Lettre n° 3481

Par la grâce de D.ieu,
13 Iyar 5715,
Brooklyn,

Je vous salue et vous bénis,

J’ai bien reçu votre lettre du 4 Iyar, de même que les deux qui la précédaient et j’y fais maintenant réponse:

A) Vous connaissez sûrement le proverbe suivant de mon beau-père, le Rabbi(1). Bien qu’il soit nécessaire de connaître l’état de ses affaires, en établissant une balance exacte, il y a, néanmoins, un temps pour le faire, généralement en fin d’année. En revanche, si l’on établit ses comptes en permanence, on gaspillera son temps et ses forces, en plus du préjudice qui en résultera pour les affaires proprement dites.

De façon générale, on doit mener ses affaires dans la largesse et avec confiance(2), ainsi qu’il est dit : “ Elargis la bouche et Je l’emplirai ”. Or, une balance implique la mesure et l’étroitesse, lesquelles vont à l’encontre de tels sentiments.

Or, il en est de même pour la Torah et les Mitsvot, “ affaire ” essentielle de l’homme, qui a été créé pour servir son Créateur. Notre sainte Torah, Torah de vie, fixe donc des moments précis pour établir un bilan, généralement à la fin d’une période. Ainsi, le Chema Israël du coucher permet d’établir celui de la journée qui vient de s’écouler. A la fin de l’année, c’est-à-dire pendant le mois d’Elloul et surtout durant les Seli’hot, on fait le bilan de l’année passée.

Vous dites que vous établissez fréquemment de tels bilans, que ceux-ci portent, en particulier, sur votre comportement des années passées et vous vous demandez, encore et encore, si vous devez intensifier votre engagement dans votre activité pédagogique, votre enseignement et l’influence que vous exercez sur les autres. Comme en atteste ce qui vient d’être dit, votre attitude va à l’encontre du principe énoncé par mon beau-père, le Rabbi, chef d’Israël.

B) Pour revenir à ce qui fait, à proprement parler, l’objet de notre propos, six cent treize Mitsvot furent données aux enfants d’Israël et nos Sages précisèrent que celles-ci doivent être pratiquées en dépassant la ligne de la Loi(3). La ‘Hassidout ajoute que chacune doit être mise en pratique avec enthousiasme et chaleur. Pour autant, il est clair qu’une Mitsva n’en contredit pas une autre et encore moins les six cent douze autres. Bien au contraire, “ une Mitsva en attire une autre ”.

Il en est de même pour ce qui concerne votre question, que vous réitérez dans nombre de vos lettres. Tous les points que vous citez, votre mission sacrée consistant à guider votre entourage vers la Torah et les Mitsvot, la sainte fonction que vous assumez dans cette institution, l’aide que vous apportez à la maison, car l’harmonie familiale est particulièrement importante, puisque, selon l’expression de nos Sages, la Présence divine se révèle dans le couple grâce à elle, tous ces points sont également importants et ils constituent un grand mérite.

Le Créateur “ forge leur cœur ensemble ” et Il vous a confié toutes ces missions à la fois. A n’en pas douter, vous pouvez donc faire en sorte que l’une ne contredise pas l’autre, bien plus que l’une vienne en aide à l’autre. N’écrivez-vous pas vous-même, dans votre lettre, que votre épouse est satisfaite de l’influence positive que vous exercez sur tel jeune homme, qui s’est rapproché de la crainte de D.ieu ? Or, elle sait bien qu’en vous signifiant sa satisfaction, elle vous engage à poursuivre en ce sens. Cela veut bien dire qu’elle accepte votre action et la considère d’un œil bienveillant.

Il est clair qu’en étant éloigné, ou même en étant proche, il est difficile d’adopter une position tranchée et de dire que, de telle heure à telle heure, vous devez avoir telle activité, puis telle autre, jusqu’à telle heure. Tout dépend, en fait, des conditions du lieu et du moment, de l’état d’esprit, des urgences. Néanmoins, la Torah n’a pas été donnée aux anges et il ne faut pas exagérer la difficulté d’organiser ces activités d’une manière harmonieuse.

C) Vous m’écrivez que, lorsque vous considérez un jeune homme ou un élève se consacrant à l’étude, alors que vous assumez vous-même ces activités ou bien devez vous consacrer aux autres, vous ne savez pas si vous avez fait le bon choix. Or, le verset établit clairement que “ l’Eternel notre D.ieu nous a ordonné de faire tous ces Décrets, afin de craindre l’Eternel notre D.ieu ”. Il est dit aussi que “ Tu craindras D.ieu et tu garderas Ses Mitsvot, car telle est la finalité de l’homme ”.

Il en résulte que tout ce qui concerne la crainte de D.ieu et le respect concret de la Mitsva est bien l’objectif d’un homme. La Michna affirme que : “ J’ai été créé pour servir mon Créateur ” et non pour me servir moi-même, y compris de la manière la plus élevée, comme c’est le cas pour ce qui vient d’être dit et comme l’explique le Rambam, à la fin des lois de la Techouva.

On étudie la Torah par amour pour le Maître de tout, Qui a demandé de le faire. Il est dit, à propos de tous les Juifs, que “ vous êtes des fils pour l’Eternel votre D.ieu ”. Rabbi Akiva enseigne que le Précepte “ Tu aimeras ton prochain comme toi-même ” est “ un grand principe de la Torah ” et, quand on observe que l’un de Ses fils se trouve dans une forêt profonde, entouré par des bêtes sauvages, mais qu’on l’abandonne à son sort, afin de se consacrer à sa propre étude, d’être considéré comme un érudit ou un fin lettré, telle n’est pas la finalité de la création de l’homme, comme elle a été conçue par D.ieu. En effet, le Tout Puissant demande à l’homme de servir son Créateur.

Avec ma bénédiction pour servir D.ieu dans la joie,

Notes

(1) Voir, à ce sujet, la lettre n°2516.
(2) En D.ieu.
(3) De la meilleure manière possible.