Lettre n° 7623

Par la grâce de D.ieu,
11 Nissan 5721,
Brooklyn, New York,

A nos frères, les enfants d’Israël, partout où ils
se trouvent, que D.ieu leur accorde longue vie,

Je vous salue largement et vous bénis,

La sortie d’Egypte, point central de la fête de Pessa’h, occupe une place prépondérante(1) dans la vie juive, à la fois pour la communauté et pour l’individu. Cet événement délivre un enseignement aux Juifs et les guide, non seulement par son message global, mais aussi par ses aspects spécifiques. En l’occurrence, l’un des aspects fondamentaux de la sortie d’Egypte est l’immense confiance en D.ieu(2) et en Sa Providence qui fut alors exprimée. En effet, un peuple entier, soit des millions de personnes(3), hommes, femmes et enfants, quittèrent soudain une contrée habitée, en laquelle il était possible de satisfaire tous ses besoins matériels et ils entreprirent un long chemin, sans provisions, sans aucune réserve, s’en remettant uniquement, mais s’en remettant pleinement, aux propos de Moché, notre maître, au Nom de D.ieu.

Bien plus, lors de la sortie d’Egypte, ils n’empruntèrent pas le chemin bien connu, qui était aussi le plus court, celui du pays des Philistins. Certes, on y courrait le risque de devoir faire la guerre et, en pareille situation, le doute existe toujours : obtiendra-t-on la victoire ? Et, même si ce n’est pas le cas, il reste possible que quelques personnes survivent à cette guerre. En l’occurrence, par contre, on se rendit dans un désert aride(4), dans lequel on ne disposait en aucune façon des moyens de conserver la vie.

Et, encore une fois, le seul élément conduisant à adopter un tel comportement était l’instruction en ce sens qui avait été reçue de Moché, au Nom de D.ieu. Tout cela est encore plus surprenant si l’on se dit qu’au préalable, les enfants d’Israël avaient vécu au même endroit pendant deux cent dix ans. Ils ne s’étaient pas du tout déplacés. Bien plus, ils se trouvaient à Gochen, une province de l’Egypte, qui possédait la terre arable la meilleure et la plus fertile(5). En effet, celle-ci ne dépendait pas des pluies, puisqu’on pouvait établir, avec certitude, que les crues du Nil l’irrigueraient. Un tel pays était entièrement basé sur les lois de la nature, sur ses principes et sur ses situations.

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Depuis “ les jours de ta sortie d’Egypte ”(6), dès que les enfants d’Israël quittèrent ce pays, le principe qui vient d’être énoncé, celui de la confiance absolue en la Providence de D.ieu, Qui dirige toute chose, jusque dans l’existence quotidienne, conforme à Sa Volonté, malgré les raisonnements humains et les lois naturelles, a été le compagnon et le guide des Juifs, à titre individuel ou bien communautaire, à toutes les époques.

Ceci apporte la réponse à la question qui est posée par le monde non juif ou encore qui est adressée par les éléments éloignés du Judaïsme, au sein du peuple juif, à ceux qui respectent la Torah et les Mitsvot : “ Nous vivons dans un monde de concurrence, au sein duquel il est nécessaire de lutter pour assurer sa survie. Chacun se trouve dans un certain pays, y est soumis à différentes conditions. Dès lors, comment ne pas se prosterner devant les maîtres du pays, qu’il s’agisse du dollar ou bien de la crainte d’être différent de ses voisins ? Comment ne pas les servir ? Pourquoi se lier à six cent treize Mitsvot qui ‘compliquent’ et dérangent les réalisations et le travail de l’homme, en chacun de ses accomplissements, à chaque pas ? ”.

La réponse à cette question est la suivante : il convient de sortir d’Egypte. En effet, comme on l’a dit, les enfants d’Israël, quittant ce pays, se conformèrent aux enseignements de D.ieu, sans tenir compte des conditions qui leur étaient imposées par la situation. Ils surent se détacher des comportements qu’ils avaient adoptés en Egypte pendant deux cent dix ans. Et, telle fut précisément la voie qui les conduisit vers le bonheur véritable, non seulement dans le domaine spirituel, en recevant la Torah et en devenant le peuple élu de D.ieu(7), mais aussi matériellement, en obtenant le “ pays où coulent le lait et le miel ”.

Il en est de même, à l’heure actuelle, comme cela a toujours été le cas et quel qu’ait pu être le passé. Pour chaque Juif comme pour l’ensemble du peuple d’Israël, la seule et unique voie conduisant vers le bonheur véritable est une vie quotidienne, une existence en général, conforme à la Torah, à ses Mitsvot, desquelles il est dit : “ On vivra avec elles ” et par elles(8).

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Les Juifs ont reçu l’Injonction suivante : “ En toutes tes voies, reconnais Le ”(9). En tout ce qu’il accomplit, pendant les vingt quatre heures du jour, un Juif reçoit les enseignements de la Torah et il se doit de les mettre en pratique. Il peut donc, à tout moment, être confronté à la question qui est énoncée ci-dessus. C’est précisément pour cela que chacun reçoit l’Injonction suivante(10) : “ Tu te souviendras du jour de ta sortie d’Egypte, tous les jours de ta vie ”. Un tel souvenir guide, illumine et donne la force d’adopter un comportement qui fait de chaque jour une journée juive, pleine de vie. Comme le souligne mon beau-père, le Rabbi, dont le mérite nous protégera(11), “ la fête de Pessa’h éclaire et se révèle, non seulement chaque jour, mais aussi en permanence ”. Avec ma bénédiction pour une fête de Pessa’h cachère et joyeuse,

Mena’hem Schneerson,

Notes

(1) Le Rabbi note, en bas de page : “ Selon les termes du Séfer Ha ‘Hinou’h, à la Mitsva n°21 : ‘C’est un grand fondement, un puissant pilier de notre Torah et de notre foi’. On consultera ce texte. ”
(2) Le Rabbi note, en bas de page : “ Yermyahou 2, 2 et commentaires de ce verset. Me’hilta sur le verset Chemot 12, 39. On verra aussi le Zohar, tome 3, à la page 168b ”.
(3) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Targoum Yonathan Ben Ouzyel sur les versets Chemot 12, 37-38 et le Me’hilta, à la même référence ”.
(4) Le Rabbi note, en bas de page : “ ‘Grand et redoutable, avec des serpents, des reptiles, des scorpions et la soif, alors qu’il n’y a pas d’eau’, selon le verset Devarim 8, 15. On verra le Midrash Chemot Rabba, chapitre 24, au paragraphe 4 et le Zohar, tome 2, à la page 157a ”.
(5) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le traité Sotta 34b, le verset Béréchit 47, 6 et le Zohar, tome 1, à partir de la page 108b ”.
(6) Le Rabbi note, en bas de page : “ Depuis le temps de la sortie d’Egypte jusqu’à la délivrance future, très bientôt et de nos jours, Amen, se poursuivent les jours de ‘ta sortie du pays de l’Egypte’, selon le début du discours ‘hassidique intitulé : ‘Comme aux jours de ta sortie d’Egypte’, de 5708 ”.
(7) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, partie Ora’h ‘Haïm, chapitre 60, au paragraphe 4, mais l’on peut s’interroger, à ce sujet, si l’on considère le chapitre 46 du Tanya ”.
(8) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le commentaire du Ramban sur le verset Vaykra 18, 5 ”.
(9) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le Tour et Choul’han Arou’h, partie Ora’h ‘Haïm, au chapitre 231 ”.
(10) Le Rabbi note en bas de page : “ Voir le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, au chapitre 67 ”.
(11) Le Rabbi note, en bas de page : “ Selon les causeries de la fête de Pessa’h 5703 ”.