Semaine 47

  • Mikets
Editorial

Huit faisceaux de lumière

Oui, ‘Hanoucca est une belle fête, cela ne fait pas de doute ! Les lumières qui montent, réduisant la nuit jusqu’à la faire disparaître, les enfants qui expriment la joie rayonnante des consciences sereines : c’est là une célébration que tous les troubles du monde ne peuvent altérer. Mais ‘Hanoucca possède encore une autre dimension, sans doute moins apparente au premier regard, plus profonde pour qui sait la voir, car ces jours incarnent essentiellement l’avenir. L’idée est, de fondation, présente. Le nom même de la fête – ‘Hanoucca – ne s’apparente-t-il pas, en étymologie hébraïque, au mot « ‘Hinou’h – éducation » ? Et existe-t-il une autre notion qui parle davantage de demain que celle d’éducation ? C’est alors que les lumières de la fête cessent d’être uniquement des points de clarté qui percent la nuit pour devenir de véritables faisceaux de lumière qui nous tracent un chemin, fidèles et puissants même au cœur des ténèbres.

Lorsque les flammes du chandelier de la fête s’élèvent, elles constituent autant de projecteurs d’avenir. Elles ne parlent pas que d’une ancienne histoire tissée d’héroïsme réel et débouchant sur une victoire militaire miraculeuse, elles ne nous rappellent pas que les temps du combat et du repos, même si ces éléments y figurent. Elles nous disent que la vie est toujours au devant de nous et que ces jours balisent une voie que nous suivons jour après jour. Que voulurent les envahisseurs au temps historique de ‘Hanoucca ? Seulement que nous oubliions. Ils ne voulurent pas véritablement détruire physiquement le peuple juif, ils entreprirent avec non moins d’inhumanité de l’effacer spirituellement de la terre. Mais peut-on écarter la lumière ? Peut-on écraser les porteurs d’avenir ? Les Juifs se levèrent, avec toute l’assurance que seule la conscience du bien donne, et ils menèrent une lutte sans haine, inégale et pourtant sereine. Ils le savaient : demain verrait la victoire et leurs enfants en hériteraient.

Aujourd’hui, nous continuons d’avancer. Il ne peut en être autrement : comment sortirait-on du chemin de lumière ? Les flammes de ‘Hanoucca nous précèdent et nous accompagnent. En temps d’inquiétude, elles rassurent. En temps de paix, elles confortent. Au fil du temps, elles transmettent. Nous en sommes – individuellement et collectivement – les porteurs. Et, de génération en génération, nous réalisons la plus grande Lumière.

Etincelles de Machiah

Une foi parfaite

Notre foi en la venue du Machia’h est une foi parfaite, au-delà de la logique et même si la raison ne parvient pas à comprendre comment cela serait possible. C’est là le sens de l’enseignement talmudique (Sanhédrin 97a) selon lequel le Machia’h vient « sans qu’on y pense ». Cela signifie : par une foi au-delà de la « pensée raisonnable ».

Le fait même que certaines disent que la génération n’en est pas digne est ainsi le signe certain que nous nous trouvons au seuil de la Délivrance. 

D’après Likoutei Si’hot vol 10 p. 171

Vivre avec la Paracha

Mikets

La fantaisie cosmique

Une partie significative de notre Paracha (Mikets, Beréchit 41 :1-44 :17) est occupée par le récit de deux rêves du roi de l’Egypte. Or, ces rêves ne sont pas relatés une fois, mais trois : tout d’abord, nous en lisons le récit lui-même. Puis vient une version plus détaillée, lorsque nous entendons le pharaon les décrire en personne à Yossef. Enfin Yossef apporte une réponse au pharaon, lui proposant son interprétation des différentes parties de ces rêves.

Et il s’agit ici de la dernière des séquences de rêves qu’a commencé à détailler la Torah dans les chapitres précédents. Yossef est dans le palais du pharaon interprétant les rêves de ce dernier grâce à deux rêves précédents : ceux qu’il avait lui-même faits deux ans plus tôt dans une prison égyptienne. Yossef y avait été incarcéré avec deux ministres du pharaon. Chacun avait fait un rêve que Yossef avait pu traduire avec succès.

Mais tout d’abord, que faisait Yossef dans cette prison égyptienne ? Quinze ans plus tôt, il avait relaté ses deux rêves personnels à ses frères et cela avait intensifié la jalousie qui les animait à son égard, les incitant à le vendre comme esclave. En fait, partout où il va, Yossef porte en lui chaque détail de ses rêves. Et c’est cela qui justifiera la façon étrange dont il traite ses frères et son père, bien des années plus tard. Il dirige l’Egypte. Canaan est frappé par la famine et ses frères se rendent alors en Egypte pour y acheter de la nourriture (Voir le commentaire de Na’hmanide sur Beréchit 42 :9).

Le résultat de toutes ces manifestations oniriques est l’exil égyptien, le premier exil vécu par le peuple juif et la source des exils qui suivront. Les enfants d’Israël s’installèrent en Egypte où ils seraient plus tard asservis par les Egyptiens et où ils subirent une détérioration spirituelle au point que, par bien des aspects, ils en vinrent à ressembler à leurs bourreaux. Quand D.ieu vint les sauver, Il dut «prendre une nation des entrailles d’une nation» (Devarim 4 :34), entrant dans les entrailles de l’Egypte pour extraire Son peuple de la société la plus dépravée du monde.

Cela fait 3000 ans. Depuis, nous avons subi bien d’autres siècles d’esclavage, sous l’hégémonie des Babyloniens et des Perses, des Grecs et des Romains etc. Et aujourd’hui, nous sommes toujours en exil. Il se peut que d’une manière générale, nous soyons libérés des persécutions et des tourments qu’ont subis les générations précédentes. Mais le Juif reste toujours un étranger dans le monde, toujours privé de l’environnement qui nourrit son âme et comble ses aspirations. Et l’exil, dans tous ses aspects, disent nos Sages, est un corolaire de notre premier exil en Egypte.

Rabbi Chnéor Zalman de Lyadi explique que l’exil naquit d’une succession de rêves parce qu’il est lui-même le rêve ultime. Un rêve est une perception qui s’accomplit sans la discipline de la raison. On y retrouve tous les stimuli et les expériences que nous connaissons dans la vraie vie : la vue et les sons, les pensées et l’action, la joie et la crainte.

En fait, tout l’univers du rêve est emprunté à notre état de veille. Mais tout y est sens dessus dessous, tout défie les normes de la logique et de la crédibilité. Dans un rêve, une tragédie peut être la cause d’une célébration, un parent peut être plus jeune que son enfant et une vache peut sauter vers la lune.

L’exil est un rêve, une tragédie terrible, irrationnelle embrassant le monde entier et durant des millénaires. Un rêve dans lequel le crime paie, le bon meurt jeune, et le peuple choisi par D.ieu est impunément martyrisé. Un rêve dans lequel ce qui est juste et vrai est rarement «réaliste» et où les choses insignifiantes comme «l’ignorance», «la mort» et «le mal» sont des forces extrêmement puissantes.

L’irréalisme de l’exil prévaut également dans notre vie spirituelle. C’est seulement dans l’exil qu’une personne peut se lever le matin, se purifier dans un mikvé, prier avec extase et dévotion, étudier un chapitre de Torah et puis se rendre au travail pour un jour de travail fait de ruses et de supercheries. «Hypocrisie» n’est pas le terme adéquat pour décrire l’attitude de cet homme. Car dans bien des cas, sa prière est sincère et son amour et sa crainte de D.ieu sont réels. Mais il habite dans le monde «irréel» de l’exil où les contraires peuvent coexister et où l’inconsistance est la norme.

Dans le monde véritable, de telles absurdités sont impossibles. Quand le Temple se tenait à Jérusalem et inondait le monde de Lumière divine, aucun homme imprégné de résidus d’impureté spirituelle ne pouvait s’approcher de D.ieu avant d’être passé par un processus de purification. Que D.ieu soit la source de vie et que la faute (c’est-à-dire une rupture avec le divin) soit synonyme de «mort» ne sont pas des vérités abstraites mais des faits de la vie. Dans le monde véritable, et c’est celui dans lequel nous allons nous réveiller quand s’évaporera le rêve de l’exil, les lois spirituelles de la réalité sont aussi apparentes et immuables que les lois physiques de la nature.

Cependant, il y a également un aspect positif dans notre existence hallucinatoire présente. Dans le monde véritable, une réelle relation avec D.ieu ne peut naître que dans le contexte d’une vie qui Lui est constamment fidèle. Dans le monde de l’exil, l’individu imparfait peut expérimenter le Divin. Dans le monde véritable, seule une âme parfaite peut pénétrer dans le Sanctuaire de D.ieu. Dans le monde de l’exil, D.ieu «réside parmi eux, au sein même de leur impureté».

Chaque jour, nous attendons l’aube divine qui fera disparaître la fantaisie cosmique qui, dans la plus grande partie de notre histoire, nous a estropiés, physiquement et spirituellement. Mais dans ces derniers instants d’exil, profitons de l’opportunité unique d’être «hypocrites» et «inconsistants», au sens positif : en mettant en œuvre toute notre capacité spirituelle et en faisant davantage que ce dont nous sommes raisonnablement capables, à la fois par notre potentiel et notre mérite.

Le Coin de la Halacha

Comment allume-t-on les lumières de ‘Hanouccah le vendredi après-midi 29 novembre 2013 ?

Il convient, avant l’allumage, de faire d’abord la prière de Min’ha. On ne peut allumer qu’à partir de 16h 06 (heure de Paris).

Le maître de maison, et éventuellement tous les garçons de la maison, prononceront d’abord les deux bénédictions :

(1) «Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner ‘Hanouccah».

Béni sois-Tu, Eternel notre D.ieu, Roi de l’univers qui nous a sanctifiés par Ses Commandements et nous a ordonné d’allumer les lumières de ‘Hanouccah.

(2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéassa Nissim Laavoténou Bayamine Hahème, Bizmane Hazé ».

Béni sois-Tu, Eternel notre D.ieu, Roi de l’univers qui a fait des miracles pour nos pères en ces jours-là, en ce temps-ci.

On allumera d’abord la mèche ou la bougie située le plus à gauche puis celle qui la précède, etc. à l’aide de la bougie appelée «Chamach».

On aura pris soin de mettre assez d’huile dans les 3 godets (ou d’avoir prévu 3 bougies assez grandes) pour durer jusqu’à une demi-heure après la nuit, c’est-à-dire jusqu’à environ 17h 50 (heure de Paris). Après l’allumage, on récite «Hanérot Halalou».

Ensuite, les jeunes filles et les petites filles allumeront leurs bougies de Chabbat (après avoir mis quelques pièces dans la boîte de Tsédaka (charité) ; les femmes mariées allumeront au moins deux bougies.

Tout ceci devra être terminé avant 16h 39 (heure de Paris) le vendredi 29 novembre.

Une jeune fille (ou une femme) qui habite seule devra elle aussi procéder d’abord à l’allumage des lumières de ‘Hanouccah puis des bougies de Chabbat, avec les bénédictions appropriées.

F. L.

Le Recit de la Semaine

Quoi ? Des LEGO ?

«Vous allez construire une Ménorah en Lego ? Entièrement en Lego ? Sérieusement ?»

Telles furent les premières réactions dans notre communauté quand on apprit que, cette année, nous avions décidé de construire notre Ménorah en Lego. Oui, nous étions décidés : la ville de Santa Barbara en Californie serait gâtée avec une fête de ‘Hanouccah comme jamais auparavant !

Nous avons envoyé des cartes postales pour annoncer l’événement, nous avons déposé des fascicules dans tous les magasins juifs. La Ménorah en Lego était dans toutes les conversations : «Vous avez entendu la nouvelle idée des Loubavitch cette année ?», «Ils ont toujours des idées si originales !» ou encore : «Mes enfants attendent avec impatience de voir la Ménorah en Lego !» Je contactai le journal local pour un espace publicitaire dans la liste des événements du mois. Comme «par hasard», la standardiste me transféra sur un «mauvais» numéro : quand j’expliquai pourquoi je téléphonai, la personne au bout du fil m’informa que je m’étais trompée de service mais que cela l’intéressait néanmoins puisqu’elle éditait son propre guide qui devait être imprimé le jour même pour la fête américaine de Thanksgiving ! Je lui envoyai donc immédiatement par email la documentation que m’avaient fait parvenir auparavant d’autres émissaires du Rabbi (un grand merci à mes prédécesseurs dans cette entreprise !) qui avaient eux aussi construit une immense Ménorah en Lego.

Le jour de Thanksgiving, je me précipitai bien sûr sur le guide en question : la Ménorah en Lego était en Une ! L’éditrice avait trouvé l’idée réellement formidable : utiliser des objets aussi simples que les Lego pour créer un symbole hautement spirituel !

Quant au journal local, la nouvelle responsable de la section religion s’emballa elle aussi pour cette idée : «Je connais tout sur le mouvement Loubavitch ! Quand je suis devenue responsable de cette rubrique religion, j’ai assisté à une conférence donnée par la reporter Sue Fishkoff qui nous a présenté son livre sur «L’Armée du Rabbi» et je l’ai trouvé vraiment impressionnant !»

Après la publicité, venait la partie logistique. Samedi soir avant la fête, nous avons entrepris de construire la Ménorah devant notre garage pour vérifier sa viabilité. Les gens n’auraient pas la patience de nous voir la construire et hésiter sous leurs yeux en nous ridiculisant le jour de l’allumage. La tige centrale mesurait 1,80 mètre, les branches 90 centimètres sur 120. Toute la structure avait une hauteur de plus de 3 mètres. Il nous a fallu plusieurs essais avant de parvenir à construire quelque chose de stable et de mémoriser la façon d’emboîter toutes les pièces.

C’est alors qu’il commença à pleuvoir. Nous avons vite rangé les Lego à l’intérieur, en les démontant au passage afin qu’ils ne se mouillent pas. En consultant la météo, nous avons appris avec angoisse que la pluie était au programme mardi, justement le jour prévu pour notre allumage !

Le lendemain, dimanche, les coups de téléphone affluèrent : «Ella ! Tu as vu les prévisions de la météo ?». Feignant l’insouciance, j’affirmai qu’il ne pleuvrait pas, qu’il ne pourrait pas pleuvoir ! Nous allions procéder à cet allumage, certainement avec la bénédiction du Rabbi et il ne pleuvrait pas, promis !

Inutile de préciser que nous avons prié ! Beaucoup !

Le lendemain matin, je me réveillai au son de la pluie… et du déluge d’appels téléphoniques… Oui ! Nous persistions à prévoir notre allumage le lendemain et chacun devait prier avec nous pour la réussite de l’événement. Le programme était vraiment intéressant, plairait aux enfants comme aux adultes, la publicité avait été à la hauteur et D.ieu Lui-même devait nous aider, nous avions agi et Il devait nous aider !

Chaque mardi matin, je rends visite à des patients à l’hôpital : ce mardi matin, je ne voulus pas faire d’exceptions. Je quittai la maison sous la pluie, j’arrivai à l’hôpital sous la pluie ; tandis que je parlais avec mes patients habituels, je récitais avec eux des Tehilim (Psaumes) pour leur guérison et leur demandai de prier pour la réussite de notre fête le soir même. Je leur expliquai que la pluie devait absolument s’arrêter et tous m’assurèrent qu’ils prieraient de toutes leurs forces, notre allumage serait en première place dans leurs pensées et leurs prières - malgré leurs propres soucis et souffrances !

L’allumage était prévu à 17 heures. A 15h 45, sous une pluie battante, nous avons chargé la camionnette avec les LEGO, les rafraîchissements, les beignets, les fascicules… et nous avons pris la direction du grand centre commercial. Avant de partir, nous avions changé le message du répondeur téléphonique afin que les gens sachent que, quoi qu’il arrive, l’allumage aurait lieu !

Mais, en route, la pluie devint de plus en plus forte !

A l’arrivée, nous avons déballé les 47 boîtes de LEGO et tout le reste – sous la pluie.

A 17 heures pile, au moment où l’allumage devait commencer, la pluie cessa ! Soudain ! Elle ne s’est pas arrêtée doucement mais elle cessa subitement, complètement.

Et la pluie ne recommença qu’à 18 heures 30 ! Une fois que nous avions tout démonté et remballé !

C’était le premier miracle.

Quant au second…

Quand il pleut à Santa Barbara – comme d’ailleurs dans toute la Californie – les gens restent chez eux ; ils annulent les rendez-vous, se recroquevillent dans leurs lits et hibernent. J’ignore pourquoi mais telle est la mentalité là-bas. Je n’exagère pas en affirmant que, quand nous sommes arrivés dans le centre commercial, il n’y avait pas âme qui vive présente ! Mais au fur et à mesure que nous avons construit notre Ménorah en Lego, plus de 250 personnes apparurent pour admirer la performance, chanter la lumière, déguster des beignets et se réjouir de leur identité juive.

Des jours et des semaines plus tard, on entendait encore les gens répéter que, oui, vraiment, ‘Hanouccah était la fête des miracles et qu’ils avaient bravé la pluie avec les Loubavitch de l’endroit pour admirer notre Ménorah en Lego alors que la pluie s’était brusquement arrêtée. Juste pour notre allumage !

Allumage qui fit d’ailleurs la une du journal du lendemain !

Ella Loschak – N’shei Chabad Newsletter N° 6602

Traduite par Feiga Lubecki