Lettre n° 3722

Par la grâce de D.ieu,
19 Mena’hem Av 5715,
Brooklyn,

Je vous salue et vous bénis,

Je fais réponse à votre lettre, qui n’était pas datée. Je suis surpris que, dans cette lettre, vous ne disiez rien du temps que vous vous fixez pour étudier la ‘Hassidout, “ arbre de vie ”, selon l’expression du Raya Méhemna et de la manière dont vous adoptez ses usages et ses pratiques. De même, quelques autres détails y manquent également. Sans doute, faites-vous, en la matière, tout ce qui est en votre pouvoir.

Il est clair qu’en l’occurrence, rendre compte en un autre endroit n’a en soi, aucune valeur, bien que cela soit également une Mitsva, puisque le fait de réjouir un Juif est une application du Commandement d'aimer son prochain, qui est un grand principe de la Torah. De plus, faire savoir à quelqu’un que l’on a un bon comportement est un moyen de le renforcer et de le garder. En revanche, si personne ne le sait, le mauvais penchant trouve de nombreuses explications pour en affaiblir l’application. Puis, par la suite, il cherche à le supprimer complètement, comme la pratique en fait la preuve.

Vous me dites que certains maintiennent le comportement qu’ils avaient auparavant et considèrent que tout changement est un écart par rapport à la vérité.

Je suis surpris que l’on puisse même imaginer une telle manière d’agir. Il est dit, en effet, que ce qu’enseignent les Sages, à chaque époque, fut déjà donné à Moché, sur le mont Sinaï(1). Pour autant, cet enseignement doit bien être conforme aux principes de notre sainte Torah, qui est éternelle et qui ne sera pas changée.

A l’opposé, celui qui prétend accepter les enseignements des Sages des premières générations ou bien des plus anciens, parmi les dernières générations, mais non ceux des chefs d’Israël les plus récents, commet une erreur, comme l’établit la partie révélée de la Torah, le ‘Hochen Michpat, au début du chapitre 25(2). Son erreur est comparable à celle qui serait faite à propos de la Michna, à l’époque des Sages de la Guemara. Vous consulterez également ce qui en résulte pour la Hala’ha.

Si une telle optique s'était répandue, ce qu’à D.ieu ne plaise, on n’aurait pas introduit l’étude du Moussar dans les Yechivot. En effet, il y a quatre vingt ans, la plupart des dirigeants de Yechivot s’opposaient à une telle étude de manière particulièrement farouche, beaucoup plus clairement qu’on ne le fait, actuellement, pour l’enseignement de la ‘Hassidout. Vous étudierez, avec toute l’attention qui convient, l’introduction de mon beau-père, le Rabbi, au Kountrass Ets ‘Haïm.

La Torah accorde un rôle déterminant à l’action et cette introduction souligne que la vie fournit un exemple concret. Bien plus, de nos jours, on a pu observer, pour notre plus grand malheur, que, de tous les jeunes gens des différentes Yechivot qui vivaient sous l’emprise soviétique, les seuls qui ont été capables de surmonter l’épreuve, pendant les dizaines d’années où ils sont restés là-bas, ont été ceux qui ont étudié la ‘Hassidout et non pas ceux qui se sont contentés de la partie révélée de la Torah, ni même ceux qui se sont consacrés au Moussar.

Des dizaines, des centaines de témoins oculaires peuvent témoigner qu’il en a bien été ainsi et une large part d’entre eux se trouvent actuellement en Terre Sainte(3). Ce qui est bien connu n’a nul besoin d’être démontré.

Cela suffit donc de discuter, de s’interroger sur la nécessité d’étudier la ‘Hassidout! Chaque instant qui est perdu ne sera plus jamais retrouvé! Or, l’Admour Hazaken dit, dans son saint Tanya, à la fin du chapitre 25, que l’on aurait pu réaliser une unification éternelle qui, là-haut, est immuable. Or, on perd son temps à répondre aux arguments de ceux qui veulent empêcher l’étude d’une partie de la Torah, alors que cette étude ne porte pas uniquement sur son sens simple, son sens allusif et son sens analytique(4), mais également sur sa dimension profonde, sa partie cachée, qui relie la partie cachée de l’âme à celle du Saint béni soit-Il, comme le dit le Zohar, tome 3, page 73a.

Comme sont profonds l’obscurité, le voile et le masque ! Car, on sait bien pourquoi, à l’époque du Baal Chem Tov, on s’opposait à son enseignement. Tout cela est imprimé(5). Les livres sont disponibles, encore à l’heure actuelle. On connaît les arguments qui ont été invoqués. On craignait que l’on en vienne à un comportement moins stricte, dans la pratique des Mitsvot, ou même au delà de cela. Et, je ne souhaite pas analyser plus profondément ces arguments qui, déjà à l’époque, n’étaient pas fondés.

Depuis lors, deux cents ans se sont écoulés. On voit et l’on entend, à chaque pas, que ceux qui ont suivi ses disciples et les élèves de ses disciples accomplissent les Mitsvot de la meilleure façon, respectent même les moindres dispositions de nos Sages, s’efforcent même de rapprocher les autres Juifs d’un service de D.ieu empli de joie, ce qui n’est pas le cas…(6).

Je vous adresse ma bénédiction afin qu’à réception de cette lettre, vous augmentiez votre étude de tout ce qui vient d’être dit. Vous ne prêterez aucune attention aux doutes que quelqu’un d’extérieur entend soulever dans vos quatre coudées. Nos livres expliquent que Safek, le doute, a la même valeur numérique que Amalek. Or, Amalek lutte contre tous les enfants d’Israël qu’il rencontre sur son chemin, même lorsque ceux-ci ont déjà quitté l’Egypte. Et, il est dit que “ la guerre est portée contre Amalek, en chaque génération ”, y compris celle du Machia’h, comme le précise le Targoum Yonathan.

Pour le Rabbi Chlita,
le secrétaire,

Notes

(1) Il y a donc bien un enseignement nouveau, dévoilé à chaque époque.
(2) Le Rabbi note, en bas de page : “ Vous verrez également le Choul’han Arou’h de l’Admour Hazaken, lois de l’étude de la Torah, début du chapitre 2 ”.
(3) Où vraisemblablement se trouve également le destinataire de cette lettre.
(4) Le Rabbi note, en bas de page : “ Vous verrez aussi le Zohar, tome 3, début de la Parchat Ki Tétsé et la fin des Tikouneï Zohar ”.
(5) Le Rabbi note, en bas de page : “ Voir le traité Avoda Zara 35a ”.
(6) De ceux qui n’ont pas adopté la ‘Hassidout.