Semaine 26

  • Kora’h
Editorial
15 ans

Voici que, cette semaine, revient le 3 Tamouz, chacun sait que ce jour est différent de tous les autres, qu’il marque notre conscience. C’était il y a 15 ans, le 3 Tamouz devenait le jour du départ de ce monde du Rabbi. Beaucoup a été dit depuis cet événement : la présence de l’enseignement du Rabbi qui ne se dément pas, l’inspiration et l’énergie qui s’en dégagent, chaque jour démultipliées, l’action de ses envoyés aux quatre coins du monde qui poursuivent cette œuvre aux enjeux d’éternité. De fait, de telles idées ne perdent jamais leur actualité et, dans cette optique, le 3 Tamouz est aussi une date comme un point de référence tant sont importantes les choses qui s’y mesurent. Il faut, toutefois, se garder de faire de ce jour un simple anniversaire en se contentant d’égrener les années qui passent. Le 3 Tamouz est d’abord porteur d’une puissance qu’il nous appartient de partager.
Cependant, tout acte essentiel doit avoir une fondation. Ainsi ce 3 Tamouz doit-il être celui du bilan. Quels ont été les accomplissements depuis 15 ans ? En quoi chacun a-t-il pris part à ce grand mouvement qui nous emmène chaque jour plus près de la venue de Machia’h ? Ce sont ces questions-là qui, à présent, nous sont adressées. En y répondant, nous ne ferons pas que tenter d’apporter une bien inutile justification à un temps écoulé. Nous mettons en perspective ces quinze ans et, porteurs de la dynamique qu’ils incarnent, nous pénétrons dans un champ d’action nouveau qui bouleverse la donne. Nous transformons radicalement nous-même et le monde qui nous entoure. Tout à la fois, nous voyons et faisons naître le Bien autour de nous. Et si les ombres semblent parfois grandir, nous savons aussi que la lumière est toujours victorieuse.
C’est cette vision-là que le Rabbi nous a donnée comme un héritage. Depuis 15 ans, chacun en a suivi les développements et les avancées. Aujourd’hui, au jour du 3 Tamouz, chacun peut la regarder prendre un élan nouveau. Chacun, conscient de ce qui a été accompli, pénétré du sens de l’espoir et de l’attente, ressent, de manière concrète, que le temps est venu : celui où la volonté, l’action et la réussite prennent une ampleur que personne ne pouvait jusqu’ici soupçonner. Décidément, c’est bien à un passage que nous nous trouvons. La lumière grandit, chacun en voit le frémissement. Le Rabbi, par son enseignement, nous conduit avec force vers le but ultime de l’effort : la venue de Machia’h. 15 est un chiffre de plénitude est-il enseigné par les commentateurs. Puisse ce 3 Tamouz des 15 ans être celui où une telle notion rencontre enfin la plénitude de sa concrétisation.
Etincelles de Machiah
Une double lumière

Lorsqu’il est question de la nouvelle ère que Machia’h introduira, il est souvent fait référence à l’intense “lumière” Divine qui brillera alors sur le monde. Cette notion de “lumière” doit, bien entendu, être comprise dans son sens spirituel : elle désigne la révélation de D.ieu.
A ce sujet, il est enseigné que ce véritable dévoilement peut prendre deux formes. Il peut venir “d’en-Haut”, c’est-à-dire sans que le monde change fondamentalement. Dans un tel cas, la “lumière” est infinie car elle ne tient pas compte des limites de la création.
En revanche, elle peut aussi apparaître après l’élévation du monde qui parvient au niveau de cette révélation. Dans ce sens, la “lumière” en question, révélée à la mesure du monde, peut le pénétrer plus profondément. Il en ressort que chacune de ces deux formes de révélation possède sa qualité propre. Aussi est-il précisé que, lorsque le Machia’h viendra, elles seront réunies : la lumière divine apparaîtra révélée dans un monde à la mesure de l’Infini.
(D’après Likouteï Torah, Parchat Rééh 26a) H.N
Vivre avec la Paracha
Kora’h : Trois miracles naturels

Notre Paracha relate l’histoire du bâton d’Aharon qui fleurit. Kora’h et sa faction rebelle avaient contesté le droit d’Aharon au grand Sacerdoce, Kehounah Guedolah. Afin de réitérer Son choix d’Aharon pour Le servir dans le Sanctuaire comme représentant de la nation juive, D.ieu instruisit Moché :
“Prends… un bâton de chacun des chefs (de tribus)… Chacun inscrira son nom sur le bâton… Inscris le nom d’Aharon sur le bâton de la tribu de Lévi… et le bâton de l’homme que je choisirai fleurira…”.
Moché plaça chaque bâton devant l’Eternel dans le Sanctuaire… Le jour suivant… voici que le bâton d’Aharon avait fleuri: il avait bourgeonné, produit des fruits et portait des amandes mûres (Nombres 17 :16-24).

Dans un discours prononcé, Chabbat Kora’h en 1991, le Rabbi cite l’épisode qui précède comme un exemple classique de ce qu’il appelle un “miracle naturel”. D.ieu ne se contenta pas de faire apparaître des amandes sur le bâton d’Aharon. Il simula plutôt le bourgeonnement, la floraison, l’émergence et le mûrissement du fruit, comme le relatent les versets cités ci-dessus, signe que ces trois étapes étaient apparentes sur le bâton d’Aharon. Tout en défiant les lois de la nature et ses restrictions, le bâton se conforma néanmoins aux phases de développement par lesquelles passe la nature. Il transcendait la nature mais dans les termes propres de la nature.
En d’autres termes, il existe deux types de miracles :
a) un miracle “d’affrontement”, qui s’empare des normes naturelles et les transforme, créant une réalité complètement contraire aux lois de la nature.
b) un miracle naturel qui, bien que paraissant moins “impossible” selon les standards normaux, et non moins évidemment le résultat d’une intervention divine, emploie des phénomènes et des processus naturels pour arriver à sa manifestation.
Pour comprendre la différence entre ces deux types de miracles, nous devons tout d’abord examiner le but des miracles en général.
Le mot hébreu pour miracles, Ness, signifie “élevé” et “éthéré”. La régularité et la prédictibilité de la nature créée ce que l’on appelle ses lois: “c’est la matière dont cela se passe, dit l’ordre naturel, et vous ne pouvez que vous conformer à cette réalité définie et limitée”. Toutefois, la vérité est toute différente: l’homme et son monde ont été imprégnés par leur Créateur du potentiel de grandir et d’élever leur existence, d’aller au-delà de ce qui est dicté par les mots: “les choses sont ce qu’elles sont”. Un miracle, que dispense ouvertement la puissance divine, élève ceux qui l’expérimentent, leur permettant de voir à travers la façade de la nature et les inspirant à transcender les limitations perçues de leur propre nature et les normes acceptées par leur société.
A première vue, il peut paraître que le besoin du miracle naturel d’utiliser le processus naturel en fait un moins grand miracle. En réalité, un miracle qui agit à travers la nature a une force d’élévation (et donc est plus “miraculeux”) qu’un miracle qui la domine. Un changement soudain, bouleversant n’a pas transformé la nature, il l’a simplement dépassée; mais lorsqu’un miracle est intégré dans les œuvres de la nature, la nature elle-même s’en trouve élevée. Un miracle surnaturel libère la personne qui le vit de l’ordre naturel; un miracle naturel libère la substance même de l’ordre naturel.

Le jour où le soleil s’arrêta
La Paracha de Kora’h est habituellement lue la première semaine du mois de Tamouz. Le Chabbat où le Rabbi parla du miracle du bâton d’Aharon était le 3 Tamouz, et le Rabbi trouva deux autres exemples historiques, tous deux s’étant produits à cette date.
Le 3 Tamouz de l’année 2488 après la Création, (1273 avant l’ère vulgaire), Yehochoua conduisait le Peuple Juif dans l’une des batailles de conquête de la Terre d’Israël. La victoire était imminente mais la nuit était sur le point de tomber. “Soleil, proclama Yehochoua, arrête-toi à Givon; lune, à la vallée Ayalon” (Yehochoua 10 :12). Les luminaires célestes acquiescèrent, interrompant leur progression à travers le ciel jusqu’à ce que les armées aient remporté la victoire.
Nos Sages ont déclaré: “D.ieu n’accomplit pas un miracle en vain”. Quelle fut donc la raison des miracles accomplis sous l’ordre de Yehochoua ? N’aurait-il pas suffi d’accomplir un miracle plus limité, comme par exemple illuminer le champ de bataille de Givon par d’autres moyens surnaturels ?
Mais un miracle impliquant la production d’une lumière “artificielle” aurait signifié que les lois de la nature étaient transcendées, dépassées mais non transformées. Pour inspirer le Peuple d’Israël à ne pas simplement transcender leur être naturel mais aussi à le transformer et le sublimer, D.ieu insista pour que la lumière miraculeuse qui leur fut donnée soit la lumière naturelle du soleil, même si cela impliquait créer un nouvel ordre dans les cieux.

Un miracle en différentes étapes.
Le second miracle associé au 3 Tamouz eut lieu en 5687 (1927), le jour où le précédent Rabbi, Rabbi Yossef Its’hak Schnneersohn (1880-1950) fut libéré de la prison de Spalermo à Leningrad (aujourd’hui Pétersbourg).
Rabbi Yossef Its’hak avait été arrêté par des agents de la Guépéou (la police secrète soviétique, précurseur du KGB) et par la Yevsektsia (“section juive” du parti communiste) pour ses efforts menés pour soutenir et promouvoir la vie juive sous le régime communiste. Il fut condamné à mort, mais la pression internationale obligea le régime soviétique à commuer cette sentence en une condamnation de dix ans de travaux forcés en Sibérie, puis en un exil de trois ans à Kostrama, une ville de la Russie profonde. Le 3 Tamouz, il fut libéré de prison et envoyé en exil.
Neuf jours plus tard, le 12 Tamouz, allait survenir une nouvelle phase dans la libération du Rabbi précédent, un ordre lui permettant de retourner chez lui à Leningrad. Plusieurs mois plus tard, il fut autorisé à quitter le pays. De l’extérieur des frontières de la Russie, le Rabbi continua à diriger son réseau d’émissaires et d’activistes secrets qui fournirent et continuent à fournir jusqu’à ce jour (au grand jour, aujourd’hui) le support spirituel et matériel aux Juifs éparpillés dans l’ensemble de ce qui fut l’Empire soviétique.
Dans une lettre écrite lors du premier anniversaire de sa libération, Rabbi Yossef Its’hak déclare ; “Ce n’est pas seulement ma personne que D.ieu a libéré en ce jour… mais aussi tous ceux qui portent le nom d’Israël”. Rabbi Yossef Its’hak s’était engagé contre le parti communiste tout puissant et l’avait emporté dans ce véritable combat. Ceux qui cherchaient à détruire la vie juive en Union Soviétique étaient obligés de reconnaître qu’ils n’avaient aucun droit d’empêcher un Juif de pratiquer sa foi.
Maintenant, conclut le Rabbi dans son discours de 1991, après plus de dix décades nous avons eu le privilège d’assister à encore une autre réalisation de la victoire du Rabbi et du Judaïsme russe. La transformation miraculeuse qui est en cours dans ce pays est la suite du miracle auquel nous avons assisté le 3 Tamouz, en 1927.
Ici nous sommes les témoins d’un “ miracle naturel ” des plus grands. D’une part c’est une chaîne d’événements qui a transcendé toutes les lois et les normes naturelles. Suggérer, dans les sombres années du Stalinisme, qu’un individu seul pouvait contester le “droit” du parti tout puissant de déraciner le Judaïsme en Union Soviétique et y et persévérer, suggérer que l’étranglement par le communisme de millions d’âmes juives se desserrerait, en d’autres termes, prédire 1991 en 1927 aurait été semblable à arrêter le soleil dans sa course. Et en même temps, pourtant, c’était un “miracle naturel”, comme cela est accentué par le fait que : a) la libération du Rabbi avait nécessité l’accord de ceux-là mêmes qui l’avaient arrêté et condamné (un changement de l’intérieur, comme les récents événements dans ce pays) ; et b) la victoire ne fut pas immédiate et complète mais se produisit par étapes et continua de la sorte pendant de nombreuses années.
Le 3 Tamouz fut le jour où une nouvelle réalité supplanta l’ancienne. Et pourtant cette nouvelle réalité vit le jour par des moyens tout à fait conventionnels, de la manière graduelle et progressive qui sont les marques d’un développement naturel.

Des exemples spirituels et moindres
C’est la leçon du 3 Tamouz: ne pas être intimidé par les limites des formes naturelles, mais également ne pas les désavouer. Travailler, au contraire avec elles, pour les élargir et les étendre. Plutôt que de chercher à nous libérer des conditions naturelles, nous devons rechercher à libérer et élever la nature de la nature elle-même.
Le Coin de la Halacha
Qu’est-ce que la Tsedaka (charité) ?

La Tsedaka est l’argent que l’on remet à un pauvre ou à une institution (éducative, culturelle, cultuelle charitable…) en plus du Maasser (le dixième de ses profits qui doit, de toute manière, être donné à une cause charitable, puisqu’il ne nous appartient pas : il nous a simplement été confié par D.ieu afin que nous ayons le privilège d’agir en tant que Son intermédiaire).
Donner la Tsedaka ne causera aucun manque dans les revenus de la famille. Au contraire ! Nos Sages enseignent : «Donne afin de devenir riche !»
Puisque, de nos jours, de nombreuses femmes travaillent et gagnent de l’argent, il est donc approprié qu’elles aussi contribuent généreusement aux causes charitables.
Il est recommandé de multiplier les boîtes de Tsedaka (dans la cuisine, dans le séjour, dans la chambre de chaque enfant, dans les lieux de travail, dans les magasins, dans la voiture…) On donne la Tsedaka avant la prière, avant un voyage, avant un rendez-vous important, avant un examen, le jour du mariage, avant l’allumage des bougies de Chabbat et des jours de fête… Il est particulièrement recommandé de confier à des enfants ou à des personnes qui partent en voyage des sommes d’argent à remettre à la Tsedaka afin qu’ils soient considérés comme des «émissaires pour une Mitsva – Chalia’h Mitsva».
Plutôt que de jeûner pour un mauvais rêve ou une mauvaise nouvelle, il est recommandé de donner à la Tsedaka la somme d’argent qu’aurait coûté un repas, en principe un multiple de 18 (18 étant la Guematria, la valeur numérique de ‘Hay, la vie).
Il est écrit que le peuple juif sera délivré par Machia’h grâce au mérite de la Tsedaka.

F. L. (d’après le Rabbi)
De Recit de la Semaine
Le stylo

Un jeune étudiant de Yechiva entra une fois dans le bureau du Rabbi pour une entrevue privée. Comme le voulait la coutume, il tendit au Rabbi la feuille sur laquelle il avait écrit ce qu’il voulait demander au Rabbi, ses questions sur des passages difficiles du Talmud et des discours ‘hassidiques, ses projets pour l’année à venir, ses ambitions quant au travail communautaire qu’il espérait mener à bien… Enfin, il avait ajouté qu’il demandait au Rabbi sa bénédiction pour trouver bientôt la jeune fille avec qui il fonderait un foyer ‘hassidique.
Le Rabbi regarda la lettre puis signala au jeune homme qu’il avait oublié de la signer de son nom et celui de sa mère, selon la tradition : «Allez demander un stylo à quelqu’un dehors. Puis vous signerez la lettre et reviendrez la rapporter !» conseilla le Rabbi.
Le jeune homme sortit et s’adressa au premier ‘Hassid qu’il rencontra et qui attendait son tour à l’extérieur afin qu’il lui prête un stylo. Il se dépêcha de signer sa lettre puis rendit le stylo à l’homme tout en le remerciant profusément. Il retourna dans le bureau et tendit la lettre au Rabbi comme convenu. Le Rabbi le bénit et lui souhaita que D.ieu l’aide à trouver bien vite son Chidou’h, la jeune fille qui deviendrait son épouse.
Les visiteurs se pressaient pour entrer dans le bureau du Rabbi puis arriva le tour du ‘Hassid qui avait prêté son stylo. Il avait plusieurs sujets à discuter avec le Rabbi : ses affaires, sa santé et celle de son épouse, les études de ses enfants et ses activités communautaires… Entre autres, il mentionna devant le Rabbi que sa fille avait atteint l’âge du mariage et il demanda au Rabbi une bénédiction pour trouver le jeune homme qui saurait apprécier toutes ses qualités : «Le jeune étudiant de Yechiva qui m’a emprunté le stylo m’a fait une très bonne impression. Devrais-je peut-être m’intéresser à lui pour ma fille ?» demanda-t-il au Rabbi.
«Pourquoi pensez-vous que je l’ai envoyé à l’extérieur pour emprunter un stylo ? J’aurais pu lui prêter le mien !» répliqua le Rabbi avec un sourire.
Quelque temps plus tard, les deux jeunes gens furent présentés l’un à l’autre, ils se plurent, se fiancèrent et se marièrent.
De là, nous voyons non seulement comment le Rabbi pouvait voir au-delà des quatre murs de son bureau mais il savait même de qui le jeune homme allait emprunter le stylo !

Rav Leibl Groner, un des secrétaires du Rabbi
traduit par Feiga Lubecki