Durant l'été 1972, Avraham Goldensky terminait ses préparatifs en vue de son retour en Israël après une année passée aux États-Unis pour le compte du Ministère israélien des Transports. Quelques jours avant son départ, un de ses amis lui suggéra de se rendre auprès du Rabbi de Loubavitch : «Si déjà tu te trouves à New York, ce serait dommage de laisser passer cette opportunité !». Bien que M. Goldensky ait été un socialiste endurci, il accepta la proposition, téléphona au secrétariat du Rabbi et obtint un rendez-vous à une heure du matin, la veille de son départ.

Des années auparavant, il avait été sérieusement blessé dans un accident de voiture et les médecins avaient dû l'amputer de ses deux jambes. Grâce à son courage et sa détermination, il surmontait son handicap et avait tenu à reprendre ses activités au sein du Ministère.
Quand il entra dans le bureau, le Rabbi se leva pour l'aider à s'asseoir puis s'intéressa à son travail ainsi qu'à ses recherches. Soudain, à la fin de l'entretien, le Rabbi suggéra qu'il se fasse examiner par un certain spécialiste avant de quitter les États-Unis en ajoutant qu'il prenait les frais de la consultation à sa charge. Enfin, le Rabbi lui demanda des nouvelles de sa famille et mentionna comme en passant : «N'oubliez pas de m'envoyer un faire-part avant le mariage de votre fille !» M. Goldensky était étonné : sa fille était encore très jeune mais le Rabbi avait parlé très sérieusement !
Bien que sceptique quant aux connaissances médicales du Rabbi, M. Goldensky se sentit obligé d'obéir au Rabbi et retarda son voyage de retour. La nuit même, le Rabbi s'assura que le rendez-vous avait bien été pris avec un des meilleurs spécialistes. Quand le médecin l'examina, il affirma : «Regardez ces radiographies ! C'est un miracle que vous soyez venu aujourd'hui car votre colonne vertébrale se détériore rapidement. Cependant, vous n'avez pas besoin d'être traité ici, vous disposez d'excellents médecins à l'hôpital Hadassa à Jérusalem !»
Le lendemain, M. Goldensky se présenta à nouveau au 770 Eastern Parkway, la synagogue du Rabbi, pour le remercier : maintenant, il ne doutait plus des connaissances médicales du Rabbi. Quand le Rabbi entra au 770, il s'arrêta pour l'entendre expliquer les résultats de la visite médicale puis il suggéra : «Il y aura un Farbrenguen (réunion 'hassidique) ce Chabbat, restez donc ici ! Et je vous rappelle encore une fois : n'oubliez pas de m'envoyer un faire-part pour le mariage de votre fille !»
Le docteur passa Chabbat dans le quartier de Crown Heights et se rendit même au Farbrenguen durant lequel le Rabbi lui manifesta plusieurs fois son amitié et l'invita à trinquer Le'haïm, à la vie !
Avant son départ, le Rabbi lui souhaita un bon voyage et lui demanda de rester en contact avec les 'Hassidim de Jérusalem. Puis le Rabbi rappela : «Pour la troisième fois, je vous demande de ne pas oublier de m'envoyer un faire-part pour le mariage de votre fille !»
Inutile de souligner combien M. Goldensky était intrigué par cette insistance du Rabbi.
A Jérusalem, il se lia d'amitié avec les 'Hassidim qui l'aidèrent à changer les Mezouzot de sa maison, lui réapprirent à mettre régulièrement les Téfilines et instituèrent pour lui et ses amis, intellectuels comme lui, des cours de 'Hassidout qu'ils fréquentèrent assidûment.
Trois ans plus tard, sa fille unique s'apprêta à se marier. Bien entendu, il envoya le premier carton d'invitation au Rabbi.
C'est alors qu'il subit une attaque cardiaque et dut être hospitalisé. Quelques jours plus tard, il reçut une longue lettre du Rabbi qui lui envoyait ses chaleureux souhaits de Mazal Tov ainsi que des explications sur le mariage selon la 'Hassidout. Puis le Rabbi suggérait qu'il accomplisse rigoureusement les Mitsvot «car tel est tout le but de l'homme». Le Rabbi continuait : «Nul doute que vous allez me suspecter – à juste raison – de ne pas écrire cela uniquement d'un point de vue intellectuel et certainement pas pour vous asséner des leçons de morale, D.ieu préserve. Je ne le fais que pour vous encourager à accomplir effectivement les commandements de D.ieu. Car l'action est essentielle : peu importe si on n'en comprend pas immédiatement les bienfaits et qu'on ne les comprenne qu'après l'action...
«J'ai remarqué combien vous êtes déterminé – malgré votre état de santé – dans vos relations avec autrui, comment vous avez été capable de surmonter de terribles difficultés en démontrant ainsi que vous n'étiez nullement inférieur aux autres mais que vous étiez même capable de les surpasser – le tout avec sourire et optimisme. C'est pourquoi je n'ai aucun doute que vous désirerez – au moins en l'honneur du mariage de votre fille – tout mettre en œuvre pour devenir pour elle un modèle en étant capable de changer votre mode de vie».
Le Rabbi concluait : «Il semblerait correct de ma part de vous demander de m'excuser de me mêler de votre vie privée, de plus d'une façon aussi directe. Cependant, comme il s'agit d'une affaire vitale, si importante et si sérieuse, je ne peux pas me permettre de ne pas exprimer mes réflexions et mes espoirs».
Malgré son mauvais état de santé, M. Goldensky passa de longs moments à s'imprégner de la lettre du Rabbi, la relisant du début à la fin. Finalement, il concéda : «Cette lettre est extrêmement importante, je dois m'y conformer dans tous les domaines évoqués...»
Ce devait être ses derniers mots. Quelques instants plus tard, il rendit son âme à son Créateur.
Ce n'est que par la suite que l'on comprit pourquoi le Rabbi avait tellement insisté pour qu'il envoie un faire-part d'invitation au mariage. Le Rabbi avait compris ce qui lui arriverait juste avant le mariage de sa fille et savait que ce serait alors le meilleur moment pour l'influencer vers une Techouva, un retour à D.ieu de toute son âme. Effectivement, M. Goldensky mérita de rendre son âme à D.ieu dans la pureté la plus absolue, après avoir résolu de se conformer sincèrement à une vie de Torah.
Ainsi, grâce à la lettre du Rabbi, il avait acquis en un instant le bénéfice d'un retour complet à D.ieu.

Menachem Ziegelboim
Traduit par Feiga Lubecki