Lettre n° 209

Par la grâce de D.ieu,
7 Chevat 5706,

Au 'Hassid, érudit qui craint D.ieu,
le grand Rav A.(1),

Je vous salue et vous bénis,

Je fais réponse à votre lettre:

A) Mangera-t-on et boira-t-on dans le monde futur?

Les promesses et les assurances de la Loi Ecrite et de la Loi Orale permettent de déterminer trois périodes, celle du Machia'h, le Gan Eden et le monde après la résurrection des morts. Du reste, le Gan Eden et le monde après la résurrection sont, l'un et l'autre, appelés "monde futur", ce qui est à l'origine de plusieurs confusions.

1. La période du Machia'h: Le traité Bera'hot 34b rapporte deux avis sur ce que sera alors le comportement, une modification complète ou un simple affranchissement des nations(...). Différents points concernant la résurrection des morts n'ont pas été précisés par la partie révélée de la Torah, comme le souligne le Rambam. Néanmoins, d'après le premier avis comme d'après le second, on continuera à manger et à boire pendant la période du Machia'h. Des versets et des propos de nos Sages permettent de l'établir. De plus, le Rambam le dit clairement.

2. Le Gan Eden: C'est le sanctuaire des âmes sans corps. Il est donc clair que la nourriture et la boisson n'y ont aucun sens.

3. Le monde après la résurrection des morts: Les âmes se vêtiront à nouveau de corps. Différentes références, sur cette question, figurent dans la rubrique "Explications et éclaircissements" du sixième numéro de Kovets Loubavitch(2). Nos Sages disent, au traité Bera'hot 17a, que, "dans le monde futur, on ne mangera pas et l'on ne boira pas". Selon le Rambam, il en sera ainsi lorsque les âmes auront perdu leur corps. Après la résurrection, en revanche, on continuera à manger et à boire.

Le Rambam considère, en effet, que la rétribution de l'âme lui sera essentiellement accordée lorsqu'elle n'aura plus de corps, car elle ne pourrait l'obtenir en étant limitée par lui. Il en conclut que ceux qui revivront mourront, par la suite. C'est après cela qu'ils accéderont au monde futur, récompense essentielle de ce monde(...).

De nombreux Grands d'Israël s'opposent à lui, sur ce point. Le Ramban, en particulier, soulève de fortes objections, faisant la preuve que la résurrection des morts est bien la finalité ultime. Il affirme que "telle est la vérité, d'après la Kabbala". Il en résulte que l'affirmation de nos Sages selon laquelle on ne mangera pas et l'on ne boira pas concerne bien la récompense finale, c'est-à-dire la résurrection des morts.

B) Lors de la résurrection, le corps sera-t-il entier, ou bien l'infirme revivra-t-il avec son infirmité, pour guérir par la suite?

Nos Sages enseignent, au traité Sanhédrin 91b, que les morts revivront infirmes et guériront par la suite. Le Midrach Béréchit Rabba est plus précis: "L'homme reviendra tel qu'il est parti. S'il était aveugle, il le restera, s'il était habillé, il le demeurera. Puis, Je les guérirai". Nos Sages disent, en outre, que le soleil sera à l'origine de cette guérison.

Cette notion, de même que les suivantes, sera longuement expliquée dans un recueil qui paraîtra bientôt(3).

C) Lorsque des âmes ont connu plusieurs vies successives, quel est le corps qui revivra(4)?

On peut, sur ce point, envisager plusieurs distinctions. De manière générale, l'explication est la suivante. L'âme, ou plus exactement chaque partie qui la constitue, se réincarne, en principe, pour compléter ce qu'elle n'a pas accompli, dans sa vie précédente. Or, "tous les Juifs sont emplis de Mitsvot, comme une grenade est emplie de graines". Au cours de chaque vie, une partie de l'âme reçoit donc son élévation. Ainsi, chaque corps peut prendre part à la résurrection avec la partie de l'âme qui a trouvé l'élévation en lui.

Le Chaar Haguilgoulim dit: "Si le corps meurt sans que l'âme n'ait pu connaître une complète élévation, il n'a pas atteint le but qui lui était assigné et, lors de la résurrection, il recevra uniquement la partie de l'âme qu'il a élevé de son vivant. Puis, cette âme se réincarnera , afin de parfaire son élévation et la partie de l'âme transformée par ce second corps lui permettra également de vivre, lors de la résurrection".

Il ne faut pas être surpris par cette répartition de l'âme entre plusieurs corps. Il faut, en effet, savoir que chaque partie de l'âme possède les caractères de l'ensemble, bien qu'elle ne soit qu'une parcelle d'une âme plus large. Du reste, toutes les âmes ne sont qu'une partie de celle d'Adam, le premier homme et nos Sages soulignent que, alors que son corps n'était encore qu'une esquisse, le Saint béni soit-Il lui montra tous les Justes que compterait sa descendance, ceux qui étaient liés à sa tête ou à d'autres parties de son corps.

Vous consulterez, à ce propos, les chapitres 2 et 37 du Tanya et d'autres références encore.

D) Il est des endroits dans lesquels le jour ou la nuit durent plus de vingt quatre heures et le Zohar dit: "Il y a un lieu où c'est en permanence le jour, qui ne connaît pas la nuit, si ce n'est pendant un court instant".

Dès lors, comment y respecter le Chabbat? Faut-il compter les heures ou les jours en fonction d'un autre endroit, ou bien se baser sur le lever et le coucher du soleil?

Je ne comprends pas votre question. Comment envisagez-vous de respecter le Chabbat en fonction du lever du soleil, qui se produit seulement tous les quelques jours ou mêmes tous les quelques mois? Et comment se baser sur un autre endroit? Lequel choisir? Le Zohar dit, en effet, que "lorsqu'il fait clair pour les uns, il fait clair pour les autres, lorsqu'il fait jour pour les uns, il fait nuit pour les autres".

Il est donc clair qu'en pareil endroit, on doit compter les heures, vingt quatre formant un jour. Et le Chabbat commencera à la même heure dans tous les points ayant la même latitude(5). Il me semble que le Séfer Haberit(6) évoque cette idée, mais je ne le possède pas.

Voici ce qu'il reste à déterminer, en la matière:

1. Pour tout ce qui dépend du jour et de la nuit, par exemple l'heure de la prière, à partir de quel endroit se base-t-on sur le temps mesuré par la montre et non sur le temps calculé, en fonction d'heure à amplitude variable(7)?

Ainsi, dans un endroit où il fait jour uniquement pendant une heure, il est inconcevable que le jeûne du 10 Tévet(8) y dure seulement une heure.

2. Comment calculer la latitude au pôle nord ou au pôle sud? Comment respecter le Chabbat dans ces endroits? Il convient de s'interroger, à ce propos, mais ce n'est pas ici l'occasion de le faire.

Avec ma bénédiction de Techouva Immédiate, délivrance immédiate,

Mena'hem Schneerson,
Directeur du comité exécutif(9)

Notes

(1) Rav Avraham Hecht.
(2) Il s'agit de la lettre n°85.
(3) Il s'agit de la lettre n°200.
(4) Voir, à ce propos, la lettre n°193.
(5) Dans tous ces points, le milieu du jour et le milieu de la nuit sont à la même heure. Lorsque, d'une part, le jour s'allonge, au milieu de l'été, le coucher du soleil sera retardé, d'autre part, jusqu'au milieu de la nuit. A l'opposé, lorsque, d'une part, la nuit s'allonge, au milieu de l'hiver, le coucher du soleil interviendra, d'autre part, au milieu du jour.
(6) Qui demande de compter six jours de vingt quatre heures, mais ne dit pas quand commencer ce compte.
(7) C'est-à-dire faisant plus de soixante minutes en été et moins de cela, en hiver.
(8) Le jeûne le plus court, qui intervient au milieu de l'hiver.
(9) De Ma'hané Israël.