C’est dans cette Paracha que se lit le verset : «Que te demande D.ieu, ton seigneur ? Seulement de craindre D.ieu… d’aller dans Sa voie et de L’aimer». Nos Sages interprètent cette citation, non littéralement, relevant que le mot hébreu pour «quoi» : mah ressemble au mot méah qui signifie «cent». Dans cette acception, le verset signifie que D.ieu désire «cent» du Peuple juif. «Cent» quoi ? Cent bénédictions. Là est la source de l’injonction selon laquelle chacun doit réciter chaque jour cent bénédictions.

Apparemment, le sens simple du verset et l’interprétation qu’en donnent nos Sages sont contradictoires. Le verset nous dit d’entretenir une relation d’amour avec D.ieu, de Le craindre et de chercher à imiter Sa voie, alors que nos Sages parlent de l’obligation rituelle de réciter des bénédictions et de s’assurer de réciter cent bénédictions chaque jour.

Mais si l’on observe le texte plus profondément, l’on peut apprécier qu’à travers leur interprétation, nos Sages n’invalident pas le sens simple du verset. Ils nous donnent le moyen d’intérioriser et d’appliquer dans notre quotidien l’injonction du verset.

Craindre D.ieu, L’aimer et suivre Sa voie sont de nobles vertus. Comment en faire des facteurs concrets de notre vie quotidienne et pas seulement des idéaux auxquels aspirer ? En récitant cent bénédictions par jour.

Cela mérite une explication. Nos Sages statuent : «Il est interdit de profiter de ce monde sans réciter une bénédiction». Et Maïmonide écrit : «Nos Sages ont institué de nombreuses bénédictions comme expressions de louanges et de remerciements à D.ieu et comme moyen de Lui adresser des demandes, pour que nous nous rappelions toujours le Créateur… et que nous Le craignions».

Quand une personne récite une bénédiction avant de manger, elle fait, ou du moins elle a l’occasion de faire, une reconnaissance essentielle de la présence de D.ieu dans sa vie. Ordinairement, l’on mange sans penser à la façon dont la nourriture est parvenue jusqu’à nous ou pourquoi elle est là. C’est un acte très simple, presqu’animal. Nous mangeons parce que nous avons faim, sans penser à autre chose.

Nos Sages nous enjoignent d’agir différemment, de prendre un instant avant de manger pour penser et contempler la dynamique spirituelle qui entre en jeu lorsque nous consommons de la nourriture. Pour citer un verset que nous lisons cette semaine : «l’homme ne vit pas par le pain seul mais par tout ce qui sort de la Bouche de D.ieu». Ce verset explique que si notre nourriture existe, c’est parce que D.ieu a investi Son énergie par le moyen de la parole. Tout comme au commencement de la Création, D.ieu a parlé et a créé le monde, à chaque moment permet-Il au monde d’exister par Sa parole.

Quand quelqu’un mange, il tire sa vitalité, non seulement de l’aliment mais de l’étincelle divine de Sa parole investie dans la nourriture. En récitant une bénédiction sur cet aliment, en louant D.ieu : chéhakol nihya bidvaro, «que tout a été créé par Sa parole», il prend note de ce processus.

De la même façon, quand on voit un éclair ou que l’on entend le tonnerre, l’on récite une bénédiction exprimant le fait que ce qui apparaît comme faisant partie de l’ordre naturel est en réalité une expression de la Divinité. Et dans nos prières, en demandant à D.ieu de subvenir à nos besoins, nous reconnaissons que notre succès n’est pas le résultat unique de nos propres entreprises mais que nous dépendons des bénédictions divines.

De la même façon, toutes les bénédictions que nous récitons ont pour but de nous faire prendre conscience de la participation divine dans notre vie et d’ainsi faire naître notre amour pour Lui et notre Crainte de Lui.

Perspectives

Le concept ultime d’une vie consciente de D.ieu s’exprimera à l’Ere de Machia’h, quand «la terre sera remplie de la connaissance de D.ieu comme les eaux couvrent le lit de l’océan». Bien que notre environnement matériel continue d’exister, il sera imprégné de la connaissance de D.ieu. Dans chaque lieu où nous nous rendrons, dans chaque acte que nous accomplirons, nous serons conscients de Sa présence.

Pour précipiter la venue de Machia’h, il faut nous conduire de cette façon dès à présent. Bien que nous ne puissions voir ou sentir en tout la révélation de D.ieu, nous pouvons apprécier Sa présence intellectuellement. Et il ne s’agit pas exclusivement de connaissance abstraite mais plutôt de ce type de savoir qui affecte le cœur tout comme l’esprit. Cela s’obtient en récitant les bénédictions adéquates à nos différentes activités.

Quand nous nous conduisons ainsi, nous marquons notre entourage. Car parmi les plus rares et donc les plus attirantes situations actuelles, se détache la rencontre de gens qui ont de sincères et profonds sentiments spirituels. Ce processus continuera naturellement à se développer, participant à la création d’une ère où la Présence Divine sera ouvertement révélée.