Lettre n° 69

[6 Nissan 5703]

Je conclurai ma lettre avec ce qui concerne ce mois.

Selon Rabbi Eliézer, la délivrance interviendra en Tichri, alors que, pour Rabbi Yochoua, elle sera en Nissan. Le premier avis est basé sur une comparaison entre le Choffar de Roch Hachana et celui de la délivrance, alors que le second prend pour référence la nuit, protégée depuis les six jours de la création, qui fut celle de la sortie d'Egypte.

Cette controverse, portant sur le temps de la délivrance, s'applique également aux âmes juives, dans leur accomplissement de la Torah et des Mitsvot. Selon Rabbi Eliézer, les enfants d'Israël connaîtront la délivrance lorsqu'ils accéderont à la Techouva par leur propre initiative. C'est également à cela que font allusion le Choffar de Roch Hachana, comme l'explique le Rambam et, de manière plus générale, le mois de Tichri. Nos Sages disent, en effet: "Sonnez du Choffar dans le mois: si vous améliorez vos actions, la balance penchera en Tichri et ce mois rachètera et blanchira les fautes de Ton peuple".

Pour Rabbi Yochoua, les enfants d'Israël seront naturellement libérés, même s'ils n'accèdent pas à la Techouva, car D.ieu leur enverra un roi dont les décrets seront aussi durs que ceux de Haman et ils amélioreront ainsi leur comportement. C'est bien ce qui se passa lors de la sortie d'Egypte, quand ils furent libérés afin de pouvoir recevoir la Torah. Et nos Sages font remarquer que celle-ci leur fut donnée sous la contrainte. C'est pour cela que le mont Sinaï fut placé au dessus de leurs têtes.

C'est aussi pour cela que la nuit de la sortie d'Egypte fut, selon l'expression de nos Sages, protégée depuis les six jours de la création. Cette expression établit clairement qu'une telle protection n'était pas le fait des hommes.

Du reste, commentant les versets "voici les générations des cieux et de la terre, lorsqu'ils furent créés... alors qu'il n'y avait pas d'homme pour travailler la terre", nos Sages disent: "Il n'y avait pas un homme susceptible de soumettre les créatures au Saint béni soit-Il".

Néanmoins, il y a une grande différence entre la période actuelle et ce qui se passa à l'époque. Lors du don de la Torah, les enfants d'Israël n'étaient pas encore astreints à la pratique de la Torah et ils pouvaient donc prétendre que celle-ci leur avait été imposée par la contrainte. Mais, à l'heure actuelle, ils doivent la mettre en pratique et, même si la Techouva leur est imposée par un roi cruel, ils doivent se dire que D.ieu est à l'origine d'une telle situation. Se plier à cette contrainte est donc bien un moyen d'agir de tout son coeur.

Ainsi, dit le Rambam, celui qui, victime de son mauvais penchant, décide de négliger une Mitsva, puis subit la flagellation, jusqu'à ce qu'il la mette en pratique, n'est nullement considéré comme ayant été forcé à le faire. Car, au fond de lui, il souhaite être partie intégrante du peuple d'Israël et respecter l'ensemble des Mitsvot.

Avec ma bénédiction pour une fête cachère et joyeuse, la Techouva immédiate et la délivrance immédiate,

Rav Mena'hem Schneerson,
Directeur du comité exécutif