Le 2 Nissan est la date de la Histalkout (du départ de ce monde) de Rabbi Chalom Dov Ber Schneersohn, cinquième Rabbi de Loubavitch, en 1920 à Rostov sur le Don.

Ce n’est que dix ans après la mort de son père (le Rabbi Maharach, Rabbi Chmouel de Loubavitch) que Rabbi Chalom Dov Ber accepta officiellement de prendre sa succession. Dès que la nouvelle fut connue, les ‘Hassidim se rendirent en nombre vers le village de Loubavitch.
Parmi eux se trouvait un enseignant, Reb ‘Haïm, du village de Ollola. Son voyage fut long et pénible: il s’arrêta pour passer Chabbat à Vitebsk, dans la maison d’un de ses collègues. Celui-ci lui demanda pourquoi il se rendait à Loubavitch.
“Pour moi, Rabbi Chalom Dov Ber a toujours été Rabbi. Quand je l’ai connu, il avait trois ans (!) et déjà il agissait et parlait comme un ‘Hassid” répondit Reb ‘Haïm.
“Comment cela ?”
“Cela fait donc près de trente ans. Le grand-père de Rabbi Chalom Dov Ber était encore Rabbi. On l’appelait le Tséma’h Tsédek, d’après le titre qu’il avait donné à son recueil de réponses rabbiniques. Je m’étais rendu à Loubavitch avec un de mes amis et, à l’issue du Chabbat, nous attendions devant la porte du bureau du Rabbi pour être reçus en audience privée.
A ce moment-là, le Tséma’h Tsédek parlait avec son fils, Rabbi Chmouel. Nous entendions leurs voix, mais ne pouvions distinguer leurs paroles. Le couloir où nous nous trouvions était assez sombre, éclairé faiblement par le feu dans une cheminée.
Soudain nous avons aperçu deux des petits-fils du Rabbi qui jouaient ensemble mais eux ne pouvaient pas nous voir. Le plus jeune était celui qui est maintenant Rabbi Chalom Dov Ber et il avait à peu près trois ans. Son frère, Zalman Aaron, avait cinq ans.
“Viens ! Nous allons jouer au Rabbi et au ‘Hassid !” 
Comme Zalman Aaron était le plus âgé, il fut naturellement choisi pour jouer le rôle du Rabbi. Il s’assit sur une chaise. Le frère plus jeune, qui figurait le ‘Hassid, se tint respectueusement à distance: il lissa ses “Péot” (papillotes), mit un chapeau, arrangea les boutons de sa veste et s’avança à pas mesurés vers “le Rabbi”, tout en baissant humblement la tête.
“Rabbi, dites-moi comment faire Techouva, comment revenir à D.ieu !”
“Etudie en profondeur les livres de “Tanya” et “Réchit ‘Ho’hma !” répondit le Rabbi”.
Le “‘Hassid” s’éloigna à reculons, le visage empreint d’une crainte respectueuse.
En observant cela, mon ami et moi-même avons conclu que nous avions appris deux points importants: comment s’approcher du Rabbi et comment en prendre congé.
Le jeu continua et nous regardions de loin. A nouveau le “‘Hassid” arrangea ses vêtements et s’approcha du “Rabbi”, avec le même respect.
“Rabbi, qu’est-ce que D.ieu ?”
“D.ieu est du feu !” trancha le “Rabbi”.
Le “‘Hassid” écouta attentivement et s’éloigna à nouveau, toujours à reculons. Puis le ‘Hassid s’approcha une troisième fois :
“Rabbi, où se trouve D.ieu ?”
“D.ieu se trouve dans le ciel, sur terre et dans les quatre directions du monde; aussi en moi et en toi !” répondit le “Rabbi” avec assurance.
Le jeu s’arrêta là et les enfants se remirent à courir comme le font tous les enfants. Ils couraient en rond le long du mur. Quand ils arrivèrent à notre hauteur, j’arrêtai le “‘Hassid”, donc notre Rabbi, et je lui demandai:
“Dis-moi, je t’en prie, que t’a répondu exactement ton “Rabbi” quand tu lui as demandé qu’est-ce que D.ieu ?”
“Mon Rabbi m’a dit que D.ieu est du feu !” dit l’enfant qui m’échappa pour courir à nouveau.
Quand il courut encore une fois devant moi, je l’attrapai et lui demandai: “Ne t’enfuis pas ainsi. Que t’a répondu ton “Rabbi” quand tu lui as demandé où est D.ieu ?”
L’enfant me regarda très sérieusement et dit: “Mon “Rabbi” m’a dit que D.ieu est dans le ciel, sur terre, dans les quatre directions du monde et en moi et en toi”. Puis il ajouta : “Et aussi en vous !”
Le fait qu’il ait rajouté ces derniers mots éveilla notre curiosité. L’enfant voulut s’enfuir à nouveau, mais je le retins et lui demandai: “Si D.ieu est feu et qu’Il se trouve en moi et en toi, pourquoi quand je te touche n’es-tu pas brûlé ? Alors que si tu mets ta main dans le feu, tu seras brûlé !”
Sans avoir besoin de réfléchir à deux fois, l’enfant me répondit: “ Ah, ah ! Comment pouvez-vous faire une telle comparaison ? Le feu de la cheminée n’est pas le même feu qui se trouve en vous et c’est pourquoi il peut vous brûler. Mais le feu de D.ieu, qui se trouve aussi bien en moi qu’en vous, est le même feu et le feu n’est pas brûlé par le feu ! ”
A ce moment Rabbi Chmouel sortit du bureau de Tséma’h Tsédek et mon ami puis moi-même avons été reçus séparément en audience privée.
Mais la conduite remarquable de ce petit “‘Hassid” ainsi que ses paroles sont restées gravées en mon cœur jusqu’à ce jour. Si Rabbi Chalom Dov Ber se conduisait ainsi à l’âge de trois ans, il n’y a pas de quoi t’étonner que je me rende aujourd’hui à Loubavitch pour l’accepter comme mon Rabbi !

Traduit par Feiga Lubecki