction habituelle « Hamotsi ». La Matsa du Séder sera « Chemourah ». Nombreux sont ceux qui préfèrent consommer les Matsot rondes cuites à la main (et non à la machine). Il faut manger au moins 30 grammes de Matsa, et il est préférable de les manger en moins de quatre minutes.

Manger des herbes amères (Maror)

On mange des herbes amères en souvenir de l’amertume de l’esclavage en Egypte. On prépare pour chacun des convives au moins 19 grammes de « Maror », c’est-à-dire de salade romaine avec un peu de raifort râpé, trempé dans le « Harosset » après avoir prononcé la bénédiction : « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Al A’hilat Maror ». On consomme encore 19 grammes de Maror bien séché entouré de Matsa pour le « Sandwich de Kore’h ».

Boire 4 verres de vin

On doit boire au cours du Séder au moins quatre verres de vin ou de jus de raisin cachère pour Pessa’h. Le verre doit contenir au moins 8,6 centilitres, et on doit en boire à chaque fois au moins la majorité, en une fois, en étant accoudé.

Le Recit de la Semaine

 Sauvée !

C’était un jour particulièrement chargé dans ma clinique privée. On était au début des années 80, les malades se succédaient dans mon bureau : j’écoutais leurs doléances (je suis spécialiste du système digestif), je les examinais et prescrivais toutes sortes de remèdes.

Soudain, j’aperçus dans la salle d’attente une silhouette connue : Rav Na’hman Bernhard, rabbin de la communauté Oxford de Johannesburg. Il demanda à être reçu immédiatement et, le connaissant, je compris qu’il ne s’agissait pas du caprice d’une personnalité aussi religieuse soit-elle mais bien d’un problème urgent.

Il entra, en tenant un épais dossier médical :

- Il s’agit d’une dame de ma communauté ; d’après les radios, elle devrait subir une opération de toute urgence. Mais, suivant sa requête, j’ai demandé conseil au Rabbi de Loubavitch en sa faveur et le Rabbi a répondu qu’il ne fallait pas opérer !

- Alors que voulez-vous de moi ? demandai-je surpris.

- J’aurais voulu que vous jetiez un coup d’œil sur les radios et me donniez votre opinion.

A l’époque, les moyens d’investigation n’étaient pas aussi sophistiqués qu’à présent et on était obligé de baser les diagnostics sur la foi des rayons X. Ceux-ci étaient réalisés après injection d’un liquide destiné à repérer les zones atteintes.

Un simple regard sur les clichés suffisait : la tumeur avait atteint la région supérieure du rein droit et je ne pouvais qu’infirmer le diagnostic de mes confrères.

- Je sais, j’ai compris, continua Rav Bernhard, mais le Rabbi insiste qu’il ne faut pas opérer !

Je regardai plus attentivement les clichés mais il n’y avait aucun doute :

- Vous êtes rabbin, remarquai-je aussi courtoisement que possible. Vous n’êtes pas docteur et encore moins spécialiste ! Vous n’avez pas le droit de vous interposer dans une affaire aussi grave ! La patiente doit être opérée immédiatement !

Rav Bernhard hocha la tête avec détermination :

- Il existe surement une bonne raison au refus du Rabbi…

Je dois avouer qu’à ce stade, je faillis perdre patience. La salle d’attente était bondée de personnes qui avaient pris rendez-vous depuis des semaines et ce rabbin outrepassait ses prérogatives - en contestant de plus un diagnostic évident !

Et pourtant, par respect pour sa personnalité et ce qu’il incarnait, je regardai d’encore plus près la radio. Cette fois, je regardai aussi le nom du patient inscrit au bas de la radio : Mme Fendamova. Ce n’était à l’évidence pas un nom juif.

- Depuis quand vous occupez-vous de non-Juifs dans votre communauté ? m’étonnai-je.

- Pas du tout ! protesta Rav Bernhard.

- Mme Fendamova est juive ?

- De qui parlez-vous ? La patiente dont je vous parle s’appelle Mme Levine !

- Et pourtant ! Regardez le nom inscrit au bas de la radio ! Tout s’explique !

Le jour-même, je téléphonai au radiologue qui avait effectué les examens. Il s’avéra effectivement qu’il avait malencontreusement échangé les dossiers des deux patientes ! J’étais hors de moi !

- Vous rendez-vous compte de l’erreur que vous auriez causée si le Rabbi de Loubavitch n’était pas intervenu depuis New York ? Grâce à lui, trois malheurs ont été évités ! Mme Levine a évité une opération inutile, avec les complications éventuelles d’une anesthésie dans son grand âge, Mme Fendamova aura la vie sauve grâce à une opération urgente et vous, vous échappez à un procès pour erreur médicale gravissime !

Mme Levine ne fut donc pas opérée - comme le Rabbi l’avait conseillé. Son infection fut rapidement soignée avec des médicaments.

A des milliers de kilomètres de distance et sans aucun diplôme médical, le Rabbi avait compris ce que des spécialistes chevronnés n’avaient pas pu distinguer. Cet épisode m’a beaucoup appris sur les dangers de l’orgueil médical qui peut mener à des abymes !

Mais ma curiosité ne s’est pas arrêtée là et, depuis, j’ai beaucoup appris à apprécier les enseignements du Rabbi dans tous les domaines de la vie !

Dr Harold Serebro

JEM – Si’hat Hachavoua N° 1684

Traduit par Feiga Lubecki