Un homme persuadé de son importance et de la profondeur de son savoir, se trouva être un jour le compagnon de voyage de Rav Chmouel Munkes, l’éminent et ô combien facétieux disciple de Rabbi Chnéour Zalman, le fondateur du ‘hassidisme ‘Habad, le saint auteur du Tanya.
Notre homme se rendait justement chez le Rabbi. Ce n’était pas une bénédiction qu’il allait chercher ni un conseil qui guiderait son cheminement spirituel. Non, indiqua t’il au Rav Chmouel Munkes, des questions lui étaient apparues au cours de ses études qu’il souhaitait soumettre au Rabbi.
Car le voyageur se piquait d’être un kabbaliste, convaincu que sa science ésotérique était telle qu’elle justifiait désormais le concours de Rabbi Chnéour Zalman.
Entendant cela, le Rav Chmouel Munkes sollicita un service. Lui-même butait sur un texte dont la difficulté d’interprétation paraissait bien le dépasser. Serait-il possible d’interroger également le Rabbi à ce propos ?
Ce texte était le suivant : « Du blanc d’en haut sort le jaune d’en bas qui, à travers le fondement de la nourriture première, parvient aux cercles qui, en suite de l’épreuve du feu, prodigue le plaisir ». L’ayant doctement énoncé, le Rav ajouta un conseil. La question était si profonde qu’elle devait être posée avant toute autre. D’ailleurs, à son écoute, le Rabbi comprendrait immédiatement l’importance de son interlocuteur.
L’homme acquiesça et c’est effectivement cette question qu’il posa d’abord au Rabbi. Qui le regarda avec un fin sourire et lui répondit :
« Mais c’est la recette des beignets : l’œuf dont la coquille est blanche donne du jaune quand on le casse en le projetant de haut en bas dans le récipient. Puis en y rajoutant de la farine, nourriture fondamentale des hommes, on en fait des beignets qui, une fois cuits, prodiguent généralement du plaisir ».
Confus notre « kabbaliste » n’osa pas poser ses propres questions et, piteux, s’en alla.