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Samedi, 9 février 2019

  • Téroumah
Editorial

 A l’entrée de la joie majeure !

Les noms des mois défilent et chacun d’eux est comme un étendard claquant au grand vent du temps qui passe. Chacun d’eux est précieux et chacun laisse son empreinte sur l’âme et le cœur de chacun. Dans cette grande et noble parade, apparaissent ainsi des instants plus solennels, d’autres plus majestueux et d’autres encore qui nous entraînent dans un tourbillon de victoire. Nous y voici : le mois d’Adar a commencé. Se contenter de dire qu’il est le mois de la joie est sans doute en réduire la portée car ce serait comme lui coller une étiquette, toute précieuse qu’elle soit, parmi bien d’autres. Adar est en fait le mois de la joie majeure, celle qui transforme ce qu’elle touche, pénètre chacun et le transporte. Si tous les jours connaissent la joie, si tous les mois l’affirment à leur manière, Adar lui donne expression éclatante. Il est le temps où on la vit en chacun de ses instants.

Cette année présente évidemment une particularité. Adar est dédoublé et, plus précisément, nous entrons à présent dans le mois d’Adar I. Du reste, pour cette raison, la fête de Pourim n’interviendra que dans un mois et demi environ, en Adar II. Certes, la joie infinie dont il est question ici a pour origine cette fête. Or, voici qu’elle arrive durant le deuxième Adar et non au cours de celui-ci. Cela est-il de nature à diminuer l’allégresse qui monte ? Justement, il n’y a pas ici de manque inattendu ou de réduction de l’espoir. En fait, le calendrier s’est chargé d’étendre cette plage de bonheur. Si, en année simple, la joie n’explose que pendant quatre semaines, cette fois, c’est pendant huit semaines qu’elle élèvera toutes les âmes.

L’idée est essentielle. Dans un monde parfois anxiogène, en tous cas trop souvent terne, la couleur de la vie est un élément irremplaçable. Une vieille image guerrière est toujours tapie au fond des mémoires : celle d’une armée qui part au combat tandis que les soldats qui la composent ont sur les lèvres un chant entraînant. Dans un moment grave comme celui-ci, est-ce la place du chant et de la joie ? C’est que celle-ci est déjà porteuse d’une promesse de victoire. Nous sommes les bien pacifiques soldats d’une armée essentielle, dont les seules et invincibles armes sont la conscience, la connaissance et la fidélité. Peu importent les obstacles, l’enthousiasme emportera tout sur son passage. Décidément, laissons Adar claquer au vent !

Etincelles de Machiah

 La lumière et son réceptacle

L’enseignement du Baal Chem Tov, la sagesse Divine qu’il nous révéla et dont il nous fit hériter, est lié à la venue du Machia’h.

Machia’h est une « lumière essentielle ». L’enseignement du Baal Chem Tov, la ‘hassidout, est le réceptacle de cette grande lumière.

(D’après Likoutei Dibourim vol. 2 p. 572)

Vivre avec la Paracha

 Teroumah

Il est rappelé au Bné Israël les treize matériaux qu’ils doivent apporter en contribution : de l’or, de l’argent et du cuivre ; de la laine teinte en rouge, bleu, violet ; du lin, des poils de chèvre, des peaux animales, du bois, de l’huile d’olive, des épices et des pierres précieuses, à partir desquels, dit D.ieu à Moché, « ils Me feront un Sanctuaire et Je résiderai parmi eux ».

Moché reçoit, au sommet du Mont Sinaï, les instructions détaillées sur la façon de construire cette résidence pour D.ieu, de manière à ce qu’elle puisse être immédiatement démontée, transportée et réassemblée, au cours du voyage du peuple dans le désert.

Dans la chambre la plus intérieure du Sanctuaire, derrière un rideau tissé avec art, se trouvait l’Arche contenant les Tables de la Loi, gravées des Dix Commandements. Sur le couvercle de l’Arche, se tenaient deux anges enlacés, en or pur. Dans la chambre extérieure, s’élevait la Menorah à sept branches et était dressée la table sur laquelle étaient disposés « les pains de proposition ».

Les trois murs du Sanctuaire étaient fixés à partir de quarante-huit planches de bois. Chacune d’elles était plaquée d’or et soutenue par une paire de socles en argent. Le toit était constitué de trois couvertures : a) des tapisseries de lin et de laine multicolores, b) une couverture de poils de chèvre, c) une couverture de peaux de taureau et de Ta’hach. Devant le Sanctuaire était tendu un écran brodé, tenu par cinq piliers.

Autour du Sanctuaire et de l’autel de cuivre, placé devant, des rideaux de lin pendaient, soutenus par soixante piliers de bois, avec des crochets et des garnitures en argent, renforcés par des piquets en cuivre.

Du bois et de la terre

Qu’est-ce qui est plus grand : étudier ou agir ? Le Talmud évoque un débat entre les Sages sur cette question. Et la conclusion à laquelle ils arrivent est qu’ « étudier est plus grand car l’étude conduit à l’action. »

L’étude consiste à développer et perfectionner la personne alors que l’action signifie soumettre l’être à l’action en cours. Cette question exprime donc l’une des questions essentielles de la vie : à quoi l’homme doit-il aspirer : à s’améliorer lui-même ou à s’investir dans un idéal supérieur, servir son Créateur ?

Il est caractéristique que le Talmud ne réponde pas à cette problématique en prenant position pour l’une des deux approches mais signifie que les deux sont justes.

L’amélioration personnelle est l’aspect le plus « grand », le plus « dominant » dans notre vie. Nous y consacrons la majeure partie de notre temps, de nos occupations, de nos aptitudes. Mais ce n’est pas une fin en soi. Le but de cet effort est d’améliorer et de mieux servir le but de notre création.

Autrement dit, il y a deux phases dans notre existence. La première commence à notre naissance et se poursuit au cours de nos années de formation. Nous savons que le but en est de se dépasser et de se consacrer à aspirer à quelque chose de plus grand. Et cette connaissance soutient notre vie tout comme de solides fondations soutiennent un édifice. Toutefois, c’est la réalisation de l’édifice lui-même qui constitue l’aspect visible et dominant de notre existence. En fin de compte pourtant, nous atteignons un stade où « l’action » devient le trait prédominant de notre vie et où « l’étude » ne sert que de support et d’aide pour accomplir ce dessein.

La maison modèle

Deux structures, la première construite essentiellement à partir de bois et la seconde essentiellement en pierre, représentent ces deux phases de notre mission dans la vie.

Peu de temps après le Don de la Torah au Mont Sinaï, D.ieu ordonna à Moché : « Ils Me feront un Sanctuaire et Je résiderai parmi eux ». Selon les enseignements de la ‘Hassidout, ces mots expriment le but divin de la Création : D.ieu « désirait une demeure pour Lui dans le royaume d’ici-bas », c’est-à-dire au cœur même de l’existence matérielle.

L’on y parvient, au niveau individuel, par l’accomplissement des Mitsvot de la Torah, pour servir D.ieu au moyen de divers éléments du monde physique. L’on donne de l’argent à la Tsédaka, l’on utilise du grain de blé pour fabriquer les Matsot de Pessa’h, de la peau d’animal pour les Tefiline, de la laine pour les Tsitsit, etc.

Mais cela va encore plus loin : quand une personne consacre sa vie à observer les Mitsvot, tout ce qui soutient cette vie : la nourriture qu’elle consomme, les habits qu’elle porte, l’énergie qu’elle utilise, tout est impliqué dans la réalisation de ce but suprême.

C’est ainsi que le monde matériel d’ici-bas est transformé en une résidence pour D.ieu, en un environnement qui sert la Volonté divine et exprime Sa réalité omniprésente.

Au niveau de la communauté, le Peuple d’Israël construisit une « maison pour D.ieu » sous la forme d’un Sanctuaire. Sous l’injonction divine, différents matériaux furent utilisés pour construire ce qui serait le siège de Sa présence manifeste dans le monde matériel. Bien que D.ieu soit partout, c’est le lieu qu’Il choisit pour imprégner, de manière visible, la matérialité. C’était une « résidence » qui représentait la fonction ultime de chaque élément physique.

Le Tabernacle et le Temple

De même qu’il existe deux phases dans le labeur de la vie de l’homme, ainsi en va-t-il pour l’expression collective de la mission de l’humanité : le Sanctuaire.

Tout d’abord, fut érigé le Tabernacle, le Michkane, Sanctuaire portatif que le peuple transporta tout au long de son périple de quarante ans dans le désert. Puis, une fois qu’ils furent établis en Terre Sainte, ils procédèrent à la construction du saint Temple, le Beth Hamikdach, de Jérusalem.

C’est dans la construction qu’apparaît la différence. Le Tabernacle avait un sol de terre sur lequel étaient plantés « les socles de fondation », faits en argent. Ils supportaient les panneaux des murs faits de bois de cèdre. Le toit consistait en trois couches de couvertures : des tapisseries de laine et de poils de chèvre et une couverture de peau animale.

Par ailleurs, le Temple était entièrement fait de terre et de pierre, depuis le sol en marbre, les murs en pierre, jusqu’au toit en mortier. Il comportait du bois, sous forme de piliers porteurs mais ils étaient implantés dans de la pierre et du ciment. De fait, il était interdit que la plus petite partie de ces piliers n’apparaisse à l’extérieur et soit visible.

Ainsi, le Tabernacle possédait-il à la fois des minéraux sans vie (de la terre, du métal, etc.) et des produits de la vie animale et végétale. En fait, les couches de ces matériaux reflétaient leur hiérarchie dans l’univers. Au-dessous, se trouvaient les éléments issus du monde minéral. Au-dessus, se tenaient les murs de la structure, provenant du règne végétal. Et sur le dessus les couvertures venant du règne animal.

A l’opposé, le Temple n’était construit que de matériaux qui provenaient presque tous d’origine inanimée. Le bois y était secondaire et ne servait que de support, complètement recouvert de pierre.

Dans le microsome, cela représente l’être humain, l’élément inanimé de notre aptitude au sacrifice de soi, à la dévotion, au service et à l’action.

L’élément végétal et l’élément animal correspondent au pouvoir de grandir et de se développer, à notre vie émotionnelle et intellectuelle.

Dans le Tabernacle, qui représente les étapes initiales de notre mission dans la vie, tous ces éléments sont mis en évidence. L’accent est mis sur nos facultés « supérieures » intellectuelles et émotionnelles. Il est vrai que tout repose sur le fondement de la soumission à la volonté divine mais l’édifice construit sur ces bases est le développement et la réalisation du potentiel humain.

Mais en dernier ressort, nous nous développons pour exprimer visiblement l’intention ultime de servir notre Créateur. Le Temple contient également des éléments qui se développent mais ils sont couverts par ce qui représente l’abnégation. Ils ne servent que de moyens pour mieux accomplir la Volonté divine. Dans l’ensemble de l’édifice, nous ne voyons que la « pierre » et « la terre » de l’action.

Le Coin de la Halacha

 Comment donner aux pauvres ? (suite)

Même si on n’a pas grand-chose, on ne doit pas laisser le pauvre sans rien. On s’efforcera de lui donner au moins une petite somme ou un aliment.

Quand on donne la Tsedaka, on s’efforce de donner le meilleur : « Celui qui désire se rajouter des mérites, forcera son mauvais penchant et ouvrira largement sa main. Tout ce qu’il donne pour la Mitsva, que ce soit le meilleur et le plus beau : s’il construit une synagogue, qu’elle soit plus belle que sa propre maison ; s’il accueille des invités, qu’il leur donne la meilleure portion… » (Choul’hane Arou’h Yoré Déa 248 : 8).

Même si on donne sans intention, on a accompli la Mitsva : ainsi, si on a égaré de l’argent et qu’un pauvre l’a trouvé, on aura le mérite d’avoir donné la Tsedaka.

Il vaut mieux donner une somme correcte à un seul pauvre plutôt qu’un petit peu à plusieurs qui n’auront ainsi pas de quoi être satisfait.

On donnera en priorité :

- A ses proches parents

- Aux pauvres de sa ville ; aux pauvres de Terre Sainte plutôt qu’aux pauvres de l’étranger

- Aux érudits plutôt qu’aux ignorants

- A ceux qui n’ont pas de quoi manger plutôt qu’à ceux qui n’ont pas de quoi se vêtir correctement

- A une femme plutôt qu’à un homme, à une fiancée orpheline plutôt qu’à un fiancé orphelin.

(d’après Hamivtsaïm Kehil’hatam - Rav Shmuel Bistritzky)

Le Recit de la Semaine

 Le bon prénom

« L’opération de la vésicule biliaire a réussi ! » annonça triomphalement le chirurgien à Mme Golda Wolff, qui attendait avec angoisse dans la salle attenante au bloc opératoire.

Elle leva les yeux de son livre de Tehilim (Psaumes) et poussa un soupir de soulagement.

On était en 1949. Quelques jours plus tard, le patient put rentrer chez lui en Floride. Mais la convalescence ne se passa pas facilement et les douleurs reprirent de plus belle. Au point que Yossef Wolff ne pouvait plus ni s’asseoir ni se coucher tant la cicatrice avait enflé. A l’hôpital, on constata une grosse infection qu’on tenta de soigner avec des médicaments très puissants mais la situation ne faisait qu’empirer : les médecins durent annoncer à Mme Wolff que son mari n’avait plus que quelques heures à vivre !

Les membres de la famille ne comprenaient pas : comment une opération qui avait réussi avait-elle pu dégénérer ainsi ?

Le gendre de M. Wolff, Yehouda Leib Schleifer téléphona au secrétariat de Rabbi Yossef Its’hak (le précédent Rabbi de Loubavitch) à Brooklyn. D’une voix brisée, il sollicita une bénédiction pour son beau-père. A sa grande joie, le Rabbi lui fit transmettre qu’il guérirait complètement mais il y mettait une condition : il fallait rajouter au malade le prénom Zelig et l’appeler dorénavant Yossef Zelig. Bien entendu, la famille accepta et, dès la lecture suivante de la Torah à la synagogue, on pria pour la guérison immédiate et complète de Yossef Zelig.

L’amélioration fut spectaculaire : la fièvre descendit et le malade fut de nouveau en mesure de communiquer avec ses proches. Le lendemain il s’assit sans effort puis marcha. Trois jours plus tard il put rentrer chez lui… Les médecins étaient abasourdis devant ce véritable miracle médical.

Yossef Zelig reprit très rapidement ses activités : au bout d’un mois, il prit rendez-vous chez l’un de ses anciens docteurs qui l’avait encouragé quand il était si faible mais qui, depuis, avait quitté la Floride.

Quand le médecin apprit par sa secrétaire qu’un certain Yossef Wolff comptait dans la liste de ses patients du jour, il remarqua : « Ce nom me rappelle un ancien patient qui n’est sûrement plus en vie vu la gravité de sa maladie d’alors… » Quelle ne fut pas sa surprise quand Yossef Zelig entra en souriant dans son bureau ! « C’est un miracle ! » bredouilla-t-il !

Le temps passa et Yossef Zelig avait presqu’oublié cet épisode tragique de sa vie.

Un jour, il se rendit à l’enterrement d’un proche parent et cela lui rappela bien sûr combien il devait être reconnaissant envers le Maître du monde qui l’avait épargné quand il était si malade.

Après la lecture des prières et du Kaddich à la mémoire du défunt, l’assemblée se dispersa tandis que Yossef Zelig restait perdu dans ses pensées. Puis il se souvint que sa grand-mère, Sassia, était justement enterrée non loin de là et que ce serait une bonne chose que de se recueillir près de sa tombe : elle avait toujours eu pour lui une affection spéciale car il portait le nom du défunt père de Sassia, Yossef.

Il marcha rapidement entre les rangées de tombes puis arriva devant celle de sa chère grand-mère. Machinalement, il déchiffra les lettres gravées et encore bien visibles de la pierre tombale et eut un choc : comment se faisait-il qu’il n’avait jamais remarqué cela ? Il relisait les mots encore et encore pour s’assurer que son imagination ne lui jouait pas des tours. Il respira profondément : sur la pierre étaient inscrits les mots : « Ici repose Sassia fille de Yossef Zelig ! »

Ainsi donc, bien que ses parents aient voulu lui attribuer le prénom de son arrière-grand-père, ils avaient oublié le prénom complet et ne lui avaient donné que la moitié de ce nom !

Bénéficiant certainement d’une inspiration Divine, le Rabbi (précédent) avait su remplir le manque : les lettres gravées sur le granit funéraire ne laissaient aucun doute !

Maintenant il comprenait pourquoi le Rabbi lui avait demandé de rajouter ce prénom plutôt que Raphaël ou ‘Haïm qu’on donne habituellement dans ces cas-là…

Mme Golda Wolff, qui raconta par la suite cette histoire, précisa que jamais auparavant son mari n’avait écrit au Rabbi précédent ! Et certainement pas son arrière-grand-père !

« Le Rabbi avait ses propres moyens de connaître tous les détails de ce qu’il fallait savoir ! » remarquait-elle pensivement…

Sichat Hachavoua

Traduit par Feiga Lubecki