Lettre n° 70

[Nissan 5703]

En ce mois de la délivrance, il est bon de se rappeler des propos de nos Sages. Selon Rabbi Eliézer, la délivrance, à laquelle fait allusion le Choffar de Roch Hachana, interviendra en Tichri, alors que, pour Rabbi Yochoua, elle aura lieu en Nissan, car il la compare à la nuit de la sortie d'Egypte, protégée depuis les six jours de la création.

Cette divergence peut être comparée à une autre discussion, qui les oppose également. Selon Rabbi Eliézer, les enfants d'Israël seront libérés parce qu'ils feront d'eux-mêmes Techouva et c'est également ce qu'évoque le Choffar, puisqu'il est dit: "si vous améliorez vos actions, Tichri rachètera vos fautes".

Pour Rabbi Yochoua, les enfants d'Israël, même s'ils n'accèdent pas par eux-mêmes à la Techouva, subiront la présence d'un roi cruel, que D.ieu leur enverra pour améliorer leur comportement. Ceci peut être comparé à la sortie d'Egypte, lorsqu'ils furent libérés afin de recevoir la Torah. Or, nos Sages soulignent qu'ils la reçurent par la contrainte et c'est pour cela que la montagne fut placée au dessus de leurs têtes.

On sait qu'il existe trois dimensions, l'espace, le temps et l'âme. Ce qui vient d'être dit concerne les deux dernières. Pour ce qui est de la première, la distinction qu'il convient de faire est très simple. Pour Rabbi Eliézer, les Juifs seront nécessairement méritants et D.ieu hâtera donc la délivrance, alors que, pour Rabbi Yochoua, même s'ils n'ont pas ce mérite, elle viendra en son temps. Ce qui découle de cette différence est expliqué par ailleurs.

Pour autant, la Torah fut effectivement acceptée par la contrainte, car les enfants d'Israël n'étaient pas encore astreints à la mettre en pratique, ce qui n'est plus le cas, à l'heure actuelle.

De fait, même sous la contrainte, il est possible de la respecter de tout son coeur. Ainsi, le Rambam explique que celui qui, victime de son mauvais penchant, décide de négliger une Mitsva, puis subit la flagellation, jusqu'à ce qu'il la mette en pratique, n'est nullement considéré comme ayant été forcé à le faire. Car, au fond de lui, il souhaite être partie intégrante du peuple d'Israël.