Semaine 51

  • Vayigach
Editorial
De simples livres ?

C’est une simple histoire de livres… Lorsqu’on dit de tels mots, la réalité des faits et leur portée paraissent sans doute encore plus étonnantes. C’était le 5 Tévèt et des livres saints – souvent rares – qui avaient été détournés de la bibliothèque du mouvement Loubavitch, rassemblée par les Rabbis successifs, retrouvaient leur place légitime, à la disposition et pour le plus grand bien de tous. Une simple histoire de livres donc ? C’est vrai, peut-être certains pourraient n’y voir que cela. Il existe des gens pour qui un livre n’est rien d’autre qu’un assemblage de papiers et, à l’heure d’internet… Pour cela, il est ici nécessaire de revenir au profond des choses. Tous les livres ont une âme mais ceux-ci possèdent un élément supplémentaire : une sainteté indispensable à tous et qui ne saurait appartenir en exclusivité à personne. C’est une richesse collective essentielle ; le 5 Tévèt nous donne à la redécouvrir.
En effet, au-delà du combat pour le retour des livres conclu victorieusement ce jour-là, c’est véritablement d’un affrontement entre deux visions des choses qu’il s’agit. Ces livres se limitent-ils à leur seule existence et seraient donc, à ce titre, des objets comme tous les autres, à valeur marchande et, par conséquent, exploitables ? Ou appartiennent-ils à un plan supérieur et, dès lors, ont un autre statut ? Le 5 Tévèt est l’affirmation nette que cette dernière idée est bien celle qui correspond à la vérité. Lorsque, en son temps, la nouvelle de cette victoire fut connue, la joie la plus grande éclata partout où se trouvaient des ‘hassidim. Le Rabbi sut vite lui donner une définition : cette joie est celle des livres, elle renvoie donc à leur étude, chaleureuse et enthousiaste.
C’est ainsi que le 5 Tévèt n’est pas uniquement l’allégresse d’un moment. Cette date porte réjouissance éternelle car ce qu’elle exprime n’est rien de moins que le cœur de ce que nous sommes, l’essence de notre âme. Un livre, cela va loin et, quand il s’agit de ces ouvrages que le Rabbi sauva parfois au péril de sa vie, cela touche à des niveaux que l’on peine à décrire. Le bruit et la fureur du monde, la tempête des jours auraient pu effacer cette conscience. L’anniversaire à célébrer est celui d’une victoire qui, ainsi, nous entraîne au-delà de nous-mêmes. Des livres, une sagesse, à étudier et à méditer pour que l’homme se souvienne qu’il est d’abord une créature Divine.
Etincelles de Machiah
Sans exception

Lorsque Machia’h viendra, aucun Juif ne restera en exil comme le souligne Rachi (Parchat Nitsavim 30:2) : «Il (D.ieu) prend par la main chacun…». En effet, le sens profond de la Délivrance est l’expression du lien essentiel entre les Juifs et D.ieu. Or, si un seul Juif restait en exil, ce lien ne s’exprimant pas totalement, la Délivrance ne serait pas authentique.

La Délivrance est qualifiée de «véritable et complète» car elle sera celle de tous.
(d’après Séfer HaSi’hot 5742, vol. II, p.514)
Vivre avec la Paracha
Vayigach : Un conflit qui court dans l’histoire


Le conflit qui oppose Yossef à ses frères, et tout particulièrement à Yehouda, court comme un torrent tout au long de l’histoire d’Israël. Parfois, Yossef a l’avantage et parfois, c’est Yehouda, mais le schisme refait toujours surface. Nos Sages vont jusqu’à parler de deux Messies, chacun tenant un rôle dans l’accomplissement ultime de la mission d’Israël, un Messie descendant de Yossef et un Messie issu de la maison royale de David, de la tribu de Yehouda.
Ce conflit prend ses racines dans les deux mariages de Yaakov avec Ra’hel et Léa. La préférence de Yaakov allait pour Ra’hel, elle était celle qu’il avait d’abord désirée pour épouse. Mais Léa avait été celle qu’il avait d’abord épousée, la première à lui donner des enfants et celle qui fut victorieuse dans la compétition pour donner à Yaakov le plus de fils. Les six fils de Léa naquirent avant l’aîné de Ra’hel, Yossef. Ra’hel n’eut que deux fils et mourut en donnant naissance au second, Binyamine.
En tant qu’aîné de Yaakov, le fils de Léa, Réouven, est initialement pressenti pour prendre la direction dans tous les domaines de la vie juive. Mais il pèche et ses droits d’aînesse sont transférés à trois de ses frères : la prêtrise est attribuée au troisième fils de Léa, Lévi, la royauté au quatrième, Yehouda, et le droit d’aînesse (le droit du premier-né à posséder une portion double dans l’héritage de son père) va à Yossef. C’est ainsi que les descendants de Yossef vont comprendre deux tribus : Menaché et Efraïm et recevront deux portions de la terre d’Israël.
Yaakov transfère son amour pour Ra’hel à son fils Yossef, affichant sa préférence, comme il l’avait fait pour Ra’hel. La jalousie des frères est attisée par les rêves de Yossef sur lesquels il insiste en les racontant à plusieurs reprises, à ses frères et à son père, et qui prédisent sa suprématie.
C’est cela que les fils de Léa veulent empêcher, à tout prix. Chimone et Lévi complotent pour tuer Yossef. Yehouda les en empêche mais organise sa vente comme esclave.
Mais la victoire des frères est à court terme. Ils se retrouvent bientôt en Egypte, à la merci d’un cruel vice roi qui est, sans qu’ils le sachent, leur propre frère banni. Ils se prosternent devant lui, comme le prévoyaient les rêves. Yehouda confronte Yossef mais sa force considérable et sa puissance intellectuelle doivent céder devant celles de son plus jeune frère. Survient alors la scène émouvante où Yossef leur révèle son identité et se réconcilie avec eux.
Yossef est désormais le chef incontestable de la nation naissante. Il est son protecteur et sa source de subsistance. Yaakov, lui-même, se prosterne devant lui.
Quand le peuple d’Israël émerge de l’esclavage égyptien, c’est sous la direction de Moché et Aharon, tous deux appartenant à la tribu de Lévi. Mais c’est Yehochoua, descendant de Yossef, qui les conduit dans leur conquête de la Terre Sainte. Plusieurs générations plus tard, un autre descendant de Yossef, Guidone, les libère du joug étranger et les gouverne. Pendant 369 ans, le Tabernacle, précurseur du Saint Temple, et centre spirituel de la vie juive, est situé à Shilo, sur le territoire de Yossef.
Quand le Peuple d’Israël demande un roi, un descendant de Ra’hel, membre de la tribu de Binyamine, Chaoul, est investi de la couronne.
Puis, après des siècles d’ascendance de Yossef, le balancier change à nouveau de côté. David, descendant de la tribu de Yehouda, est oint roi. Ses luttes avec le roi Chaoul ne sont qu’une répétition de l’ancestrale rivalité entre Ra’hel et Léa pour le leadership d’Israël.
David règne sept ans dans la ville de Judée, ‘Hévron, alors qu’un fils de Chaoul est le roi reconnu dans le nord.
C’est alors que la souveraineté de David est acceptée par tout le Peuple d’Israël. David fait sa capitale d’une autre ville de Judée, Jérusalem. Son fils, Chlomo, construit le Saint Temple sur le territoire qui chevauche sur la frontière entre Yehouda et Binyamine. La scission semble interrompue, le peuple réuni et les rennes se retrouvent entre les mains de Yehouda.
Mais une fois de plus, le conflit refait surface. A la mort de Chlomo, Yerovoam, descendant de Yossef, mène une révolte contre la maison royale de David. Il réussit même à convaincre d’autres tribus, descendant de Léa, de le rejoindre pour abattre la domination judéenne.
Pendant 240 ans, la Terre Sainte est partagée en deux royaumes : le royaume d’Israël, au nord, comprenant dix tribus dissidentes, sous la direction de la famille de Yossef, et, au sud, le royaume de Yehouda. (Il est intéressant de noter que la tribu de Binyamine reste fidèle au trône de Yehouda.) Les fils de Yossef ne sont tout simplement pas prêts à accepter la souveraineté de Yehouda.
La brèche persiste jusqu’à ce jour. Un siècle avant la destruction du premier Temple, Chalmanesser, roi d’Assyrie, envahit le royaume d’Israël, au nord, et exile les dix tribus dans un lieu inconnu. On n’en entendra jamais plus parler. Le reste de l’histoire juive, telle que nous la connaissons, est celle des tribus survivantes de Yehouda et de Binyamine, d’une partie significative de Lévi (dont les prêtres et les Lévites habitaient dans des villes situées dans toute la Terre Sainte) et d’un petit nombre de Juifs appartenant aux autres tribus et qui vivaient dans la tribu de Yehouda.
Mais les prophètes promettent que viendra un temps où le Peuple sera réunifié. L’Ere messianique sera proclamée par un Messie descendant de la tribu de Yossef et par un Messie issu de la tribu de Yehouda. En dernier ressort, la souveraineté de Yehouda sera établie à tout jamais. Selon les mots du Prophète Yé’hézkyahou, «J’en ferai une nation dans la terre… et un roi unique régnera sur eux tous… mon serviteur David sera leur roi et ils n’auront qu’un seul berger… et Mon serviteur David sera leur prince, pour toujours. »
Le Coin de la Halacha
Qu’est-ce que le jeûne du 10 Tévet ?

Le 10 Tévet – cette année dimanche 23 décembre 2012 – rappelle le début du siège de Jérusalem par Nabuchodonosor en l’an 3336 (-425). C’est l’un des quatre jeûnes institués par nos Sages en souvenir de la destruction du Temple.
Rabbi Schnéour Zalman explique qu’un jour de jeûne est aussi un jour de bienveillance divine. Comme l’obligation de jeûner le 10 Tévet est, à certains égards, plus stricte que pour les autres jeûnes, on peut comprendre que la bienveillance divine est aussi plus forte ce jour-là. Donc la Techouva, le retour à D.ieu que doit amener le jeûne, sera aussi d’un niveau plus élevé.
Dans de nombreuses communautés, ce jeûne est associé au souvenir des victimes de la Shoah et le Kaddich y est récité pour le mérite de tous ceux dont on ignore la date exacte de décès.
Le jeûne commence à 6h 58 (heure de Paris) et se termine à 17h 43.

F. L.
De Recit de la Semaine
Mon premier banquet avec les Chlou’him

Mon fils m’a raconté que Mendy, un de ses amis Loubavitch, essayait un jour de pénétrer dans le bâtiment d’une grande société afin de mettre les Téfilines au directeur au nom à consonance juive. Devant la porte fermée, il entendit la voix peu amène d’un gardien qui clamait : «C’est pour qui ?» Et, sans s’émouvoir, le jeune homme qui serrait son sac de Téfilines sous le bras, répondit : «Le Rabbi de Loubavitch m’envoie pour parler à Monsieur Shapiro !» Dans un grincement, la porte s’ouvrit.
J’ai assisté pour la première fois ce dimanche soir au banquet annuel du Kinous Hachlou’him, la réunion internationale des émissaires du Rabbi à New York : j’ai ainsi eu le privilège de voir de mes propres yeux près de 4600 émissaires venus de plus de soixante-dix pays. Et comme dans la petite histoire que m’a racontée mon fils, ces Chlou’him étaient tous là parce que le Rabbi les avait envoyés à travers le monde pour retrouver tous les Mrs. et Mmes Shapiro (d’ailleurs comme dans l’histoire de mon fils, les deux tiers de ceux qui étaient assis au banquet s’appelaient justement Mendy).
Tandis que j’écoutais les discours plus incroyables les uns que les autres, depuis le bienfaiteur d’Afrique du sud (dont le fils est devenu Loubavitch) jusqu’au Grand Rabbin Israël Meir Lau, je me mis à réfléchir à la magie de ‘Habad. Et quand j’entendis évoquer la réussite financière et la vie privée remarquable du regretté Sami Rohr entièrement tournée vers les actes de bienfaisance ainsi que l’amplitude de la générosité de M. Bogolubov envers tous les Chlou’him et leurs familles, je réfléchis encore plus intensément à la puissance bénéfique du Rabbi.
Nous avons tous entendu et raconté à notre tour les histoires miraculeuses à propos du Rabbi : un couple stérile demande une bénédiction et se retrouve à la tête d’une famille de dix enfants, un SDF devient millionnaire… Ce sont des histoires réelles et vérifiées. Mais tandis que j’observais dans la salle du Hilton les milliers de Chlou’him qui dansaient et chantaient tout en évoluant entre les centaines de tables avec de larges sourires, certains les larmes aux yeux, alors que les serveurs se demandaient comment ils allaient récupérer les assiettes de poisson et servir les assiettes de viande… Je me suis posé une question : si chacun de ces hommes priait pour la santé et la prospérité d’un autre Juif, leurs prières seraient certainement répondues. Il n’est peut-être pas si extraordinaire de prier et de recevoir des bénédictions : c’est d’ailleurs la suite naturelle de ce genre de requêtes.
Mais en entendant l’évocation de tous les centres Loubavitch à travers le monde par Rav Moshe Kotlarsky – avec l’aide rafraîchissante de quelques enfants de Chlou’him – c’est la pensée originale, supra rationnelle du Rabbi qui s’était révélée, bien au-delà de toutes les naissances de bébés et de soudaines bonnes fortunes.
Après la destruction du judaïsme européen et alors que l’assimilation des Juifs américains triomphait, la tendance naturelle aurait été de récupérer les rescapés du judaïsme orthodoxe et de les installer tous ensemble dans un endroit protégé des influences extérieures pour espérer reconstruire au mieux une forteresse. Il pouvait sembler contre-productif de les séparer et de les disperser aux quatre coins du monde. Mais le Rabbi (suivant l’exemple du Rabbi précédent) prit ces «tisons sauvés de l’incendie» et, au lieu de les implanter solidement dans un environnement sûr, choisit de les replanter dans les endroits les plus improbables et les plus reculés du globe.
Cette décision totalement irrationnelle s’est, comme les autres décisions du Rabbi, avérée judicieuse. Alors que ce dimanche soir, les ‘Hassidim venus de Virginie et du Vietnam, de Miami et de Malte, de El Paso et de Paris, d’Afrique du sud et de Sydney se réunissaient, ils se rappelaient mutuellement qu’ils avaient tous effectivement un rendez-vous… avec tous les Mrs et Mmes Shapiro de par le monde. Et que c’est la main supra naturelle et miraculeuse du Rabbi qui leur envoie sa bénédiction. Et que cette bénédiction est effective.
Les participants ont prolongé cette réunion à la synagogue du 770 Eastern Parkway jusqu’aux petites heures de l’aube. Déclarant à la face du monde que les sonnettes continueraient de sonner et les portes continueraient de s’ouvrir pour les extraordinaires émissaires d’un Rabbi qui avait très naturellement pris des décisions extraordinaires.
Je suis sorti de ce Congrès fermement persuadé que ces graines semées aux quatre coins du globe, devenues maintenant des généraux de l’armée internationale du Rabbi ne se contentent plus de frapper aux portes avec leur Rabbi derrière eux mais qu’ils pénètrent par toutes les portes, sachant que plus de 5000 de leurs frères les accompagnent.

David Nesenoff – Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Traduit par Feiga Lubecki