Par la grâce de D.ieu,
11 Elloul 5722,
Brooklyn, New York,
Au distingué et agréable ‘Hassid qui craint D.ieu, se consacre
aux besoins communautaires, a des comportements généreux,
est issu d’une illustre famille, le Rav C. Z.(1),
Je vous salue et vous bénis,
Je vous accuse réception de vos deux lettres, avec ce qui y était joint, notamment le compte-rendu(2). De même, j’ai bien reçu vos salutations, par l’intermédiaire du Rav Morde’haï Kirschblum et je vous remercie beaucoup pour tout cela. Les Juifs ont l’habitude et l’usage de formuler systématiquement des remarques et combien plus y a-t-il lieu de le faire, en l’occurrence. J’exprime donc ma fervente conviction que l’on tirera de ce compte-rendu des conclusions immédiates, au moins pour nos frères, les enfants d’Israël se trouvant de ce côté du rideau de fer et, avant tout, pour ceux qui sont dans “ le pays vers lesquels toujours sont tournés les yeux de D.ieu, du début de l’année à la fin de l’année ” et vers lequel “ tournent leur esprit ” nos frères, les enfants d’Israël qui sont de l’autre côté du rideau de fer, selon l’expression que vous employez vous-même, dans les salutations que vous m’avez transmises. De fait, ils en font mention à toute occasion et ils ont soif de toutes les nouvelles de ce qui s’y passe.
Votre compte-rendu souligne les signes de vie et la pérennité que présente notre peuple éternel, les enfants d’Israël. Ces signes sont précisément les Mitsvot qu’ils mettent en pratique, d’une façon concrète, en commençant par une Injonction qui défie toute logique, la circoncision, tranchée et scellée dans leur chair, non uniquement dans leur âme, y compris dans la chair d’un nouveau-né de huit jours, comme l’expliquent le Midrash et le Rambam, le Devarim Rabba, au début du chapitre 6 et le Guide des Egarés, tome 2, au chapitre 49. En fait, cette Mitsva aurait pu être pratiquée encore avant cela, mais la Torah a voulu qu’au préalable, la santé du nouveau-né se renforce. La conclusion immédiate de tout cela est donc la suivante. Il nous revient de venir en aide à nos frères, les enfants d’Israël, endurant la tourmente et la captivité. Aucune barrière, aucune limite ne doit faire obstacle à cette aide(3). Pour cela, chacun et chacune de ceux qui se trouvent de ce côté doivent se renforcer dans la pratique concrète des Mitsvot, en s’affichant publiquement, avec fierté, en ayant conscience que : “ Il nous a choisis ”(4) et “ Il nous a sanctifiés par Ses Commandements ”(5). C’est de cette façon que l’on peut aller à l’encontre de la clandestinité et des pressions, jusqu’à briser le moral, de ceux qui mettent en pratique les Mitsvot de l’autre côté du rideau de fer.
Bien entendu, je comprends qu’une telle idée ne sera pas très “ populaire ”, surtout si l’on tient compte de l’état d’esprit qui règne dernièrement(6) dans la rue, en notre Terre Sainte, puisse-t-elle être restaurée et rebâtie. Toutefois, le manque de popularité ne retire rien à la vérité de tout cela, à la force de la réalité et à sa nécessité. Je sais aussi que l’on pourra avancer l’argument suivant : ce qui vient d’être dit incombe à chacun et à chacune, à titre personnel. Ce n’est donc pas l’affaire de telle institution, de tel parti politique ou de tel groupe d’hommes. Cette objection est rigoureusement exacte. Néanmoins, compte tenu de l’importance des capacités et des opportunités qui sont offertes à tous, aux hommes comme aux institutions, la responsabilité est accrue d’autant, au même titre que le défi lancé à chacun pour s’acquitter de cette mission.
J’ai entendu(7), une fois, mon beau-père dire qu’un ‘Hassid est intelligent. Il ne remet donc pas à demain ce qu’il peut accomplir aujourd’hui. En l’occurrence, la promesse nous a été faite que “ aucun d’entre nous ne sera écarté ”, selon les termes du prophète Yé’hezkel, “ cela ne sera pas…, Je règnerai sur vous d’un bras puissant ”. Du reste, pour faire suite à ce qui a été dit, les Juifs apprécient les idées nouvelles, en particulier quand elles sont surprenantes. Or, on observe que, dernièrement, on a demandé à plusieurs délégués de la Terre sainte, puisse-t-elle être restaurée et rebâtie, en diaspora, de respecter, notamment, le Chabbat(8) et la Cacherout, parce qu’on les observe comme les représentants de notre Terre Sainte. Puis, lorsqu’ils quittent les pays des nations pour rentrer en Terre Sainte, on les libère de ces directives et de ces obligations !
Je suis convaincu que vous ne m’en voudrez pas pour ce qui est indiqué ci-dessus. Pour ma part, je n’en dirai pas plus, bien qu’il y aurait eu lieu de développer largement tout cela. En effet, pour quelqu’un comme vous, cela serait inutile. Rien n’a été réalisé, pour l’heure, concernant les bâtiments(9) et cela fait beaucoup de peine. Pourtant un comité a bien été désigné et celui-ci a même un président(10). Certes, vous m’en donnez les raisons dans votre lettre et il est inutile de se plaindre du passé(11). Puisse donc D.ieu faire qu’au moins à l’avenir, ce projet avance, au rythme le plus rapide, conformément à la nécessité et au besoin du moment.
Nous sommes en Elloul, mois de la miséricorde et D.ieu fasse donc que vous me donniez de bonnes nouvelles de vos proches qui sont restés là-bas(12) et que vous mentionnez dans votre lettre du 18 Mena’hem Av, d’un bien visible et tangible. Avec mes respects et ma bénédiction afin que vous soyez inscrit et scellé pour une bonne année,
M. Schneerson,
Sans doute avez-vous reçu, en son temps, mon précédent courrier.
Notes
(1) Chnéor Zalman Chazar. Voir, à son sujet, la lettre n°8254.
(2) Du voyage en Russie. Voir, à ce propos, la lettre n°8446.
(3) Voir, à ce sujet, le Séfer Ha Maamarim Meloukat, tome 4, à la page 89.
(4) Selon le texte de la bénédiction de la Torah.
(5) Selon le texte de la bénédiction des Mitsvot.
(6) Voir, à ce sujet, les lettres n°8399 et 8431.
(7) Voir, à ce sujet, la lettre n°1882.
(8) Voir, à ce sujet, la lettre n°8383.
(9) Devant être construits à Kfar ‘Habad.
(10) C. Z. Chazar lui-même !
(11) Selon le traité Bera’hot 54a.
(12) En Russie.